Avec The Return of Magik, Rwake signe un retour inespéré, leur précédent album, Rest, datant de 2011. Une très bonne nouvelle pour les fans, dont je fais partie, et précisons tout de suite que ce nouvel opus confirme une fois encore la capacité du groupe à marier sludge metal, éléments progressifs et psychédélisme dans une expérience puissante et immersive. Si le titre peut sembler présomptueux, il traduit surtout l’assurance du groupe quant à la force de sa musique. Pour les amateurs, c’est bel et bien un retour enthousiasmant, voire magique.
Originaire du sud marécageux des États-Unis, Rwake évolue dans ce genre hybride et lourd qu’est le sludge. Acid Bath ou Eyehategod sont d’autres figures emblématiques que je placerais volontiers sur un podium aux côtés de Rwake, ce dernier ayant réussi à se créer une identité à part. En effet, Rwake est probablement le groupe le plus progressif de la scène sludge, même si l’ambiance pesante, les riffs acérés et le son massif les inscrivent définitivement dans cette branche lente et misérabiliste du metal/hardcore. Le groupe possède désormais une discographie solide, enrichie par la réédition en 2015 chez Relapse Records de leur démo de 1998, Xenoglossalgia: The Last Stage of Awareness. Si leurs deux premiers albums méritent largement l’écoute également, c’est surtout leur troisième opus, le grandiose Voices of Omens (2007), qui constitue leur pièce maîtresse. Pour être honnête, l’album suivant, Rest, m’avait déçu, et avec The Return of Magik, le groupe redresse nettement la barre.
Ils sont bien de retour, emmenés par un chant halluciné et incantatoire porté par des riffs au groove massif. La dualité vocale, assurée par Chris Terry et Brittany Fugate (qui assure également les claviers), apporte une intensité viscérale essentielle à l’identité sonore du groupe. Tandis que Terry livre une performance rauque et puissante en frontman shamanique habité, Fugate ponctue les morceaux de ses cris perçants, ajoutant une dimension torturée à l’ensemble.
Cette aura mystique imprègne tout l’album, notamment sur le très progressif « Distant Constellations and the Psychedelic Incarceration », débutant par une longue séquence acoustique, de plus de 5 minutes et très réussie, avant d’évoluer vers un son lourd et hypnotique. Rwake maîtrise parfaitement ces longues compositions (entre 8 et 14 minutes chacune), naviguant aisément entre ambiances acoustiques, folk psychédélique façon bayou, et riffs sludge d’une lourdeur assumée. On pourra ainsi les comparer avec un autre groupe unique, Yob, tout aussi amateur de longs morceaux évolutifs.
Le morceau d’ouverture, « You Swore We’d Always Be Together », illustre parfaitement cette approche, passant subtilement d’une intro acoustique à une explosion de riffs imposants, accompagnés de solos de guitare finement travaillés. La piste éponyme, « The Return of Magik », se distingue par une succession de riffs marquants, une batterie riche en roulements de toms, et une intensité vocale rappelant les grandes heures du sludge ; un véritable maelstrom viscéral qui retombe pourtant sur des riffs atmosphériques équilibrés par des solos mélodiques. La marque de fabrique du groupe, sa capacité à captiver grâce à des compositions progressives complexes, est particulièrement mise en avant dans ces cinq nouveaux titres.
En définitive, The Return of Magik est un album emblématique du meilleur de Rwake et restera certainement un de mes albums de l’année. Il confirme leur statut incontournable au sein de la scène sludge metal, tout en ouvrant des perspectives prometteuses pour la suite.