Heirs – Alchera

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Style: postAnnee de sortie: 2009Label: Denovali Records

Le temps est nécessaire à l’homme pour assouvir sa personnalité” (Andrei Tarkovski)

Tous les groupes, toutes les musiques, fonctionnent selon un impératif bien précis par rapport au temps, cette unité insaisissable qui emmène les chansons vers le silence, défait leurs moments forts aussi sûrement que la mémoire les immortalise. Dans la plupart des styles contemporains, le rapport au temps est domestiqué par des segmentations solidement éprouvées, digérées et même attendues par les auditeurs. Dans d’autres styles plus rares, on sait tous desquels on parle, le temps n’est pas une donnée encombrante à mettre en conserves. Il n’est que ce chemin infini au-dessus du vide sur lequel les pas se dessinent et se gomment, sans laisser de jalon. Le temps comme compagnon de route de la musique, fût-elle scénarisée, jusqu’à son épuisement naturel.

Heirs veulent plaire en priorité à ceux qui se reconnaissent dans cette deuxième catégorie, privilégiant la substance à la forme, sans exclure totalement la seconde. Comme l’écorce, leur musique s’appréhende en formations, en concrétions, en strates, en écoulements. Elle accepte l’auditeur dans ses antres, mais elle ne danse pas autour de lui. Elle est faite des pulsations inamovibles de la roche et d’harmonies en miettes que l’on traverse comme des rideaux plus ou moins épais vers l’étape suivante de l’exploration. Certaines douces et aqueuses, certaines hérissées des aspérités du riff.

Non loin d’un Omega Massif qui aurait mangé Rimbaud dans un festin d’absinthe et d’indus, les Australiens se font architectes d’un post-hardcore cousu de raffinements, visité par les mystères du macrocosme, sans urgence, dur de carapace mais sans violence, en quête d’une forme d’absolu qui ne tolère que l’excellence. Or, il s’en faut encore qu’ils soient de hauteur à laisser une marque indélébile dans les archives. Non dénués de bonnes combines, notamment dans des entames en arpège particulièrement alléchantes, les morceaux s’effilochent tous fâcheusement dans les travers désormais habituels des innombrables groupes moyens du genre : tricotage, délayage artificiel des parties, prise de risque à peu près inexistante. Ca n’en reste pas moins bien ouvragé et plaisant à l’oreille, mais ça sent trop l’exercice de style pour installer une saveur pourtant évidente dans les intentions de départ et l’habillage esthétique du CD. Dommage !

Heirs tentent de jouer et de se jouer de la monotonie pour ennoblir une posture statuaire, indivisible, lourde de sous-entendus et de recherche d’importance. Hélas, leur maîtrise de cet appareil puissant mais ô combien casse-gueule est bien trop imparfaite et scolaire pour leur permettre ne serait-ce que d’embrasser le piédestal de Godflesh ou encore des Swans, implacables monarques de la discipline.

  1. plague asphyx
  2. mockery
  3. cabal
  4. mandrill
  5. the white swell
  6. russia
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