Le verbe pourpre et la dorure affable, le premier album de Focus Indulgens n’a rien d’une objurgation. Bien au contraire c’est un appel, un appel aux arpenteurs des sentiers de gloires de la steppe de jean bleu, celle qui promulgue aux amateurs son tissu ouaté habillant les peaux de plus d’une génération de sapiens. Le patch flanqué sur le coin de la veste pareil au cataplasme sur la blessure de guerre, le groupe italien débarque, l’œil alerte, sur une scène doom transalpine connaissant un net regain de vitalité ces dernières années.
Après 4 démos bien balancées, la première au début des années 90 et une compilation : In Vino Veritas parue en 2010 , c’est avec The Past que les gars de Sienne passent la seconde pour asseoir un rythme de croisière convenable à la destiné de leur projet , pas de quoi ahaner, ce n’est pas le rythme frénétique des parutions qui risque de les essouffler. Mais avec ce premier album, les choses pourraient peut être un peu s’accélérer pour eux car l’offrande est solide et ne mérite aucune clabauderie de ma part.
6 titres pour faire onduler les vagues à la surface, enfin plutôt 5 parce que le dernier morceau du disque est anecdotique même si c’est une reprise de l’excellent « Voodoo Child » d’Hendrix, alors ok le clin d’oeil est sympa puisque la réinterprétation donne un cachet atypique au titre mais l’original reste intouchable ; comme souvent d’ailleurs avec cet exercice de style, non ce qui intéressera c’est la matière sur les 5 autres morceaux qui composent l’album.
Ce sont cette tenue, ce moelleux rock vintage digne d’un Paul Chain ; cette grandiloquence, cette aspiration plus massive et mélodique mix du Vitus et Pentagram avec ces riffs qui s’enchâssent clairement dans le puzzle fluide du temps, tout cet ensemble de choses qui viennent taper votre lucimètre et le faire monter plus haut qu’à l’accoutumée.
Et puis il y a ces moments plus emphasés comme sur « The idol at the top of the Montain » qui vaporisent ces nuages de contemplation comme un Doomraiser qui aurait savouré un bon bol d’air entre deux séances de Candlemass ou Black Hole . Pourtant Focus Indulgens a ce ton qui lui est propre, ce dialecte qu’il habille de formules farouches aux accents de pesanteur légitimée ; et il y a cette voix pleine de Carlo « Master » Castellani pour guider le flux du disque, ce ton désabusé qui joue l’harmonie faussement délétère pour sceller l’office comme il faut. Pas mauvais cette histoire, clairement pas mauvais.
Focus Indulgens signe un premier album qui a du caractère, avec un tempérament qui peut parfois même virer au progressif quand l’envie leur prend. Un premier effort intéressant qui outre son coté duveteux et ondoyant cache de petits moments arrachés bien crachés, des mélodies acides et contagieuses, preuve que le groupe ne se fige pas dans une sorte d’image d’Épinal institutionnelle du genre. Entre ses gimmicks proches d’un Hard 70’s et son humeur « toscane du plancher » du doom séculier, The Past est un petit produit bien ficelé, un album du terroir qui pourrait valoir au groupe le blue label si le prochain disque confirme les bases ici présentées. La route est longue jusqu’à Manille, ça nous fera les jambes.