Les anglais de Don Broco commencent à faire parler d’eux, à force de persévérance et surtout de constance dans la qualité. Automatic, le deuxième album du groupe paru en 2015 avait déjà commencé à concrétiser la soif de succès du groupe, initiant une démarche de rapprochement vers le mainstream, l’efficacité pop même, sans complexe (il suffisait de voir la pochette acidulée) et avec une insolente réussite, après un premier album qui les avait affilié un peu rapidement à un post-hardcore à la Funeral for a Friend. Si j’avais loupé le coche pour chroniquer cet album l’ayant découvert un peu tardivement, il n’était pas question de me rater une nouvelle fois avec ce nouvel album que j’attendais de pied ferme.
Les singles diffusés en avance m’avaient en effet bien mis l’eau à la bouche (sans parler des clips qui valent le détour, en particulier celui de « Pretty ») et annonçaient un 3ème album dans la continuité mais aussi plus musclé, atténuant quelque peu les excès pop et le retrait de la guitare électrique du précédent album qui avaient pu effrayer les fans de la première heure (on se rappellera du pourtant excellent « Bad Feeling » mélangeant le son sautillant du « My Number » de Foals avec quelques incursions de saxo pour un résultat super pop). Le groupe revendique lui-même clairement une pelletée d’influences diverses allant de Biffy Clyro à Linkin Park (pas question de néo métal ici, il s’agit du Linkin Park le plus alternatif), en passant par de la pure pop (difficile de ne pas penser à du U2 en entendant les guitares sur « Got to Be You »), et tout cela s’entend dans leur musique dont le côté « positif » et ensoleillé leur donnerait presque un côté californien, pourtant bien éloigné géographiquement de leur perfide albion natale.
Au final, une fois l’album appréhendé dans sa globalité, pas de déception au rendez-vous et même plus que ça : Technology s’avère être encore meilleur que le pourtant très bon Automatic. Plus musclé globalement donc, avec de bonnes tranches de riffs comme sur « Technology » qui démarre super fort, ou « Everybody », « Pretty », qui contiennent tous leurs passages de gros son bien rock. Même des titres très pop comme « Stay Ignorant » ou « Come Out to L.A. » laissent la part belle aux guitares, et contiennent leur passage « gros riff » qui passe très bien. La mélodie reste pourtant au coeur de la musique de Don Broco comme le premier marqueur et l’élément prépondérant qui guide les choix effectués par la bande. Don Broco n’a pas vocation à proposer quoi que ce soit de complexe, mais au contraire une musique accrocheuse, des refrains qui restent en tête, une approche toujours aussi pop et assumée dans l’esprit. Le groupe ne s’impose aucune limite : balançant du saxo sur l’excellent « T-Shirt Song », utilisant l’électronique sans aucune appréhension (les dansants « Stay Ignorant » et « Come Out to L.A. »), le vocoder (« Porkies ») ou usant à merveille de la cloche batterie (énormes « Everybody » ou « Greatness »), un son injustement boudé de nos jours.
Le chant de Rob Damiani est pour beaucoup dans la qualité des chansons de Don Broco, capable de se faire cajoleur, pop, ou plus agressif (« 8 days a week sucker, 8 days a week! » sur « Pretty »), mais toujours parfaitement maîtrisé, il est le parfait complément à la musique accrocheuse du groupe. Il en fait parfois des tonnes (« Got to Be You »), mais il le fait si bien et à l’anglaise (cet accent sur « Good Listener »!), qu’on ne peut que s’incliner.
De fait il n’y a pas grand chose à jeter sur l’album, qui contient pourtant 14 titres (et même 16 pour l’édition limitée pas indispensable du reste) pour près de 50 minutes de musique, si ce n’est peut-être ce « Something to Drink » conclusif qui peut se révéler un peu agaçant (notamment sur sa 1ère minute) mais cela ne suffira pas à entacher le bilan extrêmement positif d’un album qui se positionne à mon sens comme le disque « feel good » de ce début d’année, un album qui aurait au final presque mérité de sortir plutôt en été. Car en dehors de ces 2 titres, c’est vraiment un festival de tubes et de refrains irrésistibles auquel nous convie le groupe, et il faudrait être fou pour refuser une offre honnête de cette qualité.
Loin des sorties trve death/black metal, chaotic dissonant hardcore qui nous occupent souvent (même si de moins en moins en ce qui me concerne ces temps-ci), ce nouvel album de Don Broco est à mes yeux (avec le Agrimonia dans un registre bien différent) la première grosse sortie de l’année.
https://www.youtube.com/watch?v=W6JZ6IgCKKo
Tracklist :
01 – Technology
02 – Stay Ignorant
03 – T-Shirt Song
04 – Come Out to LA
05 – Pretty
06 – The Blues
07 – Tightrope
08 – Everybody
09 – Greatness
10 – Porkies
11 – Got to Be You
12 – Good Listener
13 – ¥
14 – Something to Drink
15 – Blood in the Water (bonus track)
16 – Potty Mouth (bonus track)