Bon vous m’excuserez mais je vais commencer par râler comme ça ce sera fait et on pourra passer à la musique. C’est que Steven Wilson business man commence à m’exaspérer un tantinet. Pour commencer dans les griefs, même si celui-ci est mineur, annoncer un nouvel album plus de 7 mois avant sa sortie paraissait un peu prématuré et inutile (big up à tous ceux qui au contraire nous annoncent un album une semaine ou un mois avant de le sortir). Bien sûr vous me direz qu’après 13 ans d’absence, on pouvait bien attendre 7 mois de plus… Mais ce n’est malheureusement pas le seul sujet qui me fâche concernant notre cher binoclard anglais.
Le sieur Wilson qui dénonce pourtant la société de consommation sur « Personal Shopper » ne semble pas à un paradoxe près… En effet, si vous faites partie des couillons qui achètent encore des disques (et dont je suis), vous serez certainement ravi d’apprendre que pour faire l’acquisition de la seule édition permettant de posséder les 10 titres sortis dans le cadre de ce nouvel album, il vous en coûtera la bagatelle de 60€ (sachant que ces 3 titres sont par ailleurs sur un disque à part… ce qui n’est en l’occurrence pas une brillante idée car ils s’écoutent parfaitement dans la foulée des autres). Car les éditions standard que ce soit en vinyle ou en cd, ne contiennent elles que 7 titres, pour 48 minutes de musique. Alors on pourrait comprendre que Porcupine Tree réserve disons… un titre, à son édition deluxe (qui contient la version bluray audio de l’album et intéressera probablement donc d’abord les magnats du son, les autres pouvant tout à fait vouloir quand même avoir les 10 titres) mais trois titres… On se fouterait pas un peu de la gueule du chaland chez notre ami anglais ?
Alors ça m’énerve probablement d’autant plus que la version streaming promo à laquelle j’ai eu accès il y a plusieurs semaines contient justement les 10 titres (EDIT du 25/06/2022 : et que la version disponible sur les plateformes de streaming aussi, ce qui rend d’autant plus incompréhensible ce choix de restreindre les versions cd et vinyle « classiques » à 7 titres). Et le hic, c’est que les 3 titres qui sont l’objet de mon courroux sont très bons et n’ont rien à envier aux 7 autres. Et que 48 minutes de musique, c’est quand même un peu chiche. Avec les 3 titres en question, l’album montait à 65 minutes, ce qui après 13 ans d’absence ne paraissait ni scandaleux ni bourratif.
Bref… Je dois reconnaître que tout cela me donnait initialement bien envie de dire le plus grand mal de cet album. Sauf qu’évidemment malgré tous ces à cotés, Steven Wilson n’a (heureusement) pas pour habitude de nous vendre (chère…) de la merde.
Donc… Annoncé le 1er novembre 2021 pour une sortie le 24 juin 2022, ce Closure/Continuation marque vous l’avez bien compris, le retour très attendu du groupe de Steven Wilson avec les pointures Richard Barbieri et Gavin Harrison respectivement aux claviers/synthés, et à la batterie, Wilson en parfait homme orchestre se chargeant de tout le reste.
Un album qui semble marquer le retour vers le versant plus progressif et technique du groupe après un The Incident plus simple et qui en avait déçu plus d’un. Techniques certes, mais aussi mélodiques et accrocheurs, c’est ce qui caractérise clairement ces nouveaux titres, et on reconnaît là indubitablement à l’œuvre le talent de Steven Wilson. On est à la fois admiratif du son de l’album, de la technique de l’équipe, avec principalement pour ma part le jeu de batterie de Gavin Harrison aussi subtile que technique, mais aussi de la qualité des chansons qui nous sont une fois de plus proposées. Un titre comme « Dignity » par exemple peut sembler être assez simple et Wilsonien davantage que Porcupinien, mais son développement en nuances et variations en fait pourtant un pur titre de Porcupine Tree.
La structure même de l’album est notable, puisque l’album alterne quasiment « un titre nerveux / un titre plus calme » sur les 7 titres, avec des durées de titre plus resserrées mais qui restent conséquentes (entre 4min43 et 9min39). Cette structure pourrait lasser, mais les morceaux contiennent suffisamment de développements, de variations, de passages burnés (« Harridan », « Herd Culling » ou « Rats Return » font encore la part belle aux guitares), des arrangements synthétiques (dont on sait Wilson particulièrement friand ces dernières années, mais qui ne prennent heureusement pas autant d’importance ici que dans ses travaux solos) ou plus organiques, tout cela copulant dans un tableau indéniablement réussi même s’il n’y a aucune révolution au menu et qu’on reste globalement en terrain connu. Avec évidemment au chant un Steven Wilson, plus décomplexé que jamais, assumant parfaitement de partir dans les aigus quand l’envie lui prend (« Herd Culling ») pour davantage de variété, et compenser ainsi le fait qu’il ne sera jamais un « grand » chanteur.
Tout cela fonctionne donc vraiment bien, en particulier sur les gros morceaux de l’album : « Harridan », « Rats Return », « Herd Culling », « Dignity » et « Chimera’s Wreck ». Je suis moins emballé par un « Of the New Day » un peu simple pour le coup et qui pourrait presque passer pour un titre de S.Wilson ou même de Blackfield, ou par « Walk the Plank », plus électronique et qui semble pour le coup plus Steven Wilsonien que Porcupinien, tout en restant très sympathique.
Et ces 3 titres « bonus mes couilles » on en parle du coup ?
Oui parce qu’ils valent le détour. « Population Three » d’abord est un titre 100% instrumental mais franchement très réussi, avec ses synthés très présents, sa batterie virevoltante et les accélérations mélodiques de la guitare de Wilson. « Never Have » est un titre chanté, au format chanson classique, avec une mélodie encore très réussie, de même que « Love in the Past Tense » sur lequel quelques sonorités m’évoquent les derniers albums des français de Klone. Deux titres un peu moins portés sur les sonorités de guitare que d’autres et plus « pop », mais qui sont tout à fait réussis et (comme « Population Three ») ne méritaient vraiment pas d’être relégués au rang de faces B.
Au final, impossible de saquer un album de très bonne qualité une fois encore sans être accusé de faire preuve de mauvaise foi si l’on se place sur le seul terrain muscial et ce même si les points évoqués en début de chronique me gâchent personnellement un peu le plaisir. Mais évidemment, si vous n’avez pas l’intention de faire l’acquisition de la version physique de l’album, vous pourrez simplement profiter de ce nouvel album de qualité sans vous prendre la tête comme je le fais!
Tracklist :
01 – Harridan
02 – Of the New Day
03 – Rats Return
04 – Dignity
05 – Herd Culling
06 – Walk the Plank
07 – Chimera’s Wreck
Réservé à l’édition deluxe à 60 balles :
08 – Population Three
09 – Never Have
10 – Love in the Past Tense
Juste un mot pour préciser que l’édition deluxe à 60€ est effectivement deluxe. On peut s’interroger sur la démarche mais l’album vient aussi avec sa version pour audiophile en Blueray, 5.1, 96khz, 24 bits. Bon, faut avoir l’équipement. Y’a aussi le livret qui, vu sa taille, est plus un livre qu’autre chose. En gros, j’ai l’impression que c’est un peu moins une enfumette que le dernier Tool. Mais bon.