Après nous avoir gratifié d’artworks morbides mais laissant faire l’imagination sur Purge (2014) puis sur Pourrissoir (2017), Fange passe au concret avec celui de Punir, qu’on pourrait qualifier de « mort-bide » cette fois. La représentation de ce gars décapité s’étant lui-même éviscéré repousse autant qu’il intrigue. Et si avec ce gros indice graphique, on s’attendait à ce que les limites audibles soient à nouveau repoussées, Fange surprend avec sa nouvelle approche…
Si la tendance est toujours au sludge malade, Fange renouvelle sa recette en affinant sa production. Dès « Ceinturon », on remarque le côté plus « confortable » de l’écoute, même si le malaise est toujours présent grâce à cette sensation « limaille de fer » qui sortent des amplis, ces râles malades de Matthias Jungbluth ainsi que cet enrobage noise/indus plus ou moins discret. Ce premier titre évoque un bâtard de death et de crust pris dans un écrin sludge putride, mais paradoxalement facile d’accès. Ainsi il ne sera pas rare sur Punir de parfois trouver des mélodies vraiment plus franches.
Plus accessible mais non moins sauvage et habité, Fange conserve cette effroyable fureur, déversée comme il l’entend, à coups lourds et pesants comme avec des accélérations assassines. Les bretons ont décidé de jouer avec les nerfs des auditeurs, déversant des méandres de viscères et de boue à la suite d’introductions étonnamment mélodiques (« Les Boyaux de la Princesse » ou « Second Soleil » étant les meilleurs exemples de bascule complète vers l’horreur).
Puis il y a le goût du groupe pour ces séquences harsh noise/bruitistes vrillant les oreilles, torturant le cerveau pour nous aider à sombrer dans la (leur) démence. « Opinel » puis « Maintien de L’Ordre » sont donc de courtes mais douloureuses séquences où Benjamin Moreau prend les choses en main, bien décidé à nous faire souffrir en allant gratter nos conduits auditifs avec une perceuse dont la vis rouillée aurait été récupérée dans les fourneaux d’une usine sidérurgique.
La punition est donc subie sans entrave, l’entrée dans cet album se faisant plus « agréablement » avant cette oppression qui guette. Fange montre à nouveau qu’il sait y faire pour rendre l’atmosphère irrespirable et mener à bien son conglomérat de maladies mentales, de brutalité insidieuse et de boyaux fraîchement extraits. Un groupe toujours à part nous délivrant là un nouveau carnage halluciné, mais jusqu’où iront-ils ?
- Ceinturon
- Chien de Sang
- Les Boyaux De La Princesse
- Opinel
- Il Reconnaîtra Les Siens
- Maintien De L’Ordre
- Second Soleil