Derrière cette jolie cover se cache Syberia, groupe barcelonais de post-rock/metal instrumental dont la trajectoire apparaît comme idéale. Ayant sorti un EP puis un premier album (Drawing A Future) en 2012, les espagnols ont ensuite atterri chez Debemur Morti Productions pour leur second (Resiliency – 2016), trois ans plus tard c’est cette fois chez la grosse écurie Metal Blade que sort ce Seeds Of Change. Le label de nombreux groupes de metal traditionnel (mais aussi de Cult Of Luna, autre groupe dans le créneau) sort donc cette nouvelle histoire sans parole, Syberia y démontrant encore une fois sa faculté à agripper l’oreille de l’auditeur sans qu’il ne puisse plus lâcher l’écoute.

Car Syberia possède une qualité d’écriture plutôt impressionnante, sachant souvent donner à son post-rock un dynamisme et une puissance justifiant l’appellation post-metal. Et devant des bataillons de groupes du genre qui réalisent des albums sympathiques mais sur lesquels on a du mal à revenir, le groupe espagnol a un goût de reviens-y peu commun. Ceci grâce à deux guitaristes particulièrement virtuoses, distillant des mélodies très souvent épiques tandis que le batteur sait se montrer incisif malgré les apparences de calme inhérentes au genre pratiqué.

« Empire Of Oppression » puis surtout l’euphorisant « Rogue Hunt » donnent un départ tonitruant à ce Seeds Of Change. Tempo variable se suivant agréablement, tricotage de notes hypnotique mais surtout des mélodies ultra prenantes évoquant de multiples couleurs et images à l’auditeur (surtout le second à l’aspect cinématographique qui correspondrait totalement à une mise en scène de la cover). « Beirut » puis l’interlude « 26 Days » calment un peu le jeu en renforçant l’aspect atmosphérico-émotionnel avant que « After The Uprising » ne remette un peu plus d’énergie grâce à une batterie quasi tribale accompagnant un envoûtant mur sonore.

Après un « Daring Ignorance » plus délicat (vraisemblablement leur titre le plus post-rock), le morceau-titre évolue entre son intro inquiétante avant de faire se succéder différentes textures de guitare, tantôt bien musclées, tantôt plus douces. Enfin, après un nouveau court interlude, « Shigir » termine cet album en un gros pavé de plus de dix minutes où Syberia alterne phases méditatives et passages un peu plus tendus pour une ultime hypnose permettant à l’auditeur de retrouver la terre ferme en douceur.

Syberia propose au final avec ce Seeds Of Change un superbe voyage sensoriel se destinant à tout amateur de Russian Circles, Sleepmakeswaves ou If These Trees Could Talk. Des similitudes mais jamais de plagiat ici, le groupe espagnol traçant sa route dans son univers personnel, entre délicatesse et emphase. Magnifique.