Slipknot – .5: the Gray Chapter

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Style: Neo MetalAnnee de sortie: 2014Label: RoadrunnerProducteur: Greg Fidelman

Elles sont étonnantes les réactions que suscite ce nouvel album des masqués de Des Moines… Ou plutôt elles montrent bien que le metalleux moyen reste décidément aveuglé par sa haine historique de Slipknot. Trop néo métal et jumpisant sur ces deux premiers albums, le groupe est devenu depuis deux albums trop mou et mélodique. Bref, jamais au rendez-vous des attentes.

Voilà donc maintenant que si l’on en croit les réactions à la diffusion de plusieurs titres avant sa sortie aujourd’hui même, ce nouvel album ne serait encore pas à la hauteur de tous ces rageux bas du front, dont on se demande encore ce qu’ils peuvent attendre du groupe en 2014.

Parce que merde ce 5ème album est vraiment probablement le meilleur album sorti par le groupe depuis Iowa. Et c’est franchement une belle performance car on était pour le coup en droit de ne rien attendre de grandiose après les (et c’est vrai, les rageux avaient alors raison) mous du genou et très moyens Volume 3 (lequel contenait encore quelques excellents titres) et surtout All Hope is Gone, qui ressemblait beaucoup trop à un (mauvais) album de Stone Sour, l’autre groupe de Corey Taylor.

Pourtant avec les péripéties et engueulades régulières des membres historiques du groupe on est jamais vraiment sûr que le dernier album sorti par le groupe ne sera pas le dernier album de Slipknot tout court. Les interrogations étaient d’autant plus légitimes que le groupe a certainement connu ses plus importants remous ces dernières années avec d’abord la mort de son bassiste Paul Gray en 2010 (à qui ce 5ème opus est d’ailleurs dédié) puis le débarquement brutal (et pas franchement expliqué) du batteur Joey Jordison qui semblait pourtant le plus motivé pour donner une suite à All Hope is Gone, sorti il y a déjà 6 ans…

Il est donc d’autant plus miraculeux de constater l’excellent niveau de ce nouvel album, parfaite incarnation du Slipknot au meilleur de lui-même montrant sur 14 titres (et même 16 avec les deux bonus) qu’il est au top quand il s’agit d’officier dans son style de prédilection : à savoir une grosse production metal à la fois violente et efficace. Même les éléments les plus mélodiques passent beaucoup mieux que précédemment, apparaissant beaucoup plus sincèrement mélancoliques que niais (comme ce « Killpop » qui évoquerait un croisement entre KoRn et Nine Inch Nails). Certes les compositions du groupe varient toujours entre assauts typiquement knotiens (comme ces bien brutaux et parfaitement anthémiques « Skeptic » et « Custer » qui vont faire un malheur en live) et compositions plus mélodiques (comme « Nomadic »), influences évidentes du Stone Sour dont fait aussi partie Jim Root, compositeur principal de ce nouvel opus. Mais d’abord les américains ont arrêté de vouloir nous faire bouffer de la ballade moisie jusqu’à l’écœurement (comme c’était le cas sur All Hope is Gone) puisqu’il n’y vraiment que « Goodbye » qui puisse entrer dans cette catégorie, et que le titre en question est beaucoup plus malin qu’il n’y paraît de prime abord : juste beau et atmosphérique il se transforme à mi-chemin en gros poutrage faisant un lien parfait avec « Nomadic ». Et puis tout simplement le songwriting sur ce nouvel album est franchement revenu à un haut niveau, peut-être même le meilleur que le groupe n’a jamais montré sur la durée (l’éponyme et Iowa étaient un peu difficiles à s’enfiler d’une seule traite). Prenez ce superbe « Lech » et ses bruitages hip-hop indus, peut-être le meilleur titre de l’album, ou le bien brutal -coucou la double- « Sarkostrophe » (l’occasion d’une petite pensée accompagnée d’un majeur bien dressé adressés à Paul Bismuth tiens)… peut-être le meilleur titre de l’album avec ses scratches comme au bon vieux temps. Et puis les déjà connus de plus longue date et très efficaces « The Devil in I » et « The Negative One » qui s’illustrent à merveille dans le panorama.

Il n’y a guère que « The One that Kills the Least » (dont on croirait les premières notes sorties d’un album de Sup, si si…) qui soit moins à la hauteur en terme de songwriting avec ces riffs un peu trop pompés sur Machine Head et un refrain un peu trop simple. Mais même les bonus « Override » et « The Burden » sont d’un très haut niveau (surtout le deuxième à l’ambiance bien prenante) prouvant que le groupe avait des choses à dire et n’a pas fait de remplissage cette fois.

La grande réussite de l’album est certainement aussi de proposer une tracklist astucieuse qui garantit que la lassitude ne s’installe pas, le groupe ayant l’intelligence d’en garder sous le pied jusqu’au bout sans balancer tous les titres forts au début, et joue sur les interludes et coupures qui aérent très bien le propos (« Goodbye » d’abord, mais aussi « Be Prepared for Hell » un peu plus loin et même le final « If Rain is What You Want »).

Et merde Corey Taylor dont on a pu parfois trouvé le chant mélodique un peu irritant par le passé (All Hope is Gone again), montre ici qu’il est un très bon chanteur, utilisant majoritairement son registre agressif sans hésiter à aller sur son registre clair qui ne part jamais dans le niaiseux/mielleux mais reste uniquement au service de l’efficacité et de la mélodie et n’est pas sans rappeler par moments celui de Trent Reznor (comme sur « XIX »).

On notera également que les arrangements sont vraiment malins et bien amenés (que ce soit les cloches sur « Goodbye », les scratches sur « Sarcastrophe » ou « Custer », les sonorités indus façon « barres de fer /bidons » marque de fabrique des premiers albums et qu’on entend à différents endroits du disque, les quelques bruitages technoïdes ou les espèces de bruits de sirène sur « Custer » et « The Negative One ») et contribuent à renforcer l’ambiance très réussie : sans être hyper malsaine (beaucoup de groupes font ça beaucoup mieux que Slipknot aujourd’hui) elle est quand même bien brutale et suinte la tension, la violence et l’agression. Sans être le groupe le plus violent du monde, Slipknot garde dans le mainstream cette aura et cette image de violence et de film d’horreur super produit.

Le nouveau batteur réussit parfaitement son bizutage même si son jeu est certainement un peu plus simple que celui de Jordison, mais les compositions de ce 5ème album lui donnent tout de même l’occasion de se livrer à quelques belles démonstrations de force (comme ces blasts sur « Sarcastrophe » ou « The Negative One »). Même les quelques solos de guitare sont réussis (cf « Nomadic ») c’est dire que le groupe réussit vraiment ici le carton plein.

Enfin la production est parfaite : puissante évidemment mais pas trop propre, elle fait oublier sans mal la production pourrie sur Volume 3 de l’imposteur Rick Rubin.

Impossible pour moi de comprendre les réactions haineuses à l’encontre de cet album (à part concernant la pochette qui est bien moche) qui constitue certainement ma meilleure surprise de l’année, et alors que je n’aurais pourtant pas parié grand chose sur ce retour, ce .5: the Gray Chapter risque au final de s’arroger une place bien méritée dans mon top de l’année! Au rayon superproduction metal je défie mes amis rageux de me trouver un meilleur album cette année…

Tracklist :
1. « XIX »   3:10
2. « Sarcastrophe »   5:06
3. « AOV »   5:32
4. « The Devil in I »   5:42
5. « Killpop »   3:45
6. « Skeptic »   4:46
7. « Lech »   4:50
8. « Goodbye »   4:35
9. « Nomadic »   4:18
10. « The One That Kills the Least »  4:11
11. « Custer »   4:14
12. « Be Prepared for Hell »   1:57
13. « The Negative One »   5:25
14. « If Rain Is What You Want »   6:20
15. « Override » (bonus track)   5:37
16. « The Burden » (bonus track)    5:23

krakoukass

Chroniqueur

krakoukass

Co-fondateur du webzine en 2004 avec Jonben.

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4 Commentaires

  1. Mths says:

    Merci de bien faire comprendre que quiconque n’aime pas cet album est un « rageux bas du front », ça fait toujours plaisir. Et si ce n’est pas le message que tu voulais faire passer, je t’invite cordialement à retravailler le début de ta chronique…

    Je trouve que, dans les titres qui ont été balancés sur le Web, il y a quelques bonnes idées, et une grosse tonne de merde autour. C’est mon avis. Si ça te fait automatiquement me classer dans la catégorie « metalleux obtus », prends le temps de te demander qui est le plus obtus des deux, au final :)

    • krakoukass krakoukass says:

      Merci pour ton commentaire. ;)
      Loin de moi l’idée de proclamer que quiconque n’aime pas cet album est un abruti obtus (les personnes visées sont plutôt les couillons qui n’ont jamais aimé Slipknot -pour des raisons souvent basées sur des préjugés ou une haine du so called Nu Metal- et ont toujours craché sur le groupe, et continuent à le faire pour le simple plaisir de dire « Slipknot = Caca » comme s’ils allaient se mettre à aimer Slipknot aujourd’hui), simplement quand je vois les réactions que suscite cet album je ne comprends vraiment pas ce que les gens attendent encore de Slipknot en 2014… J’ai l’impression pour ma part que les masqués ont sorti un disque honnête, brutal, sombre, et surtout accrocheur du début à la fin. Je me demande si, avec le temps qui passe, les gens n’idéalisent pas les deux premiers albums. Je les ai réécoutés il y a peu, on n’était déjà pas dans la révolution, et le chant clair existe dès le deuxième album. Il y a certes une folie de la jeunesse sur le premier album qui n’est plus tellement d’actualité, mais comme tout le monde, les gaziers ont vieilli…
      Et sinon c’est quoi la « tonne de merde » autour? Je serais curieux que tu me donnes un exemple de ce que tu trouves pourri à ce point ?

  2. Drugzath says:

    Enfin une tres bonne chronique sur cet album ,pas comme chez nos compères de VS Webzine ;–) .Je te rejoints en tout point sur ce que tu a mentionné .Pour ma part un bon album qui se lasse pas au fil des écoutes .

  3. Captain Igloo says:

    Je ne comprends pas vraiment ce que l’on peut reprocher à cet album, pour peu que l’on apprécie ou qu’on ait apprécié au moins un des albums précédents du groupe ! Ceux qui ont toujours dénigré, détesté le groupe ou simplement le style (moi j’appelle ça simplement du Metal) n’apprécieront toujours pas !
    Après plusieurs écoutes, je trouve cet album réussi, beaucoup plus homogènes et contenant des morceaux plus accrocheurs que le 4ème album, All Hope Is Gone.
    Mention excellent pour Skeptic et Nomadic. Mention passable pour Lech.
    Custer et The Negative One, qui se révèleront sûrement être des titres parfaits pour le live, n’apportent, pour ma part, pas grands choses.
    Les deux titres bonus sont bons mais auraient pu être raccourcis.
    Assimiler The Gray Chapter à une montagne de bouse avec même pas une ligne pour justifier une telle campagne de dénigrement (cf. Vs Webzine) … mouais, laissons les vrais passionnés nous délecter de leurs chroniques, coup de cœurs, coup de gueule et laissons certains webzine metal être de simples sites de news dédiés au Metal.

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