Sunn O)))/Boris – Altar

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Style: doom/droneAnnee de sortie: 2006Label: Southern Lord

L’évolution de Sunn O))) hors des territoires réservés à la presse metal jusqu’au terrain de jeu de la presse indé a été pour le moins inattendue. Difficile de vendre un produit qui aurait du ne plaire qu’à une poignée de passionnés de la musique des grands fonds et laisser le reste du monde sur la surface en train de se gratter la tête. Finalement, l’expérience Sunn O))) continue d’unir les publics et les musiciens. Collaboration avec le monde du black metal ou de la musique expérimentale pour finalement revenir vers des collègues, voisins dans les rayons doom des disquaires, mais séparés par des milliers de kilomètres sur les cartes de géographie. Le choix de nommer l’album en utilisant le nom des deux groupes est assez surprenant car le résultat tient plus du fond de commerce de la machinerie Southern Lord, mené par nos druides habituels, Stephen O’Malley et Greg Anderson. Les photos où les cinq musiciens sont habillés de robes laissent déjà planer l’aura d’une collaboration où l’un a le dessus sur l’autre. De plus, la récente orientation plus rock et directe de Boris ne laisse ici pratiquement aucune trace sur les compositions. Sans être un album de Sunn O))) traditionnel, si cela existe étant donné l’évolution du duo à travers ses performances et ses collaborations, l’emprunte du culte des amplis et de la note qui dure longtemps est encore présente au premier plan.

La collaboration entre les musiciens se ressent cependant dans le jeu puissant, mais un peu désordonné, du batteur de Boris sur « Etna ». Sans procurer de structure aux autres instruments, sa frappe dessine les mouvements du sol tandis que gronde le volcan. Aussi fantomatique que la présence des musiciens sur la pochette de l’album autour d’un étrange arbre où loge une lanterne, la musique s’infiltre plus doucement que sur les précédents disques de Sunn O))). Altar n’est pas un album qui envahit le corps par sa puissance sonore mais qui se déplace dans l’atmosphère avec beaucoup plus de légèreté et une plus grande attention aux détails. Flight of the behemoth, par exemple, était un mastodonte de basse qui remuait sous terre. Les deux albums White 1 et 2 comprenaient des plages d’invocation à une quelconque divinité oubliée. Quant à Black one, il éteignait les lumières et vous plongeait six pieds sous terre. Altar par contre, tout en conservant cette part de mysticisme, ressemble plus à un culte païen interprétant des chants en hommage aux défunts. Toutefois, la musique est ici beaucoup plus lumineuse car elle fait moins appel à des sonorités graves. L’usage de voix sur « Fried eagle mind » et sur le sublime « the Sinking bell (blue sheep) » procure une accroche beaucoup plus palpable que les hurlements indéchiffrables de Malefic sur Black one. « The sinking bell (blue sheep) » pourrait d’ailleurs être un single si elle ne ressemblait pas autant à une marche funéraire. Lente, douce et amère à la fois, elle surprend mais enchante très vite grâce à cette voix féminine rauque (Jesse Sykes) et ses arrangements subtils, comme cette note finale à l’accent country.

Et bien que ce disque ne soit pas une collection de chansons construites au préalable mais improvisées en studio, il marque par sa justesse et sa richesse sonore. On pourrait parler d’accidents heureux mais cela serait refuser d’attribuer du talent à un groupe de musiciens qui ne manquent pas d’inventivité. Les roulements de batterie de « Etna », le trombone de « Fried eagle mind » qui intervient en marquant un rythme digne d’une marche impériale, la liste des instruments et des musiciens sur chaque titres est variée et permet à chacun d’eux de se dégager de l’ensemble tout en formant une expérience sonore marquante émotionnellement et qui fait continuellement céder les conventions. Chant, batterie, construction presque rock, Sunn O))) ne propose pas la même formule et marque bien la rupture entre ce que les gens attendent d’eux et ce qu’ils sont capable de faire et ont envie de faire. L’ensemble du disque est, bien entendu, toujours consacré aux vagues sinistres et lourdes des guitares qui continuent de tracer sur leur passage ce grondement maléfique que l’on a appris à associer à ce duo de musiciens. Ca, bien sur, on peut le critiquer, mais c’est en quelque sorte leur marque de fabrique et si cet élément n’était pas présent on en viendrait à s’étonner peut-être autant que si Slayer se mettait au tango. Sunn O))) joue sur la distorsion et sur des sonorités lourdes. Mais c’est ce qui est ajouté sur ces plages de sons qui fait toute la richesse du disque et fait de Altar une autre pièce de résistance dans la discographie des deux groupes, et pas juste une manière de tirer quelques dollars de la poche des curieux.

  1. etna
  2. n.l.t.
  3. the sinking belle (blue sheep)
  4. akuma no kuma
  5. fried eagle mind
  6. blood swamp

Chroniqueur

Mathieu Lubrun

Hororo est chroniqueur depuis 2004 sur Eklektik, bibliothécaire de profession, passionné de musique (metal, jazz, hip hop, electro …) et de comics. Alcoolique de concert et de disques, bavard et effervescent dès qu’il rentre en contact avec un artiste qu’il apprécie. Contactez-le pour lui dire tout ce que vous voulez à son adresse personnelle xhororox [AT] gmail [DOT] com et/ou suivez-le sur Twitter.

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9 Commentaires

  1. Hallu says:

    Hum corrige les fautes d’ortho avant de publier quand même.

  2. jonben jonben says:

    Bonne remarque. Pour revenir à l’album, il m’a bien surpris, je ne dirais pas que je suis devenu fan du groupe, qui me gonfle habituellement, mais on constate direct qu’une rythmique apporte de la dynamique à leur musique. Le morceau avec les voix féminines est très beau et là encore je ne m’attendais pas à ça venant de sunn o)).

  3. Hallu says:

    qui envahi => « envahit »
    Quant à Black one, il éteignait les lumières et vous plongez => « plongeait »
    le résultat tiens => « tient »
    et il en reste probablement un paquet.
    Sinon album sympathique oui, de même que la version 3 LP pas cher chez The End records. Quant à l’impro, ça n’a rien de surprenant : tous les albums de Sunn sont 80 % d’impro selon le groupe, et Boris doit probablement faire la même chose pour les albums drone.

  4. pearly says:

    euh, il me semble que ce n’est pas spécialement un truc de Sunn O))), avec Boris en invité, comme le laisse supposer la manière dont est présenté le duo nom de groupe/nom d’album, mais une vétirable collaboration Sunn O))) + Boris ; eux deux sont créateurs de Altar.
    Bref, sinon album magistral, surprenant, et ce titre avec Jesse Sykes est absolument sublime. Superbe utilisation de l’univers de ces groupes
    +1 pour les fautes :)
    et j’peux faire mon relou, parfois il n’y a aucune virgule, c’est chaud :)

  5. hipo says:

    Bah pour moi, même après plusieurs écoutes, cet album ne passe absolument pas. La seule chanson que je trouve intéressante est Etna, notamment pour ce qu’apporte la rythmique made in Boris, et encore, je trouve cela moins bien foutu que sur ce qu’on pouvait entendre sur Ganbou-Ki par exemple (sur l’album Amplifier Workship)…
    La piste suivante, N.L.T est un truc ambiant particulièrement chiant.
    Pour Sinking Belle c’est simple, je peux ne pas supporter le chant, quand à la zic, elle se rapproche beaucoup de certaine partie de l’album Flood, le trip en moins.
    Les 2 pistes suivantes sont un peu plus intéressant, mais ni les expérimentations bizarres d’Akuma No Kuma, ni le chant sur Fried Eagle Mind n’arrive à relever le niveau d’un Sunn o))) moribond au niveau des basses.
    Enfin, Blood Swamp est plus dans la veine de ce qu’a peu faire Sunn o))) dans le passé, j’aime bien, mais c’est pas du niveau d’un FOTB.

  6. guim says:

    Très bon disque où il aura fallu attendre la rencontre des deux pôles de la planète drone pour accéder à une symbiose qui allait au delà des carcans que les deux groupes avaient de leur propre chef générés,un titre comme « blue sheep » est certainement le résultat le plus singulier de cette rencontre .Au passage content d’avoir eu des news de Thayil via ce disque.

  7. heddy aka thot says:

    Hallu on s’en bat les couilles des fautes d’orthographes donne seulement ton avis

  8. heddy says:

    moi d’accord avec hororo

  9. no heaven says:

    je suis pas d’accord du drone n’est pas de ‘ limpro , cest une composition noirmal , avec ces ligne de note , et surtout ces tempo , …

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