PLEASE KILL ME « L’Histoire non censurée du Punk racontée par ses acteurs »

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Le punk n’a pas toujours été qu’un cliché à la « Punk’s not dead », iroquoise et épingle à nourrice de rigueur. Ce fut avant tout un mouvement américain d’un public rock lassé des leurres des 60’s et consciente du gâchis organisé se profilant avec les 80’s.
Legs Mcneil (Ecrivain, ancien punk attitré du magasine Punk. Ancien rédacteur principal du magasine Spin et rédacteur en chef du magasine Nerve) : « La décadence était l’essence du glitter rock…La décadence semblait complètement dépassée, parce que le déclin suppose qu’il reste encore du temps, et il n’y en avait plus. Les choses s’étaient stoppées… Comparée à ce qui se passait dans le monde réel, la décadence semblait assez désuète. Aussi le punk ne parlait pas de déclin, il parlait d’apocalypse. Le punk parlait de l’annihilation. Rien n’a marché, donc allons droit à l’Armageddeon. Tu sais, si tu apprenais que des missiles étaient en route, tu commencerais sans doute à dire ce que tu as toujours voulu dire, tu te tournerais probablement vers ta femme pour lui dire : « Tu sais, j’ai toujours pensé que tu étais une grosse vache ». Et c’est comme ça qu’on se comportait. »

Avec plus de 600 pages d’interviews des différents acteurs de cette scène et de sa faune environnante, Please Kill Me propulse le lecteur dans l’œil du cyclone,  au cœur de cette genèse sans aucun fard ni pudeur, distillant l’esprit d’une époque, d’un mouvement, le comique embrassant le tragique, les futilités et les joies s’étalant au même titre que les bassesses d’un junky, ou les chroniques de morts annoncées.
William Burroughs (Ecrivain): « J’ai toujours pensé qu’un punk était quelqu’un qui acceptait de se faire enculer. »
Duncan Hannah (Peintre, acteur, fan de rock. Ancien président du fan-club de Television) a propos de Lou Reed : « J’étais vraiment déprimé parce que j’avais espéré quelque chose de complètement différent. Ce n’était pas comme dans les bouquins : « Seigneur, j’ai rencontré mon héros et on a parlé de Raymond Chandler ! » Au lieu de ça, c’était : « je peux te chier dans la bouche ? ».
Mick Farren (Ecrivain, chanteur de The Deviants) : « De la cocaïne à la pelle. Il n’y a pas besoin de beaucoup de talent pour ingérer des drogues… Les drogues ont ramené l’argent…Le punk n’était pas capable de relever un vrai défi. »

Chacun se révèle dans cette incandescence, la censure n’ayant pas lieu de citer. Le montage chronologique donne la dimension historique nécessaire à ce type d’ouvrage, nous permettant  de mieux comprendre l’esprit mais aussi l’influence du punk américain sur le développement du phénomène punk anglais, pointant bien entendu le rôle d’un certain Malcom MacLaren, mais également d’autres acteurs .
Danny Fields (ancien freak de service d’Elektra records, ancien chroniqueur, ancien manager des Ramones) à propos de la première rencontre entre les Clash et les Ramones : « Paul et Mick n’étaient pas encore dans les Clash mais ils étaient en train de commencer. Ils avaient peur de jouer jusqu’à ce qu’ils aient vu les Ramones. Je veux dire, Paul et Mick ont dit aux Ramones : « Maintenant qu’on vous a vus, on va faire un groupe. »
Les Ramones ont répondu : « tout ce que vous devez faire, c’est jouer, les gars. Vous savez, sortir de vos caves et jouer. C’est ce qu’on a fait. ». En gros les Ramones leur ont dit, ce qu’ils ont dit à d’innombrables autres groupes : «  Vous n’avez pas besoin de vous améliorer, lancez-vous simplement, vous valez ce que vous valez. N’attendez pas d’être meilleurs, comment vous le saurez ? Lancez-vous, et faites-le c’est tout. »

C’est ce que les Ramones avaient appris des New York Dolls, vous savez, « qu’est-ce qu’on attend ? » Pour moi, c’est ça le plus important, le savoir oral que les groupes se transmettent. »

La liberté de ton, la confrontation de ces portraits  (groupies, travestis, managers, journalistes, …) bien qu’ayant un arrière goût d’amertume et de sordide (les morts successives de Sid Vicious, Johnny Thunders, Jerry Nolan) balance le parfait reflet d’une réalité crasseuse, où l’urgence et l’intensité des excès ne révèlent finalement que l’affirmation d’une certaine forme d’innocence de ces acteurs, ultime et vaine critique d’une culture capitaliste asservissante.
Legs Mcneil : « Les mouvements de masse sont toujours si peu pointus. C’est ça qu’il y avait de génial dans le punk. C’était un anti-mouvement, parce que dès le début on était conscients qu’avec le succès de masse arrivent tous ces gens ennuyeux qui ont besoin qu’on leur dicte ce qu’ils doivent penser. Un truc branché ne peut jamais être un mouvement de masse. Et culturellement, le mouvement de libération gay et tous les autres mouvements de cet acabit étaient le début du politiquement correct, qui pour nous n’était rien d’autre que du fascisme. Du vrai fascisme. Davantage de règles. Mais quant à être homophobes, c’était ridicule, parce que tous les gens avec qui on traînait étaient homos. Personne n’avait de problème avec ça, tu sais, super, baise avec qui tu veux. Ce qui était génial dans ce mouvement, c’est que la curiosité des gens semblait plus forte que leurs peurs. L’époque était mûre pour une exploration authentique, mais pas dans un mouvement de masse à la mode. »

A lire de toute urgence.

De LEGS MCNEIL et GILLIAN MCCAIN
Ed. ALLIA – 2006

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