Ulcerate c’est un peu comme ce pote fan d’Ironman (le sport pas le film) qui t’emmène faire une randonnée de sa composition: pas de chemin balisé, il emprunte des petits sentiers escarpés en courant, dévale des précipices rocailleux à grandes enjambées puis remonte aussitôt tout en restant toujours aussi frais après une heure de « balade ». Toi tu tentes de suivre derrière, tu fatigues, tu te manges des pierres dans les chevilles, tu sues comme un phoque mais au retour chez toi t’es finalement content de l’avoir fait. Comme pour ce genre de randonnées extrêmes, certains n’arriveront donc pas à suivre ce Stare Into Death And Be Still dès les premiers mètres (ou les premières secondes), tandis qu’en persévérant, les choses deviennent de plus en plus faciles (et compréhensibles).
Ulcerate a su au fil des albums imposer son nom dans le haut du panier du death metal complexe. Cette alliance de brutalité et d’impressionnante technique noyées dans un magma difficilement déchiffrable est à nouveau la signature sonore des néo-zélandais sur ce Stare Into Death And Be Still, premier album chez les frenchies de Debemur Morti (après des albums chez Willowtip et Relapse). Une signature qui apparaît plutôt cohérente étant donné le goût du trio pour le black dissonant de Deathspell Omega (qui émanera par moment comme pendant « Exhale The Ash » ou « Visceral Ends »).
Mais ce n’est pas pour autant qu’Ulcerate délaisse ses habitudes death metal technico-chaotique. Evoquant à de multiples reprises Gorguts ou Cryptopsy, le trio étend ses compos pour pouvoir multiplier les riffs comme les changements rythmiques, brouillant totalement les pistes de l’auditeur lambda. Car une fois de plus, la musique d’Ulcerate est un déferlement ultra complexe (d’instruments dissonants et d’un chant guttural bien monstrueux) demandant de sacrées capacités d’attention. Mais il se dégage derrière cet environnement opaque de nombreuses mélodies, parfois plus mélancoliques comme pendant « There Is No Horizon » ou « Inversion » qui proposent quelques breaks plus « posés » au milieu de ces riffs étourdissants, parfois plus épiques (l’aérien « Drawn Into The Next Void ») ou encore la conclusion « Dissolved Orders » à l’ambiance plus introspective (et franchement plus instantanément lisible).
Ulcerate signe là un nouvel album d’un magistral chaos organisé. Et si l’écoute en apnée au milieu de ces couloirs de labyrinthes est toujours à l’ordre du jour, le trio fait davantage varier l’intensité qu’à l’accoutumée et y cale une nouvelle forme de sensibilité. Plus protéiforme et subtil qu’il n’y parait, la recette post death chaotique ainsi renouvelée par le trio en font un solide prétendant au poste d’album de l’année (certes après un peu d’entraînement).
- The Lifeless Advance
- Exhale The Ash
- Stare Into Death And Be Still
- The Is No Horizon
- Inversion
- Visceral Ends
- Drawn Into The Next Void
- Dissolved Orders