Autant le dire de suite, je ne vais pas me perdre dans une analyse détaillée de l’évolution du groupe italien Zu, en comparant ce nouvel album Carboniferous, aux précédentes sorties du groupe. La raison en est simple, j’ai découvert Zu avec cet album. Bref, les connaisseurs et amateurs du groupe seront bienvenus pour venir compléter les propos de cette chronique, dans la partie Commentaires qui est à leur disposition sous la chronique.
Quoi qu’il en soit, ce que l’on peut facilement dire c’est que Carboniferous est un album magistral, dans un genre pourtant bien particulier, sur lequel la mystérieuse et au demeurant très belle pochette ne donne aucune indication.
Les italiens nous proposent en effet une mixture originale, mélange jouissif et quasi instrumental de free jazz et de rock noisy voire de métal, le tout servi par une production ultra puissante.
Entre saxo déluré, guitares agressives (pas présentes sur tous les titres), basse profonde et très présente, et batterie possédée, le résultat est scotchant, renforcé par des sonorités bizarres ou technoïdes ponctuelles.
Comme évoqué plus haut, l’essentiel du matériel proposé par le trio sur cet album est instrumental, et on notera la participation de King Buzzo des Melvins sur plusieurs titres (à la guitare justement je suppose).
Compte tenu du caractère hautement expérimental de l’œuvre, on aurait pu craindre du même coup un hermétisme rendant difficile de tirer le moindre plaisir de son écoute. Il n’en est rien, et cette énergie incroyable qui émane des compos, une énergie noisy contagieuse qui vous prend au corps dès le démarrage du sublime « Ostia », rend l’écoute trépidante, bien qu’assez intensive. Il est clair que la musique de Zu n’a aucune vertu apaisante, mais serait plutôt à mettre sur le même plan qu’un double expresso serré compte tenu du caractère excitant de l’affaire.
Mieux vaut donc éviter d’écouter Carboniferous avant de dormir, sous peine d’avoir quelques difficultés à trouver le chemin de Morphée et d’être pris de spasmes gênants.
Dans ce déluge de décibels à la frontière (franchie par moments) de l’expérimental, que certains rapprochent des travaux de John Zorn (en plus accessible toutefois), il n’est pas étonnant de retrouver associé à l’affaire, un certain Mike Patton, dont le goût pour les choses barrées et peu abordables n’est évidemment plus à démontrer.
Outre la sortie de l’album sur le label (Ipecac) de notre homme, ce dernier fait aussi une apparition sur un titre (« Soulympics ») et le résultat est aussi barré et imprévisible, qu’on pouvait l’imaginer. Cela étant, outre le caractère amusant de son intervention, celle-ci ne sera pas forcément à classer dans les participations exceptionnelles, que l’on retient longtemps. Le titre dont il s’agit est d’ailleurs loin d’être le plus marquant à mon avis, et j’aurais personnellement nettement préféré voire le groupe ne pas s’aventurer sur un plan vocal et s’en tenir à son approche 100% instrumentale, de rigueur jusqu’à ce moment de l’album. Mais « Soulympics » sera heureusement une simple exception, et les instruments reprendront vite leurs droits exclusifs dès « Axion ».
De ces 9 vrais titres (le dernier, « Orc » étant un délire bruitiste et animalesque de plus de 5 minutes qu’on n’écoutera probablement pas deux fois compte tenu de son caractère hautement anecdotique) ressortent particulièrement le premier, « Ostia », frénétique et qui aurait tendance à donner furieusement envie de sauter contre les murs, et « Obsidian », plus en nuance et seul titre réellement mélodique (la première écoute est d’ailleurs à ce titre assez surprenante, compte tenu du décalage avec les autres titres) qui éclaire génialement la fin de l’album. Les titres entre les deux sont tous de facture très solide (sauf donc peut-être « Soulympics », le plus dispensable) et l’ensemble donne un album hyper dynamique et enthousiasmant qui prouve qu’en dehors de Lacuna Coil, l’Italie qu’on connaissait déjà pour les (le) non moins barrés Ephel Duath, en garde encore sous le pied pour mieux nous surprendre.
Tracklist :
- ostia
- chtonian
- carbon
- beata viscera
- erinys
- soulympics
- axion
- mimosa hostilis
- obsidian
- orc
Terrible album, puissant, inventif, dingue, il marquera mon année 2009 for sure.
Album super mais en live c’est encore meilleur!
Il finira sans doute dans mon TOP 2009 :)
A noter que la « basse profonde » est un sax baryton. Mais en effet son utilisation est tellement personnelle (entre gimmicks de basse et affinités technoïdes sur ostia) qu’on ne reconnait presque plus l’instrument. Du frais…
meilleure sortie expérimentale 2009 pour le moment.
Je n’ai pas écouté ce CD, mais juste un petit commentaire sur le groupe. Je reviens d’un concert de Zu qui fut pour moi une petite déception. Aujourd’hui, les gens ont tendances à coller l’étiquette « Jazz » à tout ce qui est dissonnant ou dur à comprendre ou à encaisser, bon…Ce soir la musique de Zu m’a déçu. Aucun contact avec le public (ok, clairsemé, mais quand même), rythmiques très intéressantes mais composition squelettiques dont les faiblesses sont dissimulées sous une avalanche de pédales d’effet. Batteur motivé, parfois intéressant, piochant souvent dans les même plan typés sous-Thomas Haake. Etrange, je m’attendais à être conquis, au final, mitigé, l’impression d’avoir entendu un groupe qui pourrait être fabuleux mais auquel il manque…quoi?? Impossible à dire. Ou alors si, du groove, laisser un peu de lourdeur au profit de composition moins bêtement écrasée par les basses. Serieusement, les rhytmique sont parfois incroyables, et laissent l’instant d’après place à 2mn de « beat technoïde » pour reprendre ce que j’ai lu plus haut et par une seule et même note jouée en boucle par le saxophoniste qui visiblement a décidé de s’en tenir à une note différente jouée à la minute. Pourquoi pas, mais est-ce que c’est ça la musique experimentale aujourd’hui? Un bassiste et un saxophoniste qui se cache derrière mille effets. Je n’ai pas trouvé Zu barré, je n’ai pas trouvé Zu Jazz, j’ai trouvé Zu lourd, peu inspiré et répétitif.
Dire que Orc est anecdotique n’est pas franchement bien vu. Orc avec son chant diphonique (bourdon+harmonie) rudement bien mis en place rendant l’ambiance bien plus oppressante et mystique. Elle clôture très bien l’album fermant un album pachidermique, bestial, massif les portes de l’ère carbonifère se ferme avec ce morceau.