Le roman noir est un genre où les personnages trahissent leurs amis, leurs familles, sauvent la vie d’un compagnon de route par désespoirs. Le dos collé contre le mur, la violence de leurs actions reflète le ressentiments qu’ils ont à l’égard de tout et de personne mais, surtout d’eux-même. Humain par- dessus tout, les héros de roman noir parcourent les rues des villes à la recherche d’un moyen de sauver leur vie ou celle des autres. Des héros comme Leo dont la capacité a concevoir des plans pour des cambriolages est surpassée par sa capacité à sauver sa vie à défaut celle de ses complices.
Finalement, seul les liens de parentés semblent avoir encore du sens dans cet univers où l’honneur entre les voleurs n’est qu’un mythe. C’est donc cette force du lien de parenté qui pousse Tracy Lawless à la recherche de la vérité derrière la mort de son petit frère. De ces deux personnages partent des liens avec d’autres criminels. D’autres héros dont la plus grande erreur fut de s’enfoncer de plus en plus dans les recoins les plus sombres avant de se rendre compte que l’obscurité les suivraient jusqu’à leur fin.
Ces héros, Ed Brubaker (scénariste de Daredevil et auteur de Sleepers) les fait naître et vivre dans des scénarios au récit semblable aux grands classiques du film et du roman noir tandis que Sean Phillips (Sleepers, Hellblazer) leur donne le charisme et révèle les émotions qui font d’eux des êtres de papier gorgés d’émotion. Les visages maculer de traces d’encre noire dépeint par Phillips sont autant de marque du conflit qui existe entre chacun d’eux. Jamais totalement pourris mais, jamais totalement propre non plus. Leur tendance à fréquenter les bas fonds forcent le dessinateur à obscurcir encore plus les cases mais, sans jamais oublier de laisser la lumière et la couleur filtrer, comme pour rappeler leur humanité qui s’accroche désespérément à eux. C’est ce conflit entre des émotions humaines et une volonté de vivre quoi qu’il en coute qui amène ainsi un père à conclure que le désir de sauver la vie de ses enfants qui l’anime aujourd’hui à trahir sera aussi celui qui le poussera à les haïr plus tard. Un constat morose pourtant plein de vérité qui fait du troisième volume de Criminal dont est tiré cette « citation » le meilleur jusqu’à présent. Que l’on ne s’y trompe cependant pas, ce volume est précédé de deux histoires de très bonne facture. Ce triptyque atteint cependant une profondeur et une qualité saisissante, même en prenant en compte la force de ce qui le précède. Trois tomes, cinq histoires et des vies qui s’entrecroisent dans un univers complexe et complet digne des plus grands. Ellroy, Chandler, leurs noms raisonnent dans ses pages mais, ils peuvent être fiers, leur héritage est en de bonne main. En guise de conclusion supplémentaire, je vous encourage a acheter ces histoires en version original pour profiter de la qualité des dialogues sans le filtre de la traduction et aussi, car n’ayant pas lu la version française, je ne peux pas jurer de sa qualité.