Alors que vous êtes toujours en pleine digestion du repas de Noël chez Mamie et qu’un maximum de nos confrères a déjà constitué leurs tops 2021 (les nôtres arriveront en début d’année – le temps qu’on digère aussi tout ce qui est sorti fin 2021, pas comme tous ces pressés !), rien de tel qu’un petit bond dans le temps pour se sortir les oreilles de cette torpeur ! Non pas pour se souvenir de ce temps pas si lointain où vous deviez remplir une attestation pour aller acheter votre baguette mais de ce que vous auriez pu avoir dans les oreilles sur le chemin de votre boulangerie préférée. Retour sur quelques albums (re)découverts sur le tard.
Belted Sweater – I’m Fucking Delightful (screamo/chiptune – Terrible Records)
On démarre avec le projet d’un certain Christopher Patrick Gregory (qui n’est qu’une seule personne et non trois), Belted Sweater se décrit ainsi: comme si “Henry Rollins faisait partie de Pet Shop Boys mais avec une vraie batterie et des paroles encore plus gays, racontant de gênants dates Grindr”. I’m Fucking Delightful promet donc du décalé et se montre particulièrement addictif dans son mix de screamo (avec voix criée/saturée en arrière-plan) et d’electro/synthpop avec quelques réminiscences de nintendocore. Un peu comme si Genghis Tron première époque et iamerror s’étaient lancés dans les années 80. Un album passé inaperçu qui mérite qu’on s’y attarde !
Second To Sun – Leviathan (post-black metal – autoproduction)
Prenons la direction de l’est maintenant avec les russes de Second To Sun, prolifique projet débuté comme du true black célébrant la Norvège (avec même des titres en norvégien) et ayant peu à peu glissé dans quelque chose de plus massif. Leviathan, leur huitième album officiel (sans compter leurs multiples EP et singles), est une magistrale claque de black atmosphérique côtoyant à de nombreuses reprises le post-metal au niveau des harmonies particulièrement hypnotiques. Malgré certains titres bien monolithiques, pas une once d’ennui ne s’amène tant les russes savent gérer leurs ambiances autant que la constante agression les accompagnant. A noter que l’on retrouve ici les frères Sysoev aussi actifs chez les excellents Grima (dont Rotten Garden, leur très bon dernier album en date, est sorti en début d’année).
L’Oceano Sopra – Kéreon (screamo – Non Ti Seguo Records/Fresh Outbreak)
Dans la grande tradition du screamo italien, voici la seconde livraison des milanais de L’Oceano Sopra. Kéréon (rien à voir avec le comique vu dans Bref) nous gratifie de cinq titres aussi denses que rageurs mais non dénués de mélancolie. La production est musclée (pour ne pas dire métallique) mais les émotions à vif se rapprochent aisément de compatriotes tels que Raein ou La Quiete (le fait que le chant soit dans leur langue natale doit y être pour quelque chose). Cinq titres prenants et aux dynamiques variées (entre retenue et lâchage de chiens) donnant fortement envie d’y revenir, on va tâcher de garder un oeil ouvert sur cet “Océan au-dessus”.
Sleepmakeswaves – These Are Not Your Dreams (post-rock – Bird’s Robe Records)
Sorti d’abord sous forme de trois EP distincts, The Are Not Your Dreams est la première sortie de Sleepmakeswaves sous forme de trio. Les australiens ont en effet connu quelques changements dans leur line-up, ce qui ne les a pas empêchés de sortir un nouvel album qui leur ressemble. Le post rock du groupe se pare de multiples dynamiques, parfois très musclées comme sur les deux premiers morceaux (celui d’ouverture surprenant par ses embardées quasi post-black metal), parfois plus porté sur la sensibilité et la délicatesse (le somptueux “Cascades” qui possède d’ailleurs du chant tout à fait apaisant lui aussi), une alliance idéale pour se laisser porter à l’intérieur d’une bulle de relaxation.
Undergang – Aldrig I livet (death metal – Dark Descent Records)
Du sang, du sang et encore plus de sang ! Les danois d’Undergang ont sorti ici leur cinquième album en n’oubliant pas d’utiliser leur mallette de boucher afin de nous découper là un nombre conséquent de morceaux de barbaque bien putréfiée, suintant et lâchant d’immondes effluves dont ils se délectent tant. Une demi-heure de death metal dégueu mais ultra addictif grâce à une versatilité allant du gore (on s’en serait douté, les lyrics dans leur langue natale parlant autant de cadavres abusés sexuellement que d’infections diverses) au lugubre en passant par de nombreuses phases carrément épiques évoquant presque du crust. Une invitation à la torture la plus sauvage qui donnerait presque envie de s’armer d’un hachoir pour aller s’amuser avec eux !
Seahaven – Halo Of Hurt (emo/punk – Pure Noise Records)
Retour en grâce pour Seahaven, groupe ayant disparu des radars après Reverie Lagoon:Music For Escapism (qui ne m’avait pas tellement convaincu à l’époque). Pour son troisième album (son premier chez Pure Noise), la bande à Kyle Soto n’a pas perdu de sa faculté à envoyer de l’émotion (parfois larmoyante) tout en délaissant cet aspect un peu naïf qui transparaissait auparavant. Prenant parfois des airs de vieux Thrice, la musique du groupe se pare de mélodies enivrantes, qu’elles jouent sur la mélancolie fragile (souvent) ou sur des moments plus dynamiques.
Neaera – Neaera (mélodeath/metalcore – Metal Blade Records)
Encore un retour de nulle part ! Neaera, c’est ce groupe allemand qui au début des années 2000 marchait dans le sillage des mastodontes que sont Heaven Shall Burn ou Caliban sans parvenir à atteindre leur popularité. Pourtant avec leur mixture de death mélodique et de metalcore, le groupe de Münster avait trouvé sa recette, certes très balisée, mais souvent très efficace… mais s’est finalement mis en pause. Réactivé après quelques années de silence, cet album éponyme nous ramène un Neaera fidèle à ce son signature, fait de riffs déroulant tranquilou tandis que le duel de voix se montre toujours aussi ravageur. Rien de nouveau sous le soleil donc, un album dont on peut se lasser mais qui fait le boulot si vous êtes dans l’humeur !
Unburnt – Procession (sludge metal – autoproduction)
Après deux EPs, les alsaciens d’Unburnt ont sorti en 2020 leur premier album. Procession nous mène dans une obscurité quasi totale grâce à des riffs post metal empruntés à Cult Of Luna ou The Ocean, toutefois des éclairs lumineux le parsèment, histoire de renouveler le pouvoir émotionnel de ces compos. Une atmosphère teintée de mystère et d’ésotérisme, des passages plus impactants pouvant rappeler Gojira, un chant multicarte allant de râles bien rauques à des vocalises clean sachant se montrer prenantes, bref une vision personnelle très intéressante du post/sludge metal pour un album bien massif. Une très solide découverte.
Floral – Floral LP (instrumental/math-rock – autoproduction)
Floral est un duo californien jouant un math-rock très inspiré, aux rythmiques plutôt complexes et aux avalanches de notes enivrantes. La guitare et la batterie se répondent au millimètre près au travers de flots mélodiques se succédant sans accroc dans un mélange d’euphorie et de nostalgie (mention à “Ebullient” qui viendrait presque nous arracher une larmichette). Amateurs de Covet, Tera Melos et autres You Slut! voilà de quoi prendre votre pied dans ces étourdissantes montagnes russes !
Ifernach – The Green Enchanted Forest Of The Druid Wizard (black metal – Tour de Garde)
Actif depuis 2015, Finian Patraic, seule âme à bord du vaisseau Ifernach multiplie les sorties sous forme d’EP, de splits (notamment un avec Pan-Amerikan Native Front, autre fervent défenseur de la culture tribale des natifs américains dans ses lyrics) et d’albums. The Green Enchanted Forest Of The Druid Wizard apparaît comme un nouveau départ pour le québécois qui nous gratifie d’un black metal à l’atmosphère unique, aux ambiances forestières teintées de magie (mais sans artifice) comme le justifie son titre. Les mélodies épiques apparaissent ici plus marquées par rapport à ses débuts et deviennent ainsi marquantes. Une créativité à toute épreuve pour un nom venant de la Belle Province plus que jamais à surveiller. Somptueux !
Allez, on se retrouve bientôt pour une sélection 2021 !