Si Heave the Gambrel Roof devait être pour Hala Strana le dernier virage, il n’aurait pas été mieux courbé à la tâche, s’affirmant comme une synthèse vibrante des trois albums précédents : le voyage dans l’espace, le voyage dans le temps et le voyage en atelier… Inutile donc de s’appesantir sur le chapitre descriptif : tout est dans les autres chroniques du projet. Oui j’ai le droit de faire ma feignasse, merci bien.
Pour le chapitre critique on va aussi aller droit au but : cet album est encore une petite perle de genre. Il y plane comme un ciel de papier brûlé sur lequel se découperait un soleil granuleux, suspendu un moment au dessus de la crête des arbres, juste un peu avant d’aller mollement s’écraser, comme une pêche trop mûre sur un miroir. Et pour le son, ça donne une nouvelle collection de petites capsules de terroir, où pullulent les voix anciennes, décidément envoûtantes de ces instruments superbes ou biscornus, archaïques ou customisés, nés et pour la plupart restés au cœur de la vieille Europe. Le travail des arrangements est peut-être le plus recherché entrepris par Hala Strana, si bien que sur de nombreux passages on peut parler de compositions pour ensemble musical à part entière, où les nuances et les volumes se croisent et se superposent au gré de dynamiques fourmillantes, et surtout particulièrement efficaces. Je pense notamment à “Marl”, ”Wedding of the Blind” ou au morceau éponyme, qui sont d’une intensité frôlant l’état de transe, et où l’on imagine volontiers Steven R. Smith en train de suer à grosses gouttes, penché sur ses cordes qu’il gratte à s’en rougir le bout des doigts. Les autres morceaux sont plus volontiers contemplatifs, articulés autour de bourdons fuyants, de samples discrets et d’accords de guitare froissés, laissés à sécher au vent. Du Hala Strana quoi. Petite pensée qui ne mange pas de pain pour “Molars of Smoke”, lequel dans ce dernier registre est assez magnifique.
On en revient à l’idée de synthèse. L’album reprend en effet l’esprit autodidacte absolu de These Villages et vient l’appliquer, comme un calque étonnamment bien ajusté, sur le socle folklorique forgé par le s/t et par Fielding. On peut ainsi se dire qu’en quatre albums, Hala Strana a dispensé une petite leçon pratique sur la manière de rendre sa musique différente sans jamais en altérer les fondements.
- returning
- motra dhe vellai
- havazi i dy motrave
- grain
- marl
- home
- wedding of the blind
- rat lines
- heave the gambrel roof
- molars of smoke
- the loss of what we keep