A Tokyo aussi la Masquerade infernale a lieu mais aucun norvégien n’a été convié. Une trompette, trois trombones, des flûtes et des instruments de tout vent, des violons… Mirai Kawashima a réalisé le rêve qu’il caressait depuis les débuts de Sigh en invitant une partie d’un orchestre à interpréter la musique qu’il composait auparavant sur un synthétiseur. L’ampleur de la folie qu’il a toujours désirée prend enfin vie et son public de s’en enthousiasmer.
Hangman’s hymn se propulsait toutes notes dehors à l’attaque du black metal symphonique d’Emperor avec réussite mais l’heure de la deuxième manche a sonné pour Mirai et ses compagnons. Car avant de composer ce qu’il est permis de qualifier de nouvel opus, Sigh édita à petit tirage un vinyle de reprise du Black Metal de Venom. Or, si l’influence d’un groupe de metal est bien présente, c’est celle de celui-ci et ses riffs entre punk et NWBHM, bien qu’ici doublés par le talent d’un orchestre qui ne fait pas que calquer le S & M de Metallica en suivant les guitares. Mirai disait trouver plus de plaisir à composer pour des orchestres et il n’y a pas matière à douter, le bonhomme prend son pied.
Sous ce déluge d’instruments à cordes et à vent il annonce l’apocalypse en dansant au rythme de cette composition baroque. Le black metal des débuts est toujours là mais l’imagination a trouvé une direction plus précise. Il ne faut donc pas s’attendre à retomber dans le psychédélisme d’Imaginary soniscapes ou le bazar du bizarre d’Hail Horror Hail. Scenes from Hell croise les mélodies de Gallows gallery à l’approche épique et frontale d’Hangman’s hymn, le tout enrichi de l’arsenal détaillé plus haut (et même de la participation de Kam Lee de Mantas, Massacre et The Grotesquery, et de David Tibet de Current 93).
Pour son huitième album, Sigh a vu grand et a eu raison. Scenes from Hell, a n’en pas douter sous cette couverture superbe montrant le chef d’orchestre en plein tango avec son égérie, le Dr Mikannibal (chant et tout type de saxophone), est son volume le plus ambitieux et aussi l’un des plus aboutis. Si le monde doit partir en fumée, alors il pourra le faire satisfait d’avoir abrité le génie de ce japonais qui rend ici un superbe hommage à sa propre plongée dans la folie. Majesté et grandiloquence.
Sigh a déjà habitué son public à autant d’excès et se prépare à conquérir tous ceux qui doutaient encore ou ne soupçonnaient même pas son existence. De tous les disques de black metal qui ont menacé de mêler la musique classique aux guitares, Scenes from Hell est l’un des plus fantastiques et des plus aboutis. Sigh pourrait partir en paix, fier de son héritage, avec un tel monument mais c’est plutôt un nouveau départ et, à n’en pas douter, Mirai Kawashima a encore plus d’un tour dans son sac.
- prelude to the oracle
- l’art de mourir
- the soul grave
- the red funeral
- the summer funeral
- musica in tempora belli
- vanitas
- scenes from hell