Hacride – Amoeba

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Style: metal extreme moderneAnnee de sortie: 2007Label: Listenable

Hacride fut notre « groupe du moment » de mai 2005 et il est clair que leur 1er album, Deviant Current Signal, est un des « premier album de groupe metal français » qui m’a le plus marqué ces dernières années. Ils reviennent donc aujourd’hui avec sous les bras Amoeba qui promet de titiller ceux qu’il restait à convaincre et je reprend ma plume pour tacher d’aller en ce sens.

Le groupe a manifestement compris qu’ils ne pouvaient évoluer qu’en poursuivant dans la voie des morceaux les plus aboutis de Deviant Current Signal, ceux qui dégageaient le plus d’originalité et s’éloignaient des influences death technique marquées des débuts. Le groupe ne s’était d’ailleurs pas trompé en choisissant « Protect » et « This Place » comme morceaux mis en avant lors de la promo, et Amoeba apparait rapidement comme une suite directe de ces morceaux. Ce nouvel album est ainsi plus cohérent, Hacride y affirmant vraiment son style, un metal moderne complexe basé avant tout sur la tension rythmique et les ambiances noires.

Rythme et puissance sont au centre de tous les morceaux du groupe -c’est pour cette raison que Meshuggah est souvent revenu dans les comparaisons qu’a suscité leur premier album- un rythme trituré, s’affranchissant souvent des carcans binaires. Des rythmes hypnotiques, s’adaptant sans cesse à de nouvelles cassures de tempo, emmenés par un jeu de batterie fourni, en particulier au niveau de la double grosse caisse.
Moderne et mécanique, le son d’Hacride reste toutefois organique, ne s’avanturant pas dans une veine cyber/indus. Sans ajout d’électronique, seules des guitares sont présentes, en riffs graves saccadés, certes parfois assez redondants mais qui arrivent à ne pas lasser grace à de nombreuses trouvailles, harmoniques sifflantes, glissando, touches de tapping ou superpositions d’arpèges en son clair qui relèvent de mélodies les assauts de la rythmique.

Cet aspect brut et direct est contrasté par des cassures d’ambiances nombreuses, les déflagrations death les plus extrêmes laissant place à des passages mélodiques plus ambiancés qui peuvent rappeler parfois leurs collègues du collectif Klonosphère, Klone en tête. Le mot progressif n’est vraiment pas usurpé ici, tant les 9 longs morceaux de cet album sont chargés de mille détails et rebondissements. « Deprived of soul », le morceau qui me marque le plus, en est un bon exemple, riche de riffs cassés s’y enchainent sans cesse pendant les 2 premières minutes, il aboutit à un refrain mélodique délié des plus originaux pour reprendre aussi sec puis nous perd dans un dédale qui se cloturera par un solo mémorable. Alors que la fin parait annoncée, le morceau reprendra après quelques notes en son clair sur un riff typiquement prog au groove rythmé terrible sur un fond d’arpège délié. Décidément, ce morceau me fait toujours autant d’effet après des dizaines d’écoute.

Amoeba est ambitieux et le groupe n’hésite pas à s’aventurer avec « Zambra » dans une schyzophrénique reprise d’un groupe espagnol de flamenco actuel, Ojos de Brujo, pour une version metal surprenante d’un de leurs morceaux, alternant passages flamenco et puissamment metal. La chanteuse et le chanteur de Ojos de Brujo viennent même y poser leurs voix, quasiment de la même façon que sur l’originale, même si la musique a été énormément retravaillée par Hacride, s’intégrant sans problème dans le style du reste de l’album.

« Zambra » est toutefois un des morceaux les plus positifs de l’album, l’ambiance étant par ailleurs des plus noires, la mélancolie, la rage, la frustration suintant de toutes les compositions. La voix n’y est pas pour rien, puissante mais sur le fil du rasoir, chargée d’émotion, elle explose et ponctue de râles exangues les attaques frontales de la musique puis s’épanche lors de longs cris faisant office de nappes granuleuses sur les passages plus posés, présageant en général en crescendo les changements de tempo ou d’ambiance.
Le travail sur la voix démarque singulièrement le groupe au sein de la sphère metal, Sam a un grain rauque bien particulier, toujours saturé -on ne comprend d’ailleurs quasiment rien des paroles- mais laissant entrevoir par moment des touches de mélodies, quelques envolées plus claires toujours judicieuses.

Je ne suis plus à convaincre, Deviant Current Signal m’avait déjà emballé et Amoeba renouvelle mon enthousiasme, pour moi pas une note n’y est à jeter et son esprit correspond exactement à mes envies du moment. Hacride s’est vraiment admirablement bien renouvelé sur ce nouvel album qui en plus bénéficie d’une production exemplaire (coproduction du groupe avec Franck Hueso). Amoeba a de quoi impressionner n’importe quel fan de metal, qu’on aime le style ou pas, il y a rien à dire sur la richesse rythmique et mélodique, l’originalité, l’interprétation de cet album. On ne peut que souhaiter que le groupe continue dans cette voie, qu’il atteigne un public plus large, et pourquoi pas suive les pas de leurs collègues de chez Listenable Gojira à l’international.

  1. perturbed
  2. fate
  3. vision of hate
  4. zambra
  5. liquid
  6. cycle
  7. deprived of soul
  8. strength
  9. ultima necat
  10. on the threshold of death
jonben

Chroniqueur

jonben

Krakoukass et moi avons décidé de créer Eklektik en 2004 suite à mon installation à Paris, alors que disparaissait le webzine sur le forum duquel nous échangions régulièrement, ayant tous deux un parcours musical proche entre rock et metal, et un goût pour l'ouverture musicale et la découverte perpétuelle de nouveautés. Mes goûts se sont affinés au fil du temps, je suis surtout intéressé par les groupes et styles musicaux les plus actuels, des années 90s à aujourd'hui, avec une pointe de 70s. J'ai profité pendant des années des concerts parisiens et des festivals européens. J'ai joué des années de la guitare dans le groupe Abzalon. Mes styles de prédilection sont metal/hardcore, death technique, sludge/postcore, rock/metal prog, avec des incursions dans le jazz fusion et le funk surtout, depuis une île paumée de Thaïlande. 

jonben a écrit 528 articles sur Eklektik.

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10 Commentaires

  1. OYC says:

    Tu aimes ce groupe hein petit Benoit ;)
    Pas aussi amoureux que le camarade Jonben, mais tout à fait sous le charme d’un album bien écrit et très bien exécuté. A recommander, surtout pour l’intelligence de l’écriture.

  2. kollapse says:

    Hacride a sorti là un album extrèmement abouti, où compos réfléchies dans leurs moindres marrient puissance (ouch!) et mélodies judicieuses à merveille. Hacride transcende intelligemment ses influences, ils ne sonnent plus que comme du Hacride. Oui il y a du Meshuggah dans ces rhytmiques saccadées, oui il y a du Townsend, du Death mais tout ça est passé à la moulinette Hacride et croyez moi ça a de quoi impressioner. Imposant, ce « Amoeba » place Hacride parmi les grosses cylindrées du métal français, juste à coté de Gojira et Scarve (si si). Vous le croyez pas ça ? Ecoutez Amoeba, you will see. Enorme, Yeah !!!

  3. Lebo says:

    Tres bon album. Une belle confirmation (voire plus).

  4. Gothenburg says:

    c’est de la bonne et la pochette est magnifique, je sais pas qui a fait l’artwork, mais putain d’artiste le mec.

  5. RBD says:

    Chronique fouillée pour un disque exigeant qui méritait amplement un tel travail.

  6. Textures says:

    J’entends du Jaz Coleman sur les parties de chant (plus) clean…C’est grave docteur?

  7. darkantisthene says:

    du michael jones je veux bien mais du jean-jaz coleman faut vraiment avoir de l’imagination !

  8. Joss says:

    Aïe :-s

  9. Textures says:

    Ok…dommage…je sors :D

    Nan mais sans dec’, écoutez le Killing Joke 2003…le grain de Coleman, cette agressivité, ce timbre sur les passages clean…non?
    …tant pis :D
    ================>[ ]

  10. jonben jonben says:

    Si si, il y a de ça.

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