Monotonix + Deerhoof + Dan Deacon Ensemble – 31 mai 2009 – Parc de la Villette – Paris

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Annee de sortie: 2010

Crevé de cet après-midi riche en rebondissement dans tous les sens du terme, voilà le récit de mes aventures dans le parc de la Villette pour ce dimanche sonique.

D’abord, Monotonix. On me les avait présenté comme un groupe imprévisible; c’est le moins que l’on puisse dire. Monotonix est le nom de groupe le moins approprié pour ces israéliens. Arrivé en cours de route, je descends les escaliers et me place derrière un gros poteau voyant que descendre plus ne me permettrait pas de me frayer un chemin dans la foule. Pourtant, depuis les escaliers leur rock groovy emporte ma tête et me fait vibrer à l’unisson. Il faut que je me rapproche. Par chance, une demoiselle se trouvant devant moi descend de la bordure et me permet d’accéder à un promontoire d’où je peux sauter pour rejoindre la fosse et les 3 musiciens allumés, sortes de clones de Borat à touffe bouclée, quasiment à poil. Une fois près du chanteur qui commence déjà à grimper je rentre dans la danse. Le jeu est maintenant de suivre le groupe. Le festival Villette Sonique fonctionne de manière itinérante pour ces journées de concerts gratuits le week-end. Les groupes jouent sur différentes scènes dispersées à travers le parc. Monotonix se saisit du concept et va plus loin en créant le groupe itinérant.

A l’aide du public acquis à leur cause, le batteur et le chanteur se déplacent de l’autre côté de l’espace où le public s’est rassemblé, fendent la foule, emportant les fûts de la batterie. Petits et grands, vieux et jeunes sont agglutinés pour pouvoir saisir un morceau du spectacle. Le groupe décide donc de partir à la rencontre de tous ceux qui ne peuvent pas les rejoindre. Le batteur monte sur une des passerelles. Chacun se saisit d’un morceau de batterie et le tout est hissé à un étage supérieur. Le batteur monte aussi tandis que le chanteur le tire par les cheveux pour le monter tant bien que mal là haut.

De là le concert reprend ou continue tout simplement puisque le guitariste ne s’arrête pas une seconde d’envoyer des riffs d’un gros son chargé en basses pour ne laisser aucun temps mort au spectacle. Un morceau et puis s’en vont. La batterie redescend, le chanteur aussi et demande au public de s’asseoir. Il faudra maintenant crier « YASOU » quand il dira « YEAH ». On obéit et on l’écoute chanter de sa belle voix à l’accent israélien tout en ajoutant les « YASOU » demandés. Le fil du micro quand à lui est suivi par tous les spectateurs, aimables collaborateurs techniques, faisant bien attention que rien ne se débranche ou ne se rompe.

Un morceau et c’est encore une fois reparti. Le chanteur mène la danse et revient à son point de départ pour le final. Le batteur déplace encore son matériel grâce à l’aide de la foule et reprend son rythme là où il l’avait laissé. Le guitariste continue encore et encore à groover, où que ce siot y compris sur les épaules d’un spectateur. Le chanteur monte une fois de plus sur tout ce qui bouge, y compris le public, pour se faire entendre.

Puis, il tire le tapis vert censé signaler l’emplacement des instruments. Le guitariste s’allonge, le batteur le rejoint avec une caisse claire. Les deux musiciens ne n’interrompent pas de jouer. A nous de les porter au firmament. Tant bien que mal, les bras les soulèvent et les maintiennent pendant peut-être trois bonne minutes, peut-être moins. Le temps m’aura paru sûrement plus long puisque je me trouvais en dessous à aider, à supporter avec mes petits bras, le duo. Duo qui se transforme ensuite en trio quand le chanteur les rejoint et rajoute du poids. La garde souffre mais ne se rend pas. Le tapis restera en l’air jusqu’à la fin du morceau.
Enfin, une fois tout le monde a terre, on nous demande de nous asseoir une nouvelle fois pour un remerciement final. Merci au public, merci au groupe, merci pour le bordel. Du jamais vu.

Un peu plus loin dans le parc, sur une vraie scène, le concert de Deerhoof permettra de souffler avant l’ouragan humain que fut la prestation du Dan Deacon Ensemble. Le rock de Deerhoof est rythmiquement plus varié que celui de Monotonix mais aussi plus sage. Leur pop rock souvent étrange, est mené par une rythmique bien présente et survolé par la voix d’une chanteuse japonaise, il s’agite et prend des airs de générique de dessin animé au gré de mélodies douces et souriantes. J’en veux pour preuve l’utilisation d’un sifflet pour une chanson sur le train (pour faire tchou tchou) et d’un gros masque de tigre qu’elle portera l’espace de quelques instants, tout en glissant le micro derrière pour chanter. De mon emplacement je ne voyais pas toute la scène mais l’enthousiasme des musiciens était évident. Bien que moins expressifs que Monotonix, leur musique est dansante et leur passion évidente. Les trois quarts d’heure en leur compagnie ne furent donc pas désagréables pour un sou et permirent de remuer un peu la tête et le corps dans une ambiance sage et agréable. Merci aussi au soleil pour sa belle contribution à ce petit moment de plaisir sonore et estivale.

Avant d’arriver devant la scène, derrirèe laquelle surplombait le globe argenté de la Géode, je ne savais pas grand-chose de Dan Deacon. J’avais le souvenir d’avoir entendu une musique électronique, dansante et folle aux accents naïfs et enfantins. Un spectacle qui pouvait être intéressant mais qui n’aurait pas forcement valu le déplacement si je n’étais pas déjà présent pour les deux autres groupes. Quelle connerie ! Mais quelle connerie j’aurais alors commise !
Dan Deacon ce n’est pas seulement un bonhomme rondouillard avec de grosses lunettes maintenues par du scotch vert fluo et une table bourrée d’effets ! C’est un orchestre de trois guitaristes, trois batteurs, trois claviers et un trublion déguisé en moitié d’étoile venus faire danser une marée humaine et les faire jouer à des jeux de cours de récréation auquel on a eu droit. Le beat électronique se mêle aux frappes simultanées des batteries. Les claviers soutiennent la mélodie et les guitaristes emportent le tout tandis que Deacon joue le chef d’orchestre et y va de sa voix modifiée par des effets pour remplacer la dose d’hélium qu’il aurait du ingérer pour avoir le même résultat.
Le public se trémousse, sautille, lève les bras, gueule et suit le mouvement crée sur scène pour s’éclater dans la bonne humeur la plus complète. Tout le monde se cogne, se caresse et se porte mutuellement dans cette orgie de danse. Mais, avant cela, il faut communier et on nous demande avant de danser de lever les bras. Celui qui a les bras les plus grands sera notre lumière. Nous devons donc nous diriger vers lui. Puis, chacun pose ses mains sur la tête de la personne se trouvant en face de lui.

Prêt ? Partez, le concert commence et tout le monde se met a danser de façon désordonnée, mais pas pour longtemps. Une ou deux chansons, puis Deacon reprend le contrôle des opérations et demande au public de former un cercle. « Reculer de cinq pas ! Vous, reculez encore d’un pas ». Tout le monde s’exécute et un grand cercle vide remplace l’emplacement où chacun dansaient. Au tour maintenant de deux innocents de se remuer devant tout le monde. Le but du jeu est d’avoir l’air le plus « sassy » possible. Une fois que les participants auront fini de danser, ils passent le relais à un autre membre de leur « équipe » (donc un autre innocent se trouvant derrière eux). La danse reprend, l’énergie monte de plus en plus sur scène. Les participants se remuent dans tous les sens, suivent les ordres et passent le relais jusqu’à ce que tout le monde en ait marre et reprenne position pour combler le vide et s’éclater.
Le morceau se conclut et les règles changent. Le cercle réapparaît mais là où il y avait des danseurs il n’y aura que l’acolyte de Deacon, la moitié d’étoile humaine, pour danser. Chacun devra l’imiter du mieux qu’il pourra. Danse synchronisée pour tout le monde! On lève les bras, on bouge les mains… Le spectacle vu de l’extérieur pourrait passer pour une connerie new age mais l’euphorie et la communion de tous les participants va plus loin qu’un délire pseudo religieux. La musique et la danse sont les seules préoccupations des membres de l’assistance et ils ne perdent pas de temps pour repartir dans l’orgie traditionnelle des mouvements désordonnés mais enthousiastes.
Le morceau suivant sera ensuite précédé d’une troisième tentative de jeu inventé par Deacon. Former une sorte de chaîne humaine, quelque chose du genre. Difficile à expliquer et à comprendre. Personne ne suivra trop les indications préférant se laisser emporter par le son et partir dans sa propre petite direction jouissive. Qui ira s’en offusquer ? Surement pas Deacon et son orchestre, trop heureux de voir le public réagir avec autant d’enthousiasme. Encore un morceau ou deux et le concert est censé se conclure.

Déjà ? L’autorisation est donc donnée pour un dernier titre. Il faudra maintenant reprendre en coeur les paroles de la chansons. Dan Deacon nous les apprends, nous fait répéter deux fois et advienne que pourra. « Silence like the wind overtakes me, oooooh oooooooooooooooh oooooooooooh », tout le monde entonne les paroles en suivant les mouvements de la voix de Deacon et remue en même temps. A ce moment là, je me suis demandé d’où je pouvais bien tirer le souffle qu’il me restait tellement je bougeais tout en étant bousculé par à peu près tous le monde. Le final se fut donc dans la même bonne humeur de collaboration qu’au début. Une heure de folie communicative où je n’aurais vu que des sourires autour de moi. Des souvenirs pleins la tête, le spectacle s’achève et chacun part dans sa petite direction. Tout le monde aura participé à la bonne humeur mais sans le chef d’orchestre rien ne serait arrivé. Merci à Dan Deacon. Merci à Villette Sonique. A l’année prochaine !


Merci à Robert Gil pour les photos

Chroniqueur

Mathieu Lubrun

Hororo est chroniqueur depuis 2004 sur Eklektik, bibliothécaire de profession, passionné de musique (metal, jazz, hip hop, electro …) et de comics. Alcoolique de concert et de disques, bavard et effervescent dès qu’il rentre en contact avec un artiste qu’il apprécie. Contactez-le pour lui dire tout ce que vous voulez à son adresse personnelle xhororox [AT] gmail [DOT] com et/ou suivez-le sur Twitter.

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