Caligula’s Horse est un de mes groupes préférés depuis dix ans, ce qui biaise ma vision en leur faveur. Je les classe aux côtés de Haken et Leprous dans le trio de tête de la scène métal progressif des années 2010, les 3 sont d’ailleurs chez le label Inside Out music qui reste le fer de lance de ce genre que j’affectionne tant.
Avec leur sixième album studio, Charcoal Grace, le groupe aborde un pendant plus sombre que sur leur album précédent, Rise Radiant sorti juste avant la pandémie, et qui était bien plus optimiste, tout comme leur album majeur Bloom (2015, leur 3ème, que je recommande chaudement pour les découvrir). Le groupe a malheureusement été particulièrement impacté, le fait d’être en Australie a annihilé leur capacité à tourner pour promouvoir Rise Radiant ce qu’ils ont mal vécu. Les paroles explorent des sentiments d’isolement, de perte, tout en offrant une réflexion sur la nature humaine. Leur mentalité d’artistes disons exagérément « humanistes » implique une sensibilité exacerbée qui transparaît dans leur musique, mais j’ai trouvé leurs réflexions sur le covid en interview, et la dépression que ça leur a causé, débordant sur de la sensiblerie.
Enfin peu importe quand le résultat est un album aussi riche, qu’il m’a fallu écouter pendant de nombreux jours avant d’imaginer aborder une chronique, et dont j’ai encore l’impression de ne pas avoir fait le tour tant il y a de détails. C’est le propre de ce genre musical de partir dans tous les sens, Rise Radiant passe par toutes les nuances imaginables dans leur panel. Le dynamisme audio est ici à son comble, de moments acoustiques subtils à des riffs complexes et acérés qui révèlent le talent de leur guitariste/compositeur Sam Vallen, une des têtes pensantes du groupe avec leur chanteur Jim Grey, boule d’émotion, qui s’est encore surpassé vocalement. Les voix sont singulièrement expressives, profondément émotionnelles, en particulier lorsqu’elles abordent des thèmes comme les conflits familiaux, quelques rares fois rageuses, d’autres douces et mélancoliques, avec à quelques reprises une théâtralité qui m’a étonné, rappelant celle de Pain of Salvation.
La complexité de l’album et sa difficulté d’assimilation est liée à sa structure, présentant plusieurs épopées de dix minutes, mais également en son milieu une suite en quatre parties nommée « Charcoal Grace ». Leur mélange unique de métal progressif et de rock est toujours aussi reconnaissable, marqué par des compositions élégantes, des accroches entraînantes, le tout parsemé de riffs « djent » lourds. Il suffit d’écouter l’intro « The World Breathes with Me » ou « The Stormchaser » pour comprendre qu’on a à faire à un groupe qui certes utilise les instruments et sonorités du rock/metal mais les sublime avec des trouvailles mélodiques et rythmiques sophistiquées, ils représentent toute l’essence du concept de musique progressive.
Ce changement vers un sujet plus sombre et introspectif fait de « Charcoal Grace » un album profondément touchant, parfois un peu mièvre également, mais ne tombant jamais dans le kisch du metal prog/heavy des années 80. Caligula’s Horse reste un groupe au son »moderne ». La production est comme on pouvait si attendre impeccable, elle sera peut-être un peu propre pour le métalleux moyen, mais est tout à fait adaptée à la dynamique de l’album.
Un ajout remarquable à la discographie de Caligula’s Horse donc et un incontournable pour les fans du genre. Pas un seul morceau me plait moins dans le lot (allez je trouve juste le refrain de « Golem » un peu mièvre mais j’aime beaucoup ce morceau dans sa globalité, c’est le seul avec un groove vraiment « djent »). Il tourne en boucle de mon coté et certaines mélodies vocales comme des riffs me restent à l’esprit toute la journée. Je serais prêt à aller loin pour les voir en concert.
1. « The World Breathes with Me » 10:00
2. « Golem » 5:20
3. « Charcoal Grace I: Prey » 7:47
4. « Charcoal Grace II: A World Without » 6:47
5. « Charcoal Grace III: Vigil » 3:22
6. « Charcoal Grace IV: Give Me Hell » 6:13
7. « Sails » 4:31
8. « The Stormchaser » 5:57
9. « Mute » 12:00