Charon – Sulphur Seraph (The Archon Principle)

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Style: Metal SombreAnnee de sortie: 2012Label: Sepulchral Voice Records

Il y a des disques dont on visite les sillons par courtoisie, ou curiosité. Pour ce Charon je dois avouer que j’ai été titillé par le fait de lire que c’est un des tenanciers de la baraque Katharsis qui en avait écrit les paroles. Le genre d’anecdote qui ne tombe pas à plat quand on s’intéresse à ce que font les amis germains, eux qui nous ont laissés un peu orphelins depuis WorldWithoutEnd voilà 6 ans maintenant. Katharsis est un client que l’on prend assez au sérieux, il n’est pas du genre bavard mais quand il entame les discussions ce n’est généralement pas pour débuter des pour-parlers. Qu’en était il alors de ce Sulphur Seraph, album sorti de nulle part et qui passe sous le radar comme un avion furtif en pleine blitzkrieg ? Et que venait foutre Scorn dans cette histoire ?

D’abord en se penchant sur le cas Charon, on se dit que la biquette ne sent pas la rose. J’apprenais que les deux zigs qui emmenaient le projet étaient eux aussi teutons. La proximité ça aide, surtout que c’est en Saxe et plus particulièrement à Zwickau que les deux groupes, Charon et Katharsis, promulguent leurs soins aux malades locaux. Charon n’est pas non plus arrivé là par hasard, il a traversé les couloirs du temps et a lâché quelques galettes sur son passage, puisque déjà le siècle dernier il jouait les effaroucheurs de volatiles de bénitier. En 98 ils sortaient leur première démo, autre temps autre visage sûrement, j’avoue ne pas m’y être plongé. En ce début d’année 2012 ils nous revenaient sur le label Sepulchral Voice, la cantine d’Excoriate et Grave Miasma, avec la mine des grands jours, celle que l’on place sur le champs de bataille et dont on sait qu’elle fera le boulot comme il faut si on est amateur de spectacles pyrotechniques létifères.

 

Sulphur Seraph (The Archon Principle) est un bon gros morceau de barbaque aux veines bleues et aux nervures nécrosées, genre plutôt gâtée et déjà un minimum bouffée par les vers. Il faut dire que chez Charon un des tauliers est le chanteur d’Hatespawn donc forcément ça va bouger un minimum sur la planche de travail, les os vont casser. Aux confluents des genres, le disque développe une dialectique assez étonnante, sorte de rapiéçage odorant d’un squelette métallique à l’allure bâtarde mais dont les armatures sont trempées d’acier pour lui donner une tenue plutôt traditionnelle. Niveau carrure, c’est dressé comme un patron et ça embrasse les styles avec une bonhomie assez enthousiasmée. Death, Black et Thrash se côtoient dans le miroir et habitent l’espace d’un instant l’image que les titres renvoient. Les blasts lèvent les armées de cliquetis mécaniques tandis que les breaks impactent sur l’ambiance froide comme le béton armé qui parcourt le disque comme un barbelé de titane. On aimerait des tripes, de la rage, mais tout ça est contenu dans une forme de récitation distante comme pour développer le côté atmosphérique de la charge.

Hybride, le disque l’est quand il met en scène ses formules de prédateur avec cette syntaxe décomplexée. Ça fusille dans les lignes droites et ça cherche l’autoroute pour développer son humeur morbide. Ça a aussi ce ton frelaté, avec ses sifflements en pagaille nous rappelant aux grandes heures des maniaques pervers de Blasphemy ou Beherit  et de leur élocution maligne, sans jamais atteindre leurs sommets cependant, le nid de serpents est intouchable. Non, ici les teutons sont plus dans la démonstration. Ils gardent de la démesure du Death cette passion pour la force brute et du Thrash l’allumage de mèche à chaque virage. Un alliage qui aurait pu totalement passer à côté de la cible, mais ici ça marche plutôt bien. Les intentions sont bonnes, les riffs renforcent le côté taciturne du disque, le début d’un « Key to Nowhere – The Absolute » montre totalement le potentiel du groupe à ce niveau. Un vrai monstre à sang froid.

Charon a une conception propre de la musique qu’il produit, si l’on demandait au groupe quelle école il habite ou pour quelle scène il œuvre, les compères seraient surement amusés. Il semblerait que ce ne soit pas le débat qui les intéresse, ni même l’intention d’un disque comme Sulphur Seraph. Le groupe s’est focalisé sur la production d’un album qui a des propriétés vivifiantes tant il reste emprunt de ce qui fait le véritable charme de genres bien plus sclérosés. C’est une démarche que l’on peut apprécier, surtout qu’on sent un vrai respect pour ces influences. Sulphur Seraph est un disque de métal moderne, assez sombre et plutôt bien construit avec un côté théâtral qui ne dénature pas le message que d’autres barons du mouvement ont produit sous d’autres chapelles. Sorte d’Antaeus version Death, on peut dire qu’avec ce disque Charon révèle une personnalité intéressante. On attend désormais plus de sauvagerie de ce groupe pour le voir embrasser, qui sait, une destinée qu’on ne lui aurait peut être pas prêté il y a de ça quelques années.

 

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