Ne seriez-vous pas, vous aussi, passé à côté de ce deuxième album des américains de Crippling Acoholism sorti pourtant le 29 février dernier? Il serait pourtant dommage de penser l’année cloturée sans avoir écouté ce petit bijou qu’il est encore temps de faire figurer en bonne place dans le top annuel.
Derrière cet artwork énigmatique mais assez terrifiant, se cache un album qui ne sera pas facile à décrire, en tout cas si l’on tente de le faire entrer dans des cases « classiques », puisque Crippling Alcoholism apparaît clairement comme tout sauf un groupe classique. Entre noise-rock de caniveau et goth de back-room enfumé en plein Pigalle ou l’inverse, la musique de Crippling Alcoholism, conformément au nom du groupe qui nous vient de Boston, crée un certain malaise, semble même mettre en musique le désespoir le plus intense, mais se révèle pourtant en même temps étonnamment addictive. Les vocaux du chanteur Tony Castrato sont sans aucun doute ce que l’on remarque le plus rapidement, qu’ils se fassent susurrés de façon obscène et distante sur le par ailleurs très mélodieux « Lipstick with no Lips » (le titre suffit à susciter un certain effroi) ou qu’ils soient scandés de façon plus agressive (« Ottessa ») et cela sans même encore parler des lyrics (« I’m shit and I’ll always be shit » ; « it’s fine cause I hate my fucking human body » ; « they guys they killed you cause I paid them to »…). Un style vocal qui évoque à la fois Tom Waits, The Drones, Planes Mistaken for Stars, Daughters voire même Chat Pile, tout en restant assez particulier conférant au groupe et à son chanteur donc, une sacrée personnalité/identité. De celles qui marquent!
Et puis, à côté des guitares parfois dissonnantes (à la Daughters là aussi), il y a ces synthés (au hasard écoutez « Satan is the One ») qui leur valent des comparaisons (très paresseuses quand même car vraiment simplistes) avec Type O’ Negative, et qui donnent ce côté un peu goth à leur musique, un peu comme un Hangman’s Chair plus glauque que triste, plus noisy aussi. Le tempo et le ton, déjà plutôt lents ou mid-tempo at best (et même un peu plus excité par saccades sur le final de « Mob Dad »), se font aussi parfois encore plus traînants, presque lancinants, un peu à la manière d’un True Widow (cf « Sav »).
Bref il faut l’entendre pour bien comprendre comment ce mélange peut aboutir à créer une telle atmosphère. Et malgré une durée très conséquente d’une heure, une fois l’album démarré, on plonge tête la première dans ce maelstrom de dépression, de tristesse et de… beauté oui car les mélodies sont souvent superbes (« Lips with no Lips », ou la superbe première partie de « Rough Sleepers ») et vont, je vous le garantis, vous rentrer dans le crâne pour un bout de temps…
Pas de doute, on tient avec With Love from a Padded Room quelque chose de fort et dont on devrait entendre beaucoup plus parler, au moins autant que Chat Pile par exemple. Car si ces derniers arrivent à créer quelque chose de très singulier et méritent la reconnaissance qu’ils commencent à obtenir, on ne peut s’empêcher de penser que Crippling Alcoholism le mérite également, car la suite de leurs aventures pourrait être grandiose. A l’image de ce deuxième album ensorcelant!
Tracklist :
01. I’ll Pay More If You Let Me Watch (04:26)
02. Red Looks Good On Him (04:45)
03. Lipstick with no Lips (05:26)
04. Ottessa (04:56)
05. Liquid Jesus (04:44)
06. Evil has a Babyface (04:48)
07. Sav (03:37)
08. Rough Sleepers (06:45)
09. Featherweight Kid (03:57)
10. Satan is the One (04:51)
11. Templeton (04:34)
12. Mob Dad (07:43)