Déjà un 3ème album pour Made Out of Babies qui semble désormais faire partie des meubles de la scène noise rock, le groupe s’étant creusé une place de choix parmi les groupes triturant le binaire à partir de leurs névroses, maniant la rudesse de la saturation dans une approche directe et instinctive. Au départ repérés par Neurot Records, le label des membres de Neurosis, désormais sur The End, autre révélateur de talents, le groupe avait marqué direct avec Trophy, un premier album vivifiant et aventureux, sachant faire leur place aux mélodies tout en ne lésinant pas sur le piquant, paradoxe développé par la voix tour à tout terrifiante et fluette de Julie Christmas, officiant comme catalyseur d’émotions du rock abrasif des 3 solides gaillards formant le classique power trio noise rock qui l’entoure.
Le 2ème album du groupe, Coward, sorti dans la foulée, avait un peu déçu, la surprise étant moins nette, et en même temps le propos moins efficace. Cela dit ce 2ème album n’était pas à proprement parler une déception même si le groupe se contentait de rester sur ses acquis et de proposer la même recette sur 10 titres composés un peu plus dans la hâte.
Ce 3ème album tout de suite présente un aspect plus travaillé, que ce soit au niveau des compositions ou du traitement des sons eux-mêmes. On sent que le groupe a passé plus de temps en studio à le peaufiner. La guitare en particulier utilise des sons très variés, passant par une profusion d’effets, on pourrait d’ailleurs se dire que certains morceaux risquent de pâtir en live de la présence d’une seule guitare ne pouvant reproduire la richesse de certains arrangements… mais en fait l’interprétation n’en est que plus musclée et directe. D’ailleurs, c’est la basse qui pose l’assise des morceaux, claquante et saturée, assurant une solide paire avec un batteur incisif, sur laquelle les guitares comme les voix se superposent en plusieurs couches, Christmas alternant entre plusieurs lignes mélodiques, ou doublant parfois une voix chantée avec des cris.
Le sonorités étranges dont je parlais se découvrent dès le premier morceau, « Cooker » débutant par des bruits sûrement issus de tapotements sur le manche de guitare, vite poursuivis par la voix passée au vocoder de Christmas qui se prolonge en un cri rageur. L’ambiance est posée, et pas vraiment apaisée par rapport aux 2 précédents albums du groupe. Made Out of Babies reste un groupe bruyant et sur le fil du rasoir même si les morceaux possèdent toujours un format rock classique et certains titres en arrivent même à être quasiment « catchy », en témoigne le refrain poignant de « Invisible Ink ».
Le groupe sait également envoyer à la face de l’auditeur un vrai mur du son tel le dernier morceau de l’album « How to Get Bigger », qui est assurément le plus agressif. Il présente leur facette la plus démente, assomme avec un gros son quasiment sludge, et une voix plus écorchée que jamais, pour finir en beauté sur une mélodie de voix mélancolique au possible. Last but not least.
Toutes les compos ont leur intérêt, il n’y a pas de vraie baisse de régime, même si je trouve que la majorité d’entre eux reposent principalement sur la voix et sans elles paraîtraient plus banales. Julie Christmas réalise un sans faute au niveau des mélodies de voix, toujours bien trouvées, qui amplifient le côté épique de certains refrains. Peu de chanteuses ont décidément ce tempérament, et cette rage sourde qui transparaît quelque soit le registre. On retrouve sa voix caractéristique de gamine capricieuse, à la manière de ces mignonnes gamines qui se révèlent possédées par le malin, thème récurrent des films d’horreur, que Christmas appuie avec un look charmeur mais sombre adéquat et des prestations scéniques habitées.
Beau retour donc pour Made Out of Babies, la cohésion et la qualité de l’ensemble de ce The Ruiner me laisse à penser que c’est peut-être leur meilleur album, un indispensable donc pour ce qui connaissent déjà le groupe et une découverte à tenter pour les aventureux.
- cooker
- grimace
- invisible ink
- the major
- buffalo
- bunny boots
- stranger
- peew
- how to get bigger
3ème album qui sonne comme un aboutissement, les directions empruntées dans les deux albums précédents étant ici poussées plus loin, plus fort, moins « complexé »…Christmas représente bien cette progression puisqu’elle chante mieux que jamais, ose des choses et les réussis à tous les coups ! Musicalement c’est excellent là aussi, bien qu’il est indéniable que c’est la donzelle qui pousse le groupe vers le haut. Un album imparable, puissant et mémorable, leur meilleur c’est une certitude pour ma part.
tiens, le sujet de la pochette est un peu pompé sur le « Our Love To Admire » d’Interpol…
Tout à fait d’accord avec ta chro Jonben.
Vraiment un album très aboutit. Julie Christmas tient toutes les compos de A à Z et rien n’est à jeter.
Petit coup de coeur pour le break en ternaire de « The Major ».
Tout à fait d’accord avec la chronique et vos commentaires, superbe album, vraiment plus abouti que les 2 précédents au demeurant excellent. Petit regret pour ma part sur la pesta live à paris un peu en dessous de leur precedente venue au batafar (la faute au son du club???)
Et c’est vrai que la cover est dans le même esprit que celle d’interpol, ca m’a frappé aussi.
Me permettrai-je de dire qu’au vu de la qualité de l’album, on peut raisonnablement se moquer complètement de la similitude avec l’artwork de Interpol? Oui.
Je ne connaissais pas ce groupe jusqu’a ce que je lise la chronique et bon comment dire c’est ENORME, Julie au chant est une pure merveille niveau musical c’est excellent la basse sur Bunny Boots est assez exceptionnel je suis devenu totalement fan