Bilan 2008 matt_moussiloose

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2008, une année fertile en (très) bons albums certes. Il n’y a qu’à voir ci-dessous, croyez moi sur parole. Mais 2008, une année de petits creux. Le début en fut diesel, les derniers mois relativement peu excitants. Ce qui nous donne un top 10 assez ramassé dans les mois verts ou censés l’être. Derrière ce n’est pas le Larzac, mais ce n’est pas non plus Byzance, avouons le. Certains groupes attendus ont manqué aux attentes, plus ou moins salement. D’autres peu ou pas attendus ont pris leur place au rayon des attendus de demain. En résumé se détache un peloton d’albums de facture émérite (des c’est du bon, selon le barème eklekticien), qui ont animé et animeront plus d’une heure à tuer.

Le black metal y tient une large place, qu’il se consomme classique et classieux (Melencolia Estatica), sec et slave (Lutomysl), putride et prophétique (Nåstrond), voire raw et war (Morbosidad). Au chapitre black mais pas trop, les Suédois de Lifelover ont fait jouir novembre avec un Konkurs en forme de cage à tubes, au décalage assumé. Sans faire de bruit, Agalloch nous ont pour leur part offert un entremets acoustique au bon goût de plat de résistance, et l’on ne salive que plus torrentiellement à l’attente de leur prochaine aventure “métallique”. Sans transition aucune, soulignons l’irruption pour le moins giclante de Gored dans l’élite du brutal death/grind à tendance anatomique. Avec pour seules armes une basse et une batterie, le duo allemand signe en Human un premier opus sérieusement sombre, aux relents de formol vicié.

Pas de rétrospective doom pour la bonne et simple raison que j’ai fait l’impasse sur les sorties du style en 2008. Brève parenthèse pour Moss, qui fait du Moss et reste balèze dans le créneau, et pour Skepticism dont le dernier cru, encore trop peu écouté pour lui porter un jugement dégrisé, s’annonce délicieusement funèbre et 90’s. On passe tout aussi rapidement sur le post-HxC et ses multiples dérivés pour ne retenir que le dernier opus de Mouth of the Architect, les Américains perpétuant sans fléchir – mais sans non plus éblouir, ne nous mentons pas – les ambiances lumineuses de The Ties that Bind.

Pour les musiques hors gros son, on a eu du Thee Silver Mt. Zion en 2008. Je le précise parce que l’album n’a pas enflammé les discussions familiales du dimanche après la messe. Moi-même j’ai mis un paquet de temps à me rendre compte qu’il dormait sur mes rayons. Pourtant il est fort bon, mais peut-être faut-il avoir vécu ses morceaux en live pour pouvoir recréer la chair de poule qui va bien avec. Le nouveau disque de Earth n’aura surpris personne, sauf ceux qui ne s’attendaient pas à voir des abeilles sur la pochette. Et c’est donc sans surprise qu’on aime à s’y glisser comme dans une douillette charentaise chauffée sur le radiateur. Pour leur troisième album en deux ans (ou est-ce quatre ?), Grails prennent le train du souffle cinématique, avec un résultat très heureux la plupart du temps, hélas un peu emprunté sur certains titres plus ambient. Enfin, Colour Haze ont préparé de la plus belle des façons leur prochain set de trois heures au Roadburn avec un All vecteur de trips indélébiles à l’ombre des cocotiers.

Peu de réelles déceptions mais quelques trucs oscillant entre le bof et le ok, en clair moyennement digne du pedigree de leurs auteurs. Le dernier Kayo Dot finira aussi anonyme que ses prédécesseurs sauf qu’il est moins inspiré en dépit d’un dernier morceau féerique. Après un premier album passionnant entre stoner et rock galactique à l’ancienne, My Sleeping Karma ont choisi de jouer le mimétisme avec le nom du groupe et j’en comate rien que d’y penser. Enfin, The Mars Volta… non rien.

Au final on peut refermer le couvercle sur 2008 avec le sourire, tout en espérant que 2009 soit quand même un peu plus prodigue en émotions fortes…

Albums de l’année

UfommamutIdolum
Attendus dans la crasse et la torpeur qui leur réussissaient à en jouir, les Italiens survolent leur promotion en ennoblissant leurs manières, sans abandonner un seul instant la basse de mammouth qui fait leur nom. Résultat : un disque à la fois classieux et écrasant, à la dimension mystique irrésistible. Une sirène des abysses. Leur concert au prochain Roadburn s’annonce déjà comme un des événements forts de 2009.


October FallsThe Womb of Primordial Nature
Sans chambouler ses fondamentaux, l’ami Mikko affine tranquillement sa recette et, bien aidé par l’apport de musiciens chevronnés à des instruments stratégiques, nous sort l’un des plus beaux albums de black metal nordique de récente mémoire. Impressionnant de plénitude, séduisant par ses ambiances boréales et ses leitmotivs acoustiques, The Womb of Primordial Nature fait neiger les enceintes, et pose October Falls en héritier instinctif d’Ulver époque Bergtatt.


Steve Von TillA Grave Is a Grim Horse
Le briscard à barbiche fait une troisième infidélité à Neurosis, et nous offre un troisième recueil essentiel, où ses accents de gentil bourru hantent de superbes paysages acoustiques. Entre la sérénité de l’ermite auscultant le cœur des choses qui l’entourent, et l’angoisse prémonitoire de celui qui se sait dans l’éphémère, Steve von Till signe un pur album de chansonnier-parolier. Un pèlerinage poignant qui agit sur l’âme comme un feu de cheminée contre la folie du monde.


LeviathanMassive Conspiracy Against All Life
Wrest publie beaucoup de choses c’est un fait. Mais le fait est aussi que Wrest ne stagne à aucune étape de son cheminement créatif. Et le plus ahurissant c’est que même les rééditions de ses vieux titres paraissent apporter une progression, ou tout au moins du sang neuf, à son univers (cf. le terrifiant double album Verräter). S’agissant du cru 2008, blasphèmes, vice et décadence tiennent bien évidemment le haut du pavé dans un maelstrom aveugle de metal infectieux qui lamine tout résidu de candeur avec une constance admirable.


Bohren Und Der Club of GoreDolores
Le nouvel album des arpenteurs de la nuit est un beau sortilège. Pourtant ce n’était pas gagné d’avance, le groupe étant déjà allé très loin dans la déstructuration de son ambient des bas-fonds sur l’aride Geisterfaust. Mais en rejouant de plus belle la carte des lucioles jazzy, Bohren abritent leur musique sous la coupole cotonneuse du spleen, et livrent ainsi l’une de leurs œuvres les plus touchantes.


AsvaWhat You Dont Know Is Frontier
Du drone à la fois beau et intelligent, c’est possible ? Asva prouvent que oui avec ce disque, véritable cathédrale de la matière son, sachant passer les tripes à la centrifugeuse comme tout bon album de Sunn O))), mais ne négligeant jamais la nécessité de nicher dans cette masse noire quelques magnifiques vapeurs d’orgue et autres lumières rassurantes. Constamment prisonniers du vertige, Asva dépeignent une réalité sombre et inexorable, tendue d’échappatoires idylliques qui sont peut-être autant de pièges et d’illusions. Une réalité qui n’est pas sans évoquer le Blade Runner de Ridley Scott. On a vu pire comme référence…


ProclamationMessiah of Darkness and Impurity
La caution poétique de ce top 10… L’Espagne n’est pas franchement une terre de metal, mais quand il s’y met, l’Ibère tabasse. Adhérant jusque dans ses moindres clichés à la mouvance war metal primitive des Blasphemy, Conqueror et autres Archgoat, Messiah of Darkness and Impurity célèbre le porcin en grande pompe à renfort de bastonnade rythmique ininterrompue, de riffs marécageux et autres shreds des cavernes non remboursés par la sécurité sociale. Et qu’est-ce donc qui en fait l’un des meilleurs albums de l’année, me demanderez-vous. Ce à quoi la seule réponse tolérable est : listen or die !!!


Stille OpprøRS.O2
Intéressante évolution pour le projet de Christer André Cedeberg (ex-InThe Woods…, ex-Drawn). Après le tout-acoustique intimiste de Prosjekt 2 13, Stille Opprør rejoignent un rock cérébral et débordant de feeling, accrochant dans leur traîne des influences aussi prestigieuses et variées que Bob Dylan, Anathema ou encore le post-rock electro-ouaté de Bark Psychosis. Un album gavé de belles trouvailles d’écriture, dont les morceaux laissent tous à leur manière une empreinte durable.


NachtmystiumAssassins : Black Meddle Pt. 1
Nachtmystium ont fait abondamment parler cette année, notamment dans le sillage de leur prestation détonante au Noise Festival d’avril dernier, qui pour beaucoup a fait office de révélateur. Que fallait-il dès lors penser d’un album de black metal se réclamant ouvertement de l’influence Pink Floyd, et jetant allègrement dans un chaudron bouillant cavalcades blastées, refrains fédérateurs à la Motörhead et surprenantes digressions psychédéliques ? Eh bien que c’est de la balle, tout simplement.


DarkspaceIii
Trois albums de la même chose, et pourtant on en reprendrait sans hésiter un quatrième. Et un cinquième, etc. Avec leur recette limpide et pourtant unique sur la scène metal, les Suisses slaloment dans les cellules grises comme le Millennium Falcon dans un champ d’astéroïdes. Le champ lexical de l’astrophysique ayant été maintes fois asséché au sujet de Darkspace, ne reste qu’à pousser votre système stéréo dans ses derniers retranchements et à vous laisser téléporter par cette musique au magnétisme surnaturel.


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