Les voilà de retour les toulousains de Psykup qui fêtent leurs 30 ans d’existence cette année. Une longévité remarquable et une envie d’en découdre qui semble intacte, avec leur musique qui ne se prend pas au sérieux mais qu’on aurait pourtant tort de sous-estimer puisque les gaziers envoient aussi bien la purée avec leur fusion metal vitaminée.
Si j’avais apprécié le précédent album, sans toutefois y revenir réellement après quelques écoutes, je pense pouvoir dire que la chose sera un peu différente cette fois car The Joke of Tomorrow, que je n’avais pas spécialement hâte d’écouter (je l’admets), m’a collé une belle mandale et m’a rapidement convaincu de ses qualités.
Le groupe reste fidèle à lui-même, mélangeant tous les genres et osant tout, du funk au hardcore/metal, en passant par des passages jazzy improbables (comme sur « Same Player » qui contient aussi ces bruitages de jeux vidéo), des influences orientales (« Death in the Afternoon »), et même un interlude « classique » (« Whispers in the Morning »). Mais ce qui à mon sens différencie vraiment ce disque du précédent, c’est le travail vocal que j’ai trouvé beaucoup plus impactant que sur le précédent album. Les voix sont plus en avant qu’elles ne l’étaient, et Julien utilise un registre plus grave presque growlé, pour seconder de façon hyper complémentaire et efficace Matthieu dont le registre aigu et frénétique reste fidèle à ce qu’on lui connaît. Mais ce dernier chante aussi de façon plus claire, et il le fait mieux que jamais, avec des passages qui sont même doublés (cf « Rise and Fall and… », « Child Interrupted », « Burn after Hearing » et d’autres) pour un résultat qui peut carrément faire penser parfois à Alice in Chains. Son chant posé peut faire penser à celui de Mike Patton (pas nouveau mais néanmoins très net) mais ses éructations m’ont fait penser aux délires de Travis Ryan (Cattle Decapitation), comme sur « Rise and Fall and… » à nouveau ou sur « Same Player ». Il délivre aussi une sobre et chouette prestation sur le morceau-titre qui conclut l’album et s’avère être le plus mélodique et presque pop, là où le reste de l’album est quand même globalement bien agressif voire violent.
A noter aussi la présence d’un chant féminin sur « Bigger than Life » qui vient seconder Matthieu pendant que Julien repose son organe.
En à peine plus de 40 minutes, les français (qui chantent toujours en anglais) concentrent leur savoir-faire sur l’efficacité et grand bien leur fait car The Joke of Tomorrow s’avère être une petite pépite dont je n’attendais rien mais que je me suis surpris à écouter plusieur fois d’affilée avec beaucoup de plaisir même si certains titres m’ont un peu moins emballé que d’autres (« Child Interrupted » par exemple), ce qui est aussi du au fait que les 4 premiers titres sont tous des petites bombes et que la tension retombe forcément un peu par la suite.
Là où Ultra Vomit fait sourire sur une écoute sans donner envie d’appuyer à nouveau sur « Play », Psykup parvient à rester léger dans le ton (les paroles et titres de morceaux attestent de l’envie du groupe de ne pas se prendre au sérieux) tout en étant très rigoureux et pro musicalement et en proposant des vraies chansons qui donnent envie de les écouter et les réécouter.
Longue vie à eux !
Tracklist :
01. I will let you down
02. Drinks on me
03. Rise and fall and…
04. Same player
05. Bigger than life
06. Child interrupted
07. Whispers in the morning
08. Death in the afternoon
09. Fear is the key
10. Losers only
11. Burn after hearing
12. The joke of tomorrow
Petite interview mail réalisée le 7 avril 2025 avec Julien CASSARINO (Chant/Guitare) :
1) 6ème album en 30 ans d’existence, vous n’êtes pas les plus productifs de la scène, mais votre longévité est remarquable d’autant plus que, sauf erreur, votre effectif n’a que peu varié. C’est quoi le secret de votre stabilité et pourquoi n’entend-on (re) parler de vous que tous les 4 ou 5 ans ?
On a eu beaucoup de changements de line-up et une pause entre 2009 et 2016, sans compter le stop and go du Covid à la sortie de notre album précédent. Au compteur nous avons une démo, un live en 99, un 4 titres, 6 albums, 2 CD live, un single à part des albums, un documentaire, un album acoustique/remixes et une réédition, donc au final on est plus productifs que tu ne le penses ^^ Le secret de la stabilité c’est le travail, l’écoute et la détermination.
2) Il m’a semblé que The Joke of Tomorrow était au final plus agressif que le précédent album notamment dans les vocaux de Matthieu. Tu confirmes que c’était l’intention ou c’est moi qui raconte de la merde ?
D’une part, Matthieu Romarin a succédé à Matthieu Miegeville sur cet album, et il a un grain de cri beaucoup plus grave et métal que son prédécesseur. D’autre part mon écriture ne s’est pas calmée, j’ai eu envie d’explorer encore plus la facette hargneuse du groupe, avec aussi beaucoup de mélodies léchées.
3) Vous restez fidèle à votre style en traversant les époques, mais votre style justement est toujours aussi difficile à catégoriser. Est-ce qu’après 30 ans vous savez enfin comment vous décrire et surtout décrire votre musique ?
Nous détestons les cases et les catégorisations, notre but est de surprendre l’auditeur et de l’emmener en voyage à travers plusieurs styles différents mais complémentaires. Notre musique est un maelstrom d’influences très métissées (jazz, funk, pop…) avec une base métal.
4) La pochette de l’album est très travaillée et réussie. A qui la doit-on et comment avez-vous abouti à ce résultat ?
Elle est signée Julien Rouche, alias Jouch, notre graphiste depuis We Love You All en 2008. C’est un vieil ami, et on discute beaucoup lui et moi du concept de chaque album pour que la pochette l’illustre au mieux. Ici nous mettons face à face notre dualité intérieure, le clown et son côté farfelu et imprévisible, et le boxeur plus aguerri, plus sage, mais néanmoins dangereux.
5) Quel regard portes-tu sur l’évolution de la scène metal depuis 30 ans ?
C’est très ambivalent : la scène métal produit beaucoup de groupes assez cliché et interchangeables, mais aussi des perles rares plus originales comme récemment Landmarks, Imparfait ou Pogo Car Crash Control en France, ainsi que Twelve Foot Ninja ou Bloodywood dans le reste du monde.
6) Quels sont les albums/groupes qui vous ont le plus marqués ces dernières années au point peut-être d’ailleurs de vous influencer dans l’écriture des morceaux pour Psykup ?
Je n’écoute pas de métal quand j’écris pour Psykup, mes influences se situent plutôt dans le jazz, le classique, la musique de films, la soul, des genres qui n’ont rien à voir pour préserver la fraîcheur et la spontanéité.