Tha Blue Herb – Life Story

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Style: rap japonaisAnnee de sortie: 2007Label: Tha Blue Herb Recordings

Protégé de Dj Krush à leur début, Tha Blue Herb est un des groupes de rap japonais que l’on ne voit jamais sur le devant de la scène de ce pays qui reste déjà assez discret dans les médias européens, à quelques exceptions près, quand on parle de sa musique. Le Japon, pour ce qui est de sa scène rap, en est resté aux clichés américains de l’époque de 2Pac et de Notorious B.I.G. moins les guerres de gangs. Les yakuzas font encore partie de l’actualité mais, la pègre et la violence, marque de fabrique du gangsta rap américain, n’est pas véritablement mis en avant dans cette scène qui compte des rappeurs comme Dabo ou Zeebra dans ses plus gros vendeurs. Deux noms qui ne voudront pas dire grand_chose aux lecteurs de ce site. Une seule recherche sur youtube vous rassasiera pourtant facilement en vidéo et vous montrera a quel point il n’y a pas de différences majeurs entre les clips de Jay Z et de Busta Rhymes et ceux des deux rappeurs susnommés. A passer en accélérer sans s’arrêter histoire de ne pas perdre de temps. Le vrai sujet de cette chronique est Tha Blue Herb, un des meilleurs groupes de rap indépendant japonais, et peut-être même un des seuls (mes connaissances à ce sujet n’étant pas exhaustives).

Tha Blue Herb, s’il fallait continuer la comparaison avec les Etats Unis est au rap japonais ce que Aesop Rock et El-P sont au pays de Lil Jon. Des anomalies que l’on a du mal à mettre dans le même genre ou à rattacher à la culture hip-hop. Et pour cause, alors que le rap parle de rue avec violence et regret, Tha Blue Herb évoque des paysages mélancoliques où les instrumentales électroniques caressent l’oreille avec la même légèreté qu’un rayon de soleil. La ville que décrit la musique de Tha Blue Herb est faite de voitures volants doucement et de néon légers, une ville silencieuse que les yeux de Illbostino, rappeur du groupe, regarde défiler devant ses yeux avec mélancholie. Le premier album du groupe, Still, still dreaming, empruntait beaucoup au rap de rue de Nas et de son Illmatic, influence assumée et revendiquée par le groupe. Sell our souls, le deuxième, prolongeait les ambiances dans des instrumentales pratiquement dub et des expérimentations sonores jouant sur les boucles et les rythmiques décalés. Un album plus difficile mais, aussi plus aventureux. Life story continue sur cette route et l’achève en condensant les plages sur des durées plus courtes et des chansons plus variées. Notes de piano, rythmique légère, effets élèctroniques et flow s’allient et volent alternativement entre eux pour former des instrumentales variées qui ne pèsent jamais sur l’oreille.

Et c’est là que nous en venons aux paroles. Comment parler d’une langue que l’on ne comprend pas et dont on ne distingue pas vraiment les mots ? Et bien, avec l’expérience d’une écoute attentive d’autres groupes de rap japonais. Même en ne comprenant rien à ce que racontaient les rappeurs de Nitro Microphone Underground (dont le premier album éponyme est très recommandable), les mots en anglais et les phrases courtes ne laissaient pas de doute sur la facilité de la langue et des paroles. Efficaces et accrocheuses, les chansons étaient très sympa mais, ne demandaient surement pas beaucoup de réflection. Or, ce qui m’a marqué en découvrant progressivement Tha Blue Herb, au fil des albums, c’est à quel point le phrasé de Illbistino se sont orientés vers des rimes complexes, des phrases longues au flow alambiqué et surtout une sensiblité à fleur de peau. Et c’est cette voix morne et douce qui surmonte les compositions (dénués de samples) du producteur O.N.O. et amplifie l’émotion douce mais irrépressible qui domine cet album. En épousant aucun des clichés qui font du Japon cette curiosité culturel remplis de mangas, de néons et de perversions incompréhensibles, Tha Blue Herb réalise un film sonore dépeignant une métropole qu’eux seuls connaissent aussi bien et dans laquelle ils vous invitent, la ville de Sapporo, bien loin de Tokyo et de son excitation, une ville que j’aimerais visiter et que j’aime écouter.

  1. the alert
  2. run 2 you
  3. d.i.s. (do it simply)
  4. supa stupid
  5. hiphop bangaichi
  6. on the corner
  7. i found that i lost
  8. such a good feeling
  9. we must learn
  10. tenderly
  11. a special night
  12. maintain
  13. mainline
  14. motivation

Chroniqueur

Mathieu Lubrun

Hororo est chroniqueur depuis 2004 sur Eklektik, bibliothécaire de profession, passionné de musique (metal, jazz, hip hop, electro …) et de comics. Alcoolique de concert et de disques, bavard et effervescent dès qu’il rentre en contact avec un artiste qu’il apprécie. Contactez-le pour lui dire tout ce que vous voulez à son adresse personnelle xhororox [AT] gmail [DOT] com et/ou suivez-le sur Twitter.

hororo a écrit 395 articles sur Eklektik.

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5 Commentaires

  1. Thomas says:

    J’aime beaucoup les extraits que j’ai trouvé mais alors pour se procurer les albums ça n’a pas l’air évident… (en dehors des sites japonais incompréhensibles)

  2. Hororo says:

    En tant que gros fan du groupe j’avoue ne posséder aucun album. Je suis donc obligé de recommander l’option peer 2 peer pour obtenir cet excellent disque. C’est tragique mais en dehors de ça je ne vois pas de solution a part commander un disque pour 30 Euros.

  3. fewz says:

    ça va me plaire ça!

  4. Thomas says:

    C’est vraiment bizarre qu’on ne puisse se procurer les albums (à un prix décent), c’est bien la première fois que je vois ça ! Le mp3 ça me saoule et en plus apparemment les livrets de leurs disquent proposent les traductions de leurs textes en anglais, dommage de s’en priver…

  5. Faya says:

    Enorme disque, rarement du hip hop n’a été aussi evocateur. Le paysage decrit est clair, et prend aux tripes. C’est unique, cohérent, splendide.

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