Derrière les pseudonymes de la scène rap indépendante se trouvent souvent des visages bien blancs pour qui les problèmes du ghetto ne sont pas les premières préoccupations. La séparation entre la scène rap indé et la scène rap plus mainstream se fait donc bien souvent dans ce sens : les blancs philosophent pendant que les noirs se préoccupent de leurs rues. Des exceptions il y en a bien sûr des tas, par exemple les jeunes noirs des Cool Kids n’en ont que faire de ces clichés. Ils ne se cachent pas derrière des pseudonymes. Ils n’intellectualisent pas leur situation. Ils n’essayent pas de se faire remarquer en gesticulant ou en hurlant comme Lil’ Jon ou en racontant tout et n’importe quoi comme Li’ Wayne. Ils sont juste cools.
Pas de vol sur la marchandise et pas de perte de place. Les onze titres de The Bake Sale sont tous efficaces, ultra accrocheurs et détenteurs d’une bonhommie et d’une désinvolture communicative. Les Cool Kids parlent de rue mais seulement quand ils la traversent pour draguer des filles (« What it is ») ou acheter quelque chose dans un magasin (« What up man »). Les chansons des Cool Kids parlent de leurs vies quotidiennes et de toutes les occasions qu’ils ont de sourire. Pas d’une existence brisée par la violence des rues ou de fantasme littéraire d’étudiant rêveur, juste du quotidien de deux gamins noirs revendiquant leur style de vie, leur ego (« Mikey rocks ») et leur culture hip hop/geek (« Does that belt say Star Wars ? » dans « A little bit cooler »).
The Bake sale EP est un disque d’aujourd’hui. Ancré dans le style et la production minimaliste actuelle, il n’use pas de samples de vynil ou d’influences jazz ou blues mais d’un rythme de basse lent et entrainant accompagné d’accroches vocales répétées et entêtantes. Le secret et l’originalité de ce duo tient dans leur attitude tout ce qu’il y a plus de cool. Comment l’expliquer ? Une fois enclenché dans vos oreilles, les Cool Kids vous feront ralentir le pas et apprécier le rayon de soleil qui viendra toucher votre visage, le regard des filles qui croisent votre chemin, les poignées de main que vous donnerez à vos potes. Un quotidien simple mais agréable au son d’un rythme urbain et de deux voix au flow lent et assuré.
Qu’importe le beat, les voix de Mikey Rocks et de Chuck Inglish s’accrochent à la rythmique et transporte chaque plage en un single imparable. Les titres « 88 », « Black mags » et « A little bit cooler » figurent parmi mes chansons favorites mais, chacun peut trouver matière à bousculer ce trio pour composer un tout autre tiercé gagnant avec ces onze chansons. Rien n’est à jeter, tout est à écouter en attendant l’été, saison qui conviendra beaucoup mieux à ce disque. Urbain mais pas pessimiste ou nostalgique. Indépendant mais pas excessivement intello. The Bake sale est juste un disque efficace et agréable de rap qui mettra autant d’accord des aficionados du old school jusqu’aux Def Junkies.
- what up man
- one two
- mikey rocks
- 88
- what it is…
- black mags
- a little bit cooler
- gold and a pager
- bassment party
- jingling
- don’t trip (bonus track)