Jools – 97%/FKA (Hassle Records) post-punk/hardcore
Après un EP et d’excellents singles commençant à dater un peu (de 2020 plus précisément), les britons de Jools débarquent enfin avec une suite… de seulement deux titres ! D’accord c’est peu, mais on ne va pas bouder notre plaisir à retrouver là intacte leur forte personnalité. Le groupe a entretemps connu de multiples changements de line-up dont un, plus notable, avec l’arrivée de Kate Price comme seconde vocaliste. Ce qui opère un léger changement dans leur son sans pourtant modifier leur forte personnalité. Deux titres: deux nouveaux tubes, percutants, acides avec des chorus ultra entêtants (ainsi que des paroles imparables et dans l’air du temps aux thèmes LGBTQ+ traitant de l’acceptation de soi et des autres). Juste dommage que Jools soit toujours radin au niveau de la quantité car ça tue toujours autant. Un véritable album la prochaine fois ?
Les Chants du Hasard – Live Quart (Autoproduction) symphonic operatic black metal
Les Chants du Hasard, c’est un projet solo d’un certain “Hasard” qui se met totalement en marge des productions dites “symphoniques” où l’on a souvent de trop fortes doses de glucose. Ici, à l’image de l’impressionnante cover, on est plongé dans une bande-son du type “Fantôme de l’opéra” où la musique néoclassique rencontre soudain un monstre comme venu hanter l’espace. Un cauchemar sonore très exigeant mais qui vaut vraiment pour son originalité !
Beaten To Death – Sunrise Over Rigor Mortis (Mas-Kina Recordings) grindcore progressif
C’est toujours un plaisir de retrouver Beaten To Death, les norvégiens n’ont pas changé de point de vue en déversant leur grindcore ouvert et si personnel: entre avant-garde, progressif, extrême violence, surprenantes mélodies (souvent en arpèges) arrivant au milieu et second degré revendiqué (“My Hair Will Be Long Until Death” pour ne citer qu’un titre). Toujours affublé de cette tonalité de guitare plutôt singulière dans la scène, le groupe déverse là dix-huit minutes de folie très addictives et bourrées d’inventivité tout en sachant rester cohérentes. Un court nouveau chapitre à ajouter à la parfaite discographie de cet électron libre !
Crossfaith – ARK (UNFD) electro/metalcore
En voilà un autre d’électron libre ! Crossfaith, groupe japonais qui célèbre sa majorité en… ejectant son bassiste, et en signant un cinquième album (six ans après Ex Machina). ARK joue avec les codes afin de transformer le pit en dancefloor via des synthés complètement du côté de la trance (le bien nommé “HEADSHOT!”). Des impulsions electro venant compléter leur identité, alternant entre frénésie (parfois un brin bordélique) et refrains (très) poppy histoire de rendre tout ça plus facilement assimilable ? Au final, de bonne brutalité en passages faisant lever le sourcil, on a là un album un peu trop décousu mais qui dégage un enthousiasme qui saura peut-être vous conquérir.
The Names Of Our Friends – Shoud We Know Better Than To Wonder? (Middle-Man Records) screamo/emoviolence
Jeune formation signée sur le label tenu par le chanteur de Coma Regalia, TNOOF s’autoproclame “gay girl tranny band” et joue un screamo tirant fortement sur l’emoviolence. En effet, on ressent sur ce premier album toute l’urgence et la rage via des cris stridents très expressifs. D’embardées rythmiques vénères en mélodies plus émotionnelles, ce premier EP est une tornade de nerfs et de radicalité hautement recommandé aux fans de Jeromes Dream, Senza ou encore Heavenly Blue.
Darko US – Starfire (Autoproduction) deathcore dingo
Après l’énorme Oni (2022), Darko US revient armé d’un tout aussi énorme Starfire. Enorme déjà au niveau de la durée: plus d’une heure dix de son, mais toujours au niveau de la brutalité la plus impactante. Le duo Tom Barber (Chelsea Grin)/Josh Miller (Spite) a de nouveau invité des guests provenant de différents groupes affirmés (The Last Ten Seconds Of Life, Paleface, Silent Planet, Northlane, Volumes, Scarlxrd…) et imbrique cette fois son deathcore au sein d’une atmosphère japanisante (à l’image de sa cover) comme sur “Distant World”. Plein de glitchs, de sons electro et de sweeps, le groupe tempère pourtant beaucoup plus ses assauts sur des titres comme “5D” ou sur “Cry Baby” qui la joue carrément ballade de lover. Bref, il y a là à boire et à manger, d’imposantes torgnoles, des mélodies un brin sirupeuses et des sons biscornus. A vous de voir.
Kvaen – The Formless Fire (Metal Blade Records) black metal
Après un sympathique premier album sorti en 2022 sur Black Lion Records, Kvaen débarque chez Metal Blade Records. Jacob Björnfot (anciennement chez The Duskfall) s’occupe à nouveau de tout et déverse un black metal allant moins dans le speed/thrash qu’auparavant mais beaucoup plus du côté du death mélodique. On a d’ailleurs la participation de Sebastian Ramstedt de Necrophobic sur “Traverse The Nether” qui confirme ça ! L’esprit viking hérité de Bathory (entrevu sur l’album précédent) arrivera plus sérieusement sur la fin de l’album, notamment sur “De Dögas Sang” au pouvoir épique instantané. Bien foutu, plutôt entrainant, une jolie confirmation.
Noxis – Violence Inherent In The System (Rotted Life Records) death metal
Originaire de Cleveland, Noxis débarque avec un premier album d’un death metal qui ne paye pas de mine. C’est surtout le son de la basse qui se distingue, plein de groove et aux envies jazzy virtuoses. De quoi donner beaucoup de dynamisme (à côté de la grosse brutalité) à ce premier album qui évoque autant Cryptopsy, Incantation que Horrendous. De riffs syncopés en cavalcades ravageuses et techniques, un premier effort massif et plein de créativité.
Squid Pisser – Dreams Of Puke (Skin Graft Records/Sweatband Records) spazzcore/math/avant-garde/grind barré
Les calamars incontinents font leur retour à peine un an après My Tadpole Legion. Ces deux créatures enfantées dans des groupes bien barrés (Gwar, Duck Duck Goose, Melted Bodies…) proposent une extension de leur premier album, soit une furie cacophonique hallucinée évoquant tour à tour Mr Bungle, The Locust voire The Dillinger Escape Plan (notamment sur “Vaporize A Neighbour”). Un réjouissant chaos en mode tornade fulgurante (douze titres pour vingt minutes à peine, ça donne une idée des mesures de l’échelle de Beaufort !).
Balwezo Westijiz – Tower Of Famine (Profound Lore Records) black metal/ambient
Derrière ce nom énigmatique valant un maximum de points au Scrabble se cachent les deux gars de Bekëth Nexëmüh, très estimé groupe de black metal suédois. Figurez-vous que Balwezo Westijiz lui est antérieur (projet débuté en 2007) et que Tower Of Famine n’est que le second album du groupe (le premier datant de 2011). Autrefois du côté du dark ambient (dont on conserve ici des interludes dans l’esprit), nous avons donc aujourd’hui au menu un black metal plutôt raw mais contrebalancé d’atmosphères éthérées et lugubres à la fois (le break fantomatique de “Flesh In The Funeral Pyre”), toujours hypnotiques malgré la longueur des morceaux (“Calling From The Ashes” et sa mélodie mélancolique rappelant Xasthur). Malgré sa teinte générale hivernale et son aspect longuet (n’empêchant pas une certaine monotonie), il devrait faire son effet lors de vos futures balades forestières (à la tombée de la nuit si possible).
Ulcerate – Cutting The Throat Of God (Debemur Morti Productions) avant-garde/black/death technique
Les néo-zélandais étaient attendus au tournant et n’ont pas déçu (du moins un grand nombre d’amateurs vu que de nombreux placent déjà ce nouvel album en tête de leur top de l’année !) ! Pourtant Ulcerate semble avoir choisi d’affirmer son pendant mélodique comme l’atteste l’intro mélancolique de “To Flow Through Ashen Hearts”, sauf que non, le groupe n’a pas perdu pour autant son goût pour la complexité, les dissonances et la sinistrose ambiante. Intégrant à son programme de dévastation de nombreuses zones mélodiques captivantes et un bonne louche d’émotions (oui), Ulcerate se renouvelle et terrasse à nouveau toute âme se risquant à passer à proximité. A voir en live en automne prochain en compagnie de Fange ou Selbst.
Sibiir – Undergang (FysiskFormat) blackened post-hardcore/metal avec une touche de crust
Troisième album pour Sibiir, groupe norvégien qui mériterait une meilleure exposition tant son approche du post-machin est personnelle. Le groupe possède un chanteur très expressif et hargneux tandis que ses camarades de jeu parviennent à envoyer des rythmiques à la fois percutantes et mélodiques (façon From Ashes Rise, notable sur “Divergence And Deceit” ou “The Plague”) ainsi que des atmosphères plus profondes (“Placid Waters”, titre possédant une touche black metal) allant de pair avec l’agressivité quasi constante de son vocaliste. Un modèle de puissance.
Aseethe – The Cost (Thrill Jockey records) doom/drone/sludge/noise
Après le sous-estimé Throes (2019, enregistré par feu-Steve Albini), Aseethe s’est fait discret avant de revenir avec The Cost, toujours chez Thrill Jockey Records (Lightning Bolt, Thou…). Ce nouvel album est une nouvelle fois un déluge douloureux et (très) torturé où l’on retrouve des phases façon Body Void côtoyant des phases drone ou éthérées (école Khanate). Le mix fonctionne à nouveau parfaitement, des mélodies étant savamment distillées au milieu du malaise, où l’on se surprend à rester (étonnamment) totalement captivé durant ces quarante minutes en apnée.
Feed Them Death – The Malady (Brucia Records) bizarre death/grind/crust
A l’instar de Beaten To Death dont je vous ai parlé un peu plus haut, les anglais de Feed Them Death donne aussi dans le grind anticonformiste. Avec sa production disons lo-fi, le trio londonien déroule une mixture détonnante pleine de discordances (avec des phases où l’on a l’impression d’improvisations de guitare) et d’énergie hardcore/punk voire crust, tout ça avec un aboyeur convaincant et une basse très audible et aventureuse. Loin des standards du grind, The Malady est à vivre comme une expérience.
Pijn – From Low Beams Of Hope (Floodlit Recordings) post-metal/post-rock
Le groupe de Manchester sort ici son plus abstrait (c’est annoncé) mais aussi son plus ambitieux album. La base post-rock/post-metal est bien là mais agrémentée de très nombreuses nuances autour du sombre et de la mélancolie, des sentiments d’ailleurs renforcés par la présence d’un violoncelle, d’un violon et d’un saxo venant çà et là contraster les moments d’exaltation qui émanent de cet album (mention à “On The Far Side Of Morning”). Une très jolie parenthèse d’introspection instrumentale.
Scene Queen – Hot Singles In Your Area (Hopeless Records) “scene metalcore”
Ordinateur rose bonbon et titre explicite pour qui a connu internet au début des années 2000, Scene Queen fait référence à toute la pop culture de cette période (de Paris Hilton à tout ce qu’on pouvait voir sur Myspace) en mixant metalcore, pop guimauve, electro et hip hop (et même de la country sur “M.I.L.F.”) avec beaucoup d’ironie dans des paroles qui grattent, n’hésitant pas à dénoncer les agissements de certains groupes avec les adolescentes (“18+”) ainsi que toute la facilité à trouver du contenu sexuel sur internet. Derrière les paillettes et la nostalgie, il y a donc beaucoup de provoc et un vrai message féministe. Après musicalement, certains choix peuvent apparaitre très discutables (“Mutual Masturbation” qui va du côté du crunk, parmi tant d’autres), à prendre au Xième degré ?
Jools : a voir pour la suite, sympa mais dans une vibe un poil trop clean pour mes goûts. J’attends néanmoins de voir où ça ira avec un prochain opus !
Beaten to Death : un petit côté quasi proggy pas dégueu dans le style, ça ne m’étonne pas qu’ils soient norvégiens, parce que j’y trouve un petit côté She Said Destroy dans certaines inclinaisons (d’ailleurs c’est le chanteur de SSD qui officie ici), vraiment un chouette disque bien plus frais qu’il n’y paraît au premier abord !
The Name of our Friends : hyper bien, merci pour la découverte !
Ulcerate : très bon mais je trouve la prod trop léchée, ça lui donne un côté tout doux tout rouboudou qui contraste avec les intentions a priori frontales de la musique et du style. J’aurais apprécia un son un peu plus abrasif je pense.
Et le Sibiir me semble fait pour moi à la lecture, donc je ne manquerai pas de l’écouter, merci pour le boulot !
Merci à toi pour le retour ! Je bosse déjà sur ma session juillet et je peux déjà te teaser pas mal de screamo et assimilés ;)
Toujours aussi original, les chants du hasard… Noxis est prometteur mais je n’aime pas la production trop sèche – alors que je louerais plutôt la valorisation de la basse. Quant à Ulcerate 2024, j’aime bien ce pas fait un peu en arrière vers la part plus Sludge de leur identité musicale, grâce à cette insistance mesurée sur des mélodies claires à plusieurs moments, qui n’en ressortent que plus marquantes.