Lors de leur dernier concert au Glaz’art, j’ai eu l’occasion de parler avec un Oktopus en état d’ébriété mais enthousiaste et volubile. Celui-ci me confia qu’ils étaient en train de travailler à leur troisième album qu’il me décrivit comme un mélange de Black Sabbath, Joy Division et Jay Dilla. Black Sabbath pour la lourdeur et la noirceur, Joy Divison pour la mélancolie et Jay Dilla pour le travail de sampling et l’ancre urbain et rap de leur musique. Voilà comment je pourrais résumer le son de Dälek en une simple équation. Cependant, celle-ci résume tout aussi bien les deux disques précédents du duo et ce Gutter tactics n’est en rien une redite.
Les pieds dans le tarmac, la culture hip hop est toujours au coeur de la musique de Dälek tandis qu’ils effectuent un nouveau pas en avant dans un univers musical différent. La distinction entre culture et musique est ici pleinement en action. L’intention reste la même mais la tension crée par le conflit des influences est tout autre. En comparaison, Absence sonne aujourd’hui comme un disque de hardcore. Efficace et direct mais presque primaire par rapport à leur développement sonore. Même la scène rap indépendante ne va pas aussi loin que le duo, bien que le talent d’El-P à échapper aux règles et aux limitations peut s’entendre en écho dans les sonorités industrielles employées par moment. Cependant, quand je parle d’indus, je ne fais pas référence à l’attaque frontale d’il y a deux albums. Le grondement des basse ronde et douce à la fois ne forme plus non plus le gros du disque comme c’était le cas sur Abandoned language.
C’est dans un compromis entre ces deux disques qu’à grandi Gutter tactics et qu’il s’épanouit grâce à des sonorités électroniques différentes. Je crois par exemple entendre dans la conclusion d' »Armed with krylon » des reflets des expérimentations sonores de Trent Reznor. Quant à « Collection of Miserable Thoughts Laced with Wit » , la timide mélodie qui s’échappe des basses est comparable à celles de Board of Canada. Ajouter à cela leurs collaborations avec Faust et les Young Gods et on obtient un terreau propice à l’expérimentation à la lumière de la connaissance de ces anciens de l’avant garde. Une collection de musiciens qui ne peuvent s’empêcher de penser toujours trois pas en avance à laquelle s’ajoute sans mal Oktopus et MC Dälek.
Beaucoup plus de corps, de variation, de mélodies, de sonorités chaudes… Dälek explore des dizaines d’avenues nouvelles et s’ouvre de nouvelles voix. Le flow de MC Dälek est lui aussi différent. Entre le spoken word et le flow rap, coulant et caressant les compositions, son approche vocale répond aux expérimentations qui le soutiennent. Rien n’est jamais laissé au hasard sur ce disque, pas même la pochette réalisée une nouvelle fois par Paul Romano. J’ai l’impression de ne pas en dire assez mais avec un disque pareil on ne finirait jamais de parler. Il me faut donc m’arrêter là pour vous encourager à la seule chose que demande ce disque par dessus tout, l’écouter.
- blessed are they who bash your children’s head …
- no question
- armed with krylon
- who medgar ever was…
- street diction
- a collection of miserable thoughts laced with wit
- los macheteros / spear of a nation
- we lost sight
- gutter tactics
- 2012 (the pillage)
- atypical stereotype
« Celui-ci me confia qu’ils étaient en train de travailler à leur troisième album »
Ce gutter tactics, c’est le quatrième album du groupe :)
après From filthy tongue of gods and griots, absence, et abandoned language, voila voila.
Fabuleux…ce groupe est fabuleux. Une nouvelle réussite qui s’ajoute à un parcours sans fautes. Chef d’oeuvre, sans hésitation.
Superbe de maîtrise des ambiances, gorgé de souufrance rentrée. Dälek sont au-dessus depuis 4 albums, sans jamais gaver.
@shooter: cinquième, tu oublies Negro Necro Nekros
Uhhhhm, non je n’l’oublie pas, je le comptais plus comme une démo ou un EP, mais c’est vrai qu’il dure dans les 35 minutes, donc… je n’sais pas comment le considère le groupe :)
tout ca pour dire, Hororo, si t’as bien aimé les trois derniers albums, jette soir sur From filthy tongue, et negro necro nekros, c’est pas l’meilleur mais y avait déja de très bonnes instrus.
Ah Dalek! Je les ai decouverts récemment avec cet album justement, mais j’ai ensuite écouté Abscence que je préfere… En tout ils m’ont fait m’intéresser au hip hop alors je leur dis merci. Et leurs pochettes sont toujours magnifiques!
Haha !! Dalek !! C’est clair et net, ce Gutter est un chef-d’oeuvre. On ressent toujours ces ambiances remplit de souffrance, de haine, de désespoire, d’espoir et de chaos qui ont faits ce que Dalek est ce qu’il est aujourd’hui.
MAGNIFIQUE ! A ne pas manquer lors de leurs quelques passages en France ce mois-ci (pour ceux de la région Rhône-Alpes, ils passent au Grrrnd Zero de Lyon le 30 mars…).
Dernière acquisition en date après écoute furtive sur borne et coup de coeur immédiat. Les critiques quasi dithirambiques me rassurent quand à l’utilité de mon investissement et reflètent bien les sensations éprouvées à la première écoute ! C’est sombre, glacial et beau à la fois !!! Ah si toute la scène hip hop pouvait ressembler à ça !
Pour moi, l’un des groupes majeurs de notre époque. Derrière une étiquette hip hop se cache un condensé de ces 30 dernière années, bien ancré dans aujourd’hui et un oeil vers demain. Entre Black Sabbath, Jay Dilla et Joy Division, on pourra rajouter The Cure et Black Flag, bref rien que de l’essentiel.