Alors pour celui-là l’affaire va être simple… Autant Gore m’avait posé quelques soucis, au point que j’avais du multiplier les écoutes avant de commencer à l’aimer (pour finir par l’adorer, comme presque tous les albums des californiens), autant Ohms m’a littéralement aspiré dès la première écoute pour ne plus me lâcher.
Une fois n’est pas coutume, parlons tout d’abord de la production, car elle est absolument phénoménale. Ohms marque en effet le retour de Terry Date aux manettes, lui qui avait déjà produit les 4 premiers albums du groupe. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ce nouvel album bénéficie vraiment de tout le savoir-faire de ce vétéran (64 ans) des potards. Le son est énorme, et ce qui est particulièrement appréciable et notable, c’est qu’il arrive à mettre en valeur de façon quasi égale l’ensemble des instruments, et en particulier la basse de Sergio Vega qui est parfaitement audible (écoutez donc « Ceremony » à titre d’exemple), ce qui, on le sait, est souvent loin d’être une évidence dans la production d’un groupe de metal, la basse étant souvent la 5ème roue du carrosse.
Ce gros son permet aussi de valoriser l’énorme impact des synthés de Frank Delgado, qu’on a peut-être jamais trouvés aussi présents et bien intégrés à la musique du groupe. Son synthé est en effet acteur de la grande majorité des titres de l’album, de façon discrète parfois, ou carrément au premier plan (« Pompeji »), contribuant pour beaucoup à l’ambiance froide et ultra mélancolique que le groupe continue sans surprise à distiller, accentuant encore sa trajectoire déjà amorcée par le passé. Mais, alors qu’on aurait pu penser que cette grande présence des synthés se ferait aux détriments de la guitare de Stephen Carpenter, on s’aperçoit dès « Genesis » qu’il n’en sera rien. Car si c’est effectivement bel et bien le synthé qui ouvre l’album, la gratte de Carpenter ne met pas longtemps à débarquer et c’est simplement une chape de plomb de 300 tonnes qu’on se ramasse sur la tronche… Et ce ne sera que le début. A la différence de Gore où le titre d’ouverture était probablement le plus faible, les californiens ont cette fois pris soin de soigner cette ouverture comme ils le faisaient autrefois. Puisqu’on en parle, on s’en souvient, Gore avait été un album compliqué pour Stephen, et il avait eu des difficultés à se sentir chez lui et à faire exister ses riffs dans une musique poussant de plus en plus la mélodie et les sons synthétiques en avant. On sent que cette fois l’équilibre parfait a été trouvé sur Ohms. Carpenter réussit à être très présent, à nous balancer ses riffs mammouthesques à gogo, et à rendre l’album très musculeux, et à la fois très mélodique. C’est un véritable tour de force que réussit encore une fois le groupe de Moreno, qui réussit à rendre l’album à la fois très metal mais aussi très ambiancé, atmosphérique par moments, même si finalement cette facette du groupe existe aussi depuis les débuts du groupe.
Le son, l’équilibre entre les protagonistes, les riffs, le synthé, la voix de Moreno dont on n’a pas parlé mais qui est toujours aussi parfaite (et l’on soulignera au passage que Chino lâche un peu plus de cris que sur Gore, cf par exemple « Error » ou le monstrueux « This Link is Dead », ce qui n’est pas pour nous déplaire), mais aussi encore et toujours la batterie de l’énorme Cunningham, l’osmose au sein du groupe semble être à son paroxysme, d’autant que l’album ne fait appel à aucun invité. Et cela se ressent également sur les 10 compositions de l’album parmi lesquelles on aura bien du mal à trouver quoi que ce soit à jeter ou à redire. Dès le démarrage on est emporté dans l’univers des californiens, et on ne touchera terre qu’à la fin du morceau titre « Ohms ». Entre ces deux moments, on aura particulièrement vibré sur la deuxième moitié de l’album et plus particulièrement encore à partir du fabuleux « This Link is Dead ». L’album, déjà énorme jusque-là devient alors en effet carrément mythique.
Outre le synthé qui occupe désormais une grande place dans la musique du groupe, on remarque aussi que les américains se sont aussi ouverts à de nouvelles petites nouveautés sonores, comme ces claquements de doigts sur « The Spell of Mathematics » ou ces oiseaux qu’on entend sur « Pompeji ». Pas que ces éléments apportent quelque chose de particulièrement fou, mais ils montrent que le groupe se sent à l’aise d’expérimenter et ne s’interdit rien.
On aurait éventuellement pu trouver à redire sur la pochette, très spéciale et minimaliste, mais il s’avère qu’elle colle au final parfaitement avec l’orientation plus froide et mélancolique que jamais, de la musique des californiens.
Difficile donc de ne pas s’extasier simplement et aller à l’évidence : Deftones a encore accouché d’un grand album évidemment. Sauf que ce grand album-là pourrait cette fois finir dans le top 3 des tous meilleurs albums du groupe et qui sait peut-être même en haut du podium… Le temps le confirmera ou pas, mais pour le moment les écoutes se multiplient et l’enthousiasme ne s’étiole pas… 2020 a déjà balancé son lot de grands albums, mais il va être difficile de ravir la première place du podium à ce nouveau chef d’œuvre des américains. Décidément très très fort…
Tracklist :
01 – Genesis
02 – Ceremony
03 – Urantia
04 – Error
05 – The Spell of Mathematics
06 – Pompeji
07 – This Link is Dead
08 – Radiant City
09 – Headless
10 – Ohms