Mouse On The Keys – An Anxious Object

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Style: nu-jazz / mathcore expérimentalAnnee de sortie: 2010Label: Denovali RecordsProducteur: Takaaki Mino

« Quand Dieu se tait, on peut lui faire dire ce que l’on veut. » – J.-P. Sartre

Et donc juste avant de finir ce bol aux gouttes fondantes, on se dit que merde, que ça ne devrait jamais s’arrêter, que merde, que vraiment, on en voudrait bien un peu plus.

C’était une dynamique structurelle génialement paradoxale que celle de feu ma grand mère R’kou.
Le premier scénario voit son petit-fils terminer le plat. On n’en peut plus. Mère R’kou n’est pas contente parce qu’elle pense qu’elle n’en a pas fait assez, ou qu’on n’aime pas.
Le second scénario focalise sur l’incapacité de finir ledit plat. Ventre pété, bouton du pantalon tenant à un dernier fil, mère R’Kou n’est pas contente, parce qu’elle pense que ce n’est pas bon, ou qu’elle en a trop fait.

Il aura fallu 10 ans pour trouver enfin un scénario de happy end.

Avant tout, deux pianos. Une batterie. On attend des balais en lieu et place de baguettes, deux queues et un truc approximativement jazzy sur fond de duels volubiles.
Ben on peut attendre…

Mouse On The Keys se lèvent avec le soleil pour servir un des mélanges les plus réussis en matière de recherche sonore et instrumentale du moment.

Leur attribuer un morne préfixe « post » au genre serait une insulte, nous avons affaire à trois virtuoses délivrant une energie entre rock, jazz et classique, fortement ancrée dans un héritage oriental qu’ils savent exploiter sans trop en faire. « Forgotten Children » est un parfait exemple de la créativité étonnante du trio, réussissant à contourner les limitations musicales des gammes japonaises sur des instruments occidentaux pour les nourrir de dissonances et de schémas contrapuntiques tout bonnement géniaux.

D’autres morceaux tels « Spectres de Mouse » font preuve d’une instrumentation diaboliquement précise rythmée par un alien de batteur qui ne manquera pas de nous faire penser aux meilleurs moments de Mats & Morgan ou Hiromi’s Sonicbloom. Quelques secondes dans le morceau, ça sera au tour de l’ombre de Debussy de planer sur le trio, non sans emprunter des modulations jazz/bebop allant d’un survolté Keith Jarrett aux touches classico-andalouses de Chick Corea. Nous serions même amenés à penser « film noir » et « jap pop » dans un même mouvement de morceau tellement les lignes de trompette de « Seiren » en sont teintées, ainsi que celles (au sax cette fois) de « Soil », agissant sans doute aucun comme réponse audit Siren. Ce dernier sera d’ailleurs l’occasion de questionner le choix du groupe de mettre autant en avant la batterie, aussi géniale soit-elle. A peine remis des questions à la con qu’on sera tentés lors d' »Unflexible Grids » de compter sur nos doigts… 5 pour le piano, 4 pour la batterie, et ça change, et ça change, et ça change, et les polymètres variant merveilleusement tout le long du morceau nous font sourire, oh titre si bien trouvé.

Du free-jazz au contemporain atonal, du rock au romantique, du baroque au noise, Mouse On The Keys est un groupe à la justesse rare. Subtils et méchamment addictifs, leurs gimmicks et leur son accompagnent sans la bousculer une composition particulièrement complexe et pourtant si facilement discernable. Un certain groupe français « similaire » pourrait fortement en prendre de la graine, aussi perdue soit leur cause.

Imaginez Cheval de Frise en formation piano/batterie/claviers. L’orgasme le plus brutal de ce premier semestre 2010.

10 ans pour trouver un scénario, qui servira aussi aujourd’hui.
Joie.
On prend un premier plat peu rempli. Et on se ressert un peu.
Mère R’kou est joie.

On écoute le premier album. Et on en reprend.
Joie.

Ces gars font parler Dieu; et ils lui font dire beaucoup moins de conneries que ses précédentes interventions.
Donc on en reprend.

Joie.

http://www.myspace.com/mouseonthekeys

  1. completed nihilism
  2. spectres de mouse
  3. seiren
  4. dirty realism
  5. forgotten children
  6. unflex
  7. double bind
  8. soil
  9. ouroboros

Chroniqueur

OY C

"Sticking feathers up your butt does not make you a chicken." -- C.P.

OYC a écrit 43 articles sur Eklektik.

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6 Commentaires

  1. Crushed Bones says:

    Putain cheval de frise en référence, je fonce écouter ça!

  2. Kenzobz says:

    Pas mal de points communs avec MOPA quand même… lol
    Nan plus sérieusement bonne découverte merci OYC je viens de chopper l’album et je suis sous le charme !

  3. jonben says:

    Très bon ce groupe. J’avais découvert car ils font partie du même collectif japonais que Toe, qui eux officient dans un post-rock/math-rock excellent également.

  4. Faya says:

    Belle découverte

  5. drommk says:

    Je connaissais uniquement le premier EP qui ne m’avait pas du tout tapé dans l’oreille… Je vais retenter le coup sur celui là…

  6. Trin says:

    J’ai fait la découverte de ce groupe via le label Japonais « Machupichu Industrias » : http://www.machupicchu-industrias.com/
    Allez faire un tour, les deux autres formations sont excellentes : « Toe » (comme l’a dit Jonben) et « Enemies » … kif assuré :)

    Autre groupe post-rock jap’ : « Rega »

    Bonne écoute et bien joué pour la chronique très juste !

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