Il y a deux ans, le groupe poitevin The Phantom Carriage, au nom inspiré par un des chefs-d’oeuvre du cinéma en noir et blanc, me faisait frissonner avec un premier album « New Thing » mêlant hardcore, black-metal et ambiances post-romantiques à mi-chemin entre Neurosis et Danny Elfman. Ils reviennent en ce début d’année avec « Falls« , un deuxième album dans lequel ils affirment leur style, plus cohérent et plus sombre, plus sale et plus rentre-dedans.
Loin de moi l’idée de faire de cette chronique une éloge aussi courte que celle qu’un des rédacteurs de Fier Panda a adressé à cet opus, et pourtant, ce n’est pas l’envie qui me manque. « Falls » est clairement un album qui ne laisse pas indemne, puisant à la fois dans l’énergie crue du hardcore et la noirceur dévorante du black-metal, et forgeant à partir de ces métaux purs un golem sombre et dangereux.
Les éléments piochés dans le hardcore sont bruts, y compris la voix du chanteur du groupe, très directe et sans artifices, presque dérangeante à la première écoute, notamment lors des passages en voix claire distillés ça et là dès le premier titre « Today We Stand » et renouvelés sur, par exemple, « The Time », des chansons qui sentent le Comity à plein nez. Ceux empruntés au black-metal, lourds et dissonants (« About Being a Father » est torturée comme peu d’albums de black parviennent à l’être), rappellent des albums ou projets à consonances très post-black : « Dreamers Will Never Stop Dreaming » et « Rejuvenation », entre autres, contiennent des riffs qui font penser à l’excellent « Rebel Extravaganza » de Satyricon, incartade détonante entre leurs albums de black mélodique des années 1990 et leur dérive, assumée et tout aussi jouissive à mon goût, vers une sorte de black-rock qui s’affirme dès l’album « Volcano » en 2002.
Pour souder le tout, un esprit très postcore ajoute à chacune des compositions des consonances amères, introspectives et nostalgiques qui, pour le compte, se rapprochent beaucoup de la démarche jusqu’au-boutiste de groupes comme Amenra (écoutez donc l’introduction de « The Time« , et osez affirmer que ça ne sent pas le postcore à plein nez). Les incartades un peu plus ouvertement poétiques qu’on trouvait dans le premier album (je pense à la très surprenante « Les Fantômes se Cachent pour Pleurer » qui offrait un break superbe mais déstabilisant au milieu de « New Thing ») disparaissent complètement ici : « Falls » est dense et ininterrompu. Les quarante minutes de l’opus forment une masse mouvante, intense et très lourde (« The Heaviest Matter of the Universe« , comme disent les autres), sans grande chance de rémission.
En un mot comme en cent, The Phantom Carriage, après un premier album prometteur mais un peu fouillis, a trouvé un point d’équilibre innovant entre ses différentes influences, et nous offre avec « Falls » une galette des plus originales, ouvrant en beauté une année 2013 qui s’annonce riche pour les amateurs de musique de tordus. Le pari, probablement ambitieux, est relevé avec brio : « Falls » est sombre mais jamais opaque, et chaque écoute est une nouvelle noyade, de celles qui ne nous donnent pas envie de ressortir la tête de l’eau.
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M O N S T R U E U X album pas moins. Pour le moment c’est mon album de l’année. Tellement supérieur au premier que c’en est incroyable, je ne m’attendais pas à une telle évolution. A noter que l’album, pour l’instant seulement disponible en vinyle et digital, devrait sortir en CD prochainement!
Y’a que moi qui ai l’impression d’entendre du sous-DSO (dernière période) à la sauce hardcore?
Bah ouais, faut croire.