Professor Fate. Un pseudonyme derrière lequel se cache, sous un masque de bouffon diabolique, Mick Kenney, aka Irrumator de Anaal Nathrakh. Anciennement responsable du rôle de batteur dans Mistress, groupe de sludge grind, et de guitariste dans Exploder, groupe de hard rock couillu, le voilà parti pour nous montrer une nouvelle facette de son travail. Cette fois en solo, il illustre musicalement l’enfer de Dante. Le thème a été exploré par une liste interminable d’auteurs et d’artistes et ce n’est donc pas là que l’on trouvera l’originalité de la démarche. Professor Fate se dégage à la première note de toutes les attentes que l’on pourrait avoir de la part d’un homme comme Mick Kinney. Aucune référence musicale au black metal, au metal ou à la débauche de violence grandiloquente a laquelle il nous avait habitués jusqu’à présent. Professor Fate est un projet solo réalisé à l’aide d’un clavier reproduisant, entre autres, des notes d’orgue, de violon ou de trompette, d’une boite à rythme et de sa propre voix. Et oui, non content de maitriser tous les instruments nécessaire à former un groupe de rock, l’homme orchestre qu’était déjà Mick Kenney pose ici ses premières lignes vocales mélodiques. C’est sur ce point de détail que repose l’appréciation de ce premier effort.
On apprend en regardant dans le livret que son père, sa compagne, mais, aussi Kristofer Rigg de Ulver(qui vient poser sa splendide voix sur « Limbo ») l’ont tous encouragé pour mener a bien ce projet et il y a fort a parier que c’est dans le domaine du chant qu’il avait besoin d’encouragement. Les sonorités des instruments ont ce petit arrière goût digital qui empêche le disque d’être aussi grandiloquent qu’il pourrait l’être avec de véritables instruments. Sur ce point, on ne pourra pas faire de reproches à l’auteur, il a fait avec les moyens du bord et s’en tire très bien. Résolument gothique et théâtrale, la musique explore efficacement tout ce que j’associe mentalement à l’œuvre de Dante, ne l’ayant pas lue et ne connaissant que sommairement le sujet. Les chansons s’écoutent comme des chapitres, décrivant chacune une émotion ou un passage particulier de l’ouvrage. Le disque peut donc s’écouter comme une succession d’évènements ou comme un voyage à travers l’œuvre. De ce point de vue là, l’objectif fixé est atteint. Mais autant on peut apprécier le sens de la composition de Mick Kenney, autant sa voix peut déranger. La ligne mélodique de Krisoffer Rigg se mêle parfaitement à la musique sur « Limbo » et en fait la meilleure plage de l’album. Kenney à l’inverse n’a pas autant de coffre et de variété dans son registre vocal pour se permettre de varier en passant d’une émotion à une autre.
Par exemple, quand sur « the Gates of Hell » il emploie une voix semblable a celle d’un bouffon qui guiderait l’auditeur dans un labyrinthe, il interprète son rôle à merveille. Mais quand il se veut plus sombre et mélancolique, sur « The Glutonous », sa voix convient moins et certains esprits moqueurs pourraient même la trouver ridicule. En toute franchise, j’imaginais en achetant le disque que Rigg se trouverait sur toutes les chansons. Ce fut donc une légère déception de découvrir la voix de Kenney. Mais, malgré tout, je m’y suis habitué et une fois l’effet de surprise passé il est indéniable que, pour un premier essai, The Inferno est un disque encourageant avec davantage de qualités que de défauts. La réalisation manque de moyen mais l’atmosphère créée est crédible et n’a pas les défauts d’un film de série B qui voudrait trop faire sans en avoir les moyens. Bien qu’utilisant des sonorités propres au classique, la musique est dynamique et certains titres sont très accrocheurs, comme « Limbo », « the Violent » (où apparait Dirty Von Donovan, le chanteur des ex. Exploder) ou « the Lustful » et ses violons entêtants. D’une durée raisonnable, ce premier album du Professor Fate est à encourager sans être pour l’instant une pièce maitresse de l’oeuvre de Mick Kenney mais simplement un essai qui lui permet d’étendre son registre musical. En effet, le bonhomme déclarait récemment sur sa page myspace qu’il désirait composer des musiques de films. The Inferno, pris comme un carton d’invitation envoyé a de possibles réalisateurs, est donc une œuvre à garder en mémoire quand elle lui permettra d’arriver à ses fins. Et avec un album aussi encourageant que celui-ci, il y a des chances qu’il y parvienne.
- the gates of hell
- limbo
- the lustful
- the glutonous
- avarice and prodigality
- the wrathful and sullen
- heretics
- the violent
- the fraudulent
- treachery