L’unique album de The Postman Syndrome, Terraformer, a profondément marqué toute ma vision de la musique (rien que ça!) lors de sa sortie en 2002, et reste un des albums que j’ai le plus écouté. Bercés de multiples influences, mélangeant prog, emo, hardcore, death, les 5 membres du groupe, dont 3 guitaristes/chanteurs, réussirent à créer cet album en forme de relique d’un rock/metal/hardcore unique, plein de feeling , entre énergie punk et complexité progressive, quasiment parfait jusque dans ses paroles, l’album entier formant un récit aux dialogues assurés par les 3 voix différentes.
Le maintien dans l’obscurité de ce groupe admirable m’a toujours semblé une aberration, leur parcours chaotique et le peu d’intérêt des labels en étant la cause évidente. Peu après la sortie de ce premier album, The Postman Syndrome subit la faillite de leur label Now Or Never et furent gentillement jetés lors de son rachat par Century Media, qui leur préféra malheureusement les groupes metalcore sans grand intérêt du label. Un de leurs 3 guitaristes/chanteur les lâcha alors et les 4 membres restants, encore étudiants à l’époque, décidèrent de continuer sous le nom Day Without Dawn pour ne sortir cet album, Understanding Consequences, qu’en mars 2008, après un premier EP en 2006.
Sans surprise, la musique de Day Without Dawn poursuit dans la continuité de celle de The Postman Syndrome, atténuant quand même au passage le propos qui sonne moins metal et laisse une plus grande place aux envolées math-rock/jazzy, pour un résultat abordant toujours des formes variées mais un peu moins patchwork. Par ailleurs, le son, autoproduit, est le même, on retrouve la sincérité d’une musique à la production brute, sans artifice.
L’entame est tout de suite probante, le 2 premiers titres sont de pures réussites, les voix growlées de Chris Alfano en introduction posent directement l’ambiance de « The Wake » et ses 7 minutes mouvementées, qui servent en fait d’introduction à « After The Banquet », pour moi le morceau phare de l’album. Les titres suivants sont plus subtils, alternants interludes instrumentaux et ballades évoluant progressivement vers des sonorités plus dures à mesure que les guitares et voix se superposent. On peut penser à Dredg ou Porcupine Tree mais Day Without Dawn propose une version plus complexe et metallique, laissant une grande place à des guitares ciselées et une basse très présente, qui se partagent l’espace sonore de façon ingénieuse, entre arpèges et incursions saturées, à la manière d’un math rock metallisé.
Les survolant, le contraste des voix des 2 guitaristes est saisissant et souligne de façon appropriée les évolutions de la musique. Le premier a un timbre rugueux, hurlé aux entournures, rappelant la rage contenue d’un Scott Kelly (Neurosis), alors que le second possède une voix très douce et mélodieuse, souvent secondée par des harmonies ou des choeurs.
Tout comme dans The Postman Syndrome, j’avoue que le chant peut être considéré comme une légère faille de Day Without Dawn, mais son manque de perfection lui donne un côté marquant justement, une fragilité assumée, comme souvent dans l’emo/rock, dont on retrouve d’ailleurs parfois l’esprit, on pense ainsi à Brand New ou Further Seems Forever par moments. Le chant est donc peut-être un peu plus « typé » que je l’imagine, je dois trop être habitué à ce type de chant pour percevoir sa particularité. Sans non plus être complètement à part, ce ne sont pas des timbres de voix habituellement présent sur du prog même si le contraste voix délicate/voix rauque n’a rien d’inhabituel.
Malgré une couleur globalement douce et mélancolique, les riffs metal prog complexes sont nombreux, « The Second To Last Page » ou « The Undertide » relancent en fin d’album une orientation plus rythmée. Ca joue, le batteur assure d’un jeu tout en puissance et subtilité, les mélodies sont contrastées et sans cesse en mouvement, formant des compositions au style assez unique. Pour combler d’une touche un peu plus jazz, sur certains passages, des claviers légers, des trompettes et même quelques lignes de saxo assurées par Bruce Lamont de Yakuza viennent agrémenter le propos.
L’album se termine peut-être un peu vite sur un goût d’inachevé, son enregistrement ayant malheureusement abouti au split du groupe. Le dernier titre, « The Undertide », sonne d’ailleurs différemment du reste de l’album au niveau de la production et présente des guests au chant pour combler l’absence du chanteur principal. En fait, le groupe a vu le départ du guitariste/chanteur aux voix mélodiques pendant l’enregistrement de cet album. Les 3 membres restant se retrouvaient donc avec un album impossible à rendre sur scène sans la voix principale et ont donc décidé de se recréer un répertoire avec un nouveau nom de groupe, Biclops, qui se concentre sur la voix écorchée et présente et des compositions plus acérées.
Décidément, une malédiction pèse sur ces types… heureusement reste Terraformer et désormais Understanding Consequences, 2 albums remarquables même si ce dernier n’atteint pas la cohésion de la première oeuvre de ces musiciens. On y retrouve tout de même, outre la qualité de composition et du jeu, la même fraîcheur, la même recherche mélodique, l’impression d’une musique qu’on n’entend nulle part ailleurs.
Un album recommandé donc aux amateurs de prog un brin métallique (à comprendre plutôt moderne), il représente franchement pour moi le haut du panier, au niveau originalité et intérêt. Les premières écoutes pourront sembler surprenantes mais je ne peux qu’inciter à persister, je pense sincèrement qu’au niveau créativité, ça enterre largement beaucoup des groupes metal/prog actuels qui se ressemblent tous plus ou moins.
- the wake
- after the banquet
- the sea of fertility
- seducing the dead
- the deeper wells
- a cruel statue
- a fast-paced futuristic thrill ride
- the second to last page
- your diminutive hand
- the undertide
Ouaip ben je plussoie à la chronique dythirambique du boss, cet album est d’excellente facture et ne cesse de tourner chez moi. Un métal/rock prog créatif oui, intelligemment composé, cet unique album possède bon nombre de qualités qui se découvrent au fur et à mesure des écoutes. En effet, ne pas s’arrêter aux premières écoutes car les suivantes risquent fort de réserver de bonnes surprises à l’auditeur assidu :-). A conseiller evidemment aux fans de l’ancinne mouture, plus brutale et eclatée cela dit, The Postman Syndrome car on trouve la même fibre progressive et ce foutu talent à marrier des genres pas forcément compatibles sur le papier et pourtant tout à fait crédibles auditivement parlant (exemple, la surprenante fausse pop song/ balade crooner « seducing the dead »). Le titre fort de l’album est à mon sens « the second to last page » qui allie puissance de feu, cassures de style/rythme foutrement bien amenés, et passages mélodiques-mélancoliques superbes…Et un bon gros yeah pour moi, un !