La pauvreté générale de la fournée metal extrême 2010 est jusque là si confondante que je ne voyais pas le prémisse du salut venir d’un album estampillable new school. Odem Arcarum ne sont pourtant pas des perdreaux du matin, leur nom résonnant à travers les montagnes de Bavière depuis plus de 15 ans, et leur précédent (et seul) album datant de 2004. S’ils tentent aujourd’hui d’éclore à nouveau, c’est en grande partie parce que leur leader Lord Arioch a entre-temps déserté la coquille pour partir emmagasiner du savoir-faire et des idées auprès de formation plus capées : Negura Bunget (et leur nouvelle bretelle Dordeduh), puis Secrets of the Moon, dont il est du reste le guitariste attitré désormais. De ses voyages, Arioch est revenu avec de quoi enrichir considérablement le bagage identitaire d’Odem Arcarum, dont le black metal à ambiances était, selon la formule consacrée, bien mais pas top. Un rien stéréotypé, en fait. A l’écoute du résultat, rien d’ahurissant à ce qu’Osmose Productions leur ait donné une chance.
Deux choses frappent lors d’une première écoute – laquelle, j’aime autant mettre les i sous les points, sera loin d’être suffisante pour pénétrer la moelle de l’album. Tout d’abord le soin apporté à l’enveloppe sonore, qui trahit en soi un besoin de relief, et laisse espérer que ce relief sera rempli par de la matière brute et non un silicone de synthèse. Pour quiconque aura eu l’occasion de poser une oreille sur le mignon mais fruste Bloody Traces in the Virgin Snow, c’est comme si le groupe avait upgradé son système d’exploitation de plusieurs générations. Or cette production opulente se justifie totalement par la quantité de logiciels à faire tourner. C’est la deuxième chose qui frappe : la variété des compositions, qui bave généreusement hors du couloir généralement prescrit à un album de black metal, même un peu symphonique, même un peu enclin aux caprices progressifs. Outrageous Reverie above the Erosion of Barren Earth n’a pourtant rien d’un album tentaculaire, surchargé et/ou décousu, il s’appréhende de gauche à droite comme toute bonne odyssée, et comme toute bonne odyssée il est truffé de rebondissements et de changements d’état, amenés par des transitions plus ou moins balisées selon les circonstances.
Tout cela est très bien, mais pourrait facilement ne servir à rien si le plus important n’était pas assuré : donner une âme à cette architecture, faire palpiter l’ambition, la rendre utile tout simplement. Les exemples ne manquent pas d’aventures semblables, hâtivement couronnées de louanges, qui se sont terminées en masse dans les bacs à soldes. Un tel destin devrait être épargné à Odem Arcarum, qui ont pris le soin de s’imposer un haut niveau d’exigence en matière de trame narrative, faisant coexister, dans le goût et l’équilibre, action soutenue et univers mythologique réalisé. Synthèse : ça avoine sans temps mort et on s’y croit bien chanmé. Au vu des tentations pléthoriques de cette musique, son rendu général très organique se savoure. Le groupe ne s’autorise que de discrètes présences électroniques qui saupoudrent un peu de singularité et rappellent non sans intelligence que l’auditeur évolue en terrain “extraterrestre”, au sens métaphysique.
De toute évidence, il s’agit aussi de composer avec quelques dépressions dans la courbe d’efficacité du scénario. Pour une première intrusion à ce niveau de création, le contraire serait presque suspect, d’autant que les morceaux sont aussi longs qu’ils sont vastes. Mais Odem Arcarum parviennent globalement à maintenir la pression et à ne jamais écrouler le maul, pour faire dans la métaphore ovale. En toute honnêteté, les avatars post-impériaux d’Ihsahn, pour rester dans un registre proche, sont largement plus fournis en approximations et bien moins absorbants que ce nouveau départ qui appellera au moins une arrivée. Car l’eau est désormais bien montée en bouche.
http://www.odem-arcarum.de/
http://www.myspace.com/odemarcarum666
- gate
- oceans
- worlds of barren land
- loss
- hell & revelation
- the body & perpetual imagination
- a darker kind of dreaming
Très bon en effet! J’y vois aussi un petit côté Drautran sur certaines accélérations bien senties…
« En toute honnêteté, les avatars post-impériaux d’Ihsahn, pour rester dans un registre proche, sont largement plus fournis en approximations et bien moins absorbants que ce nouveau départ… » Je crois rêver!!! ARGGG!!! Eh eh eh eh eh, j’ai posé un contrat sur ta tête Matt ;-)