Je me souviens avoir lu dans un vieux numéro de Metal Hammer que lors de la première représentation de Naked City, lors d’un concert organisé en hommage à un jazzman alors récemment décédé, une bataille avait eu lieu entre les membres du public qui l’adoraient et ceux qui considéraient ce groupe et cette musique comme une insulte à l’être illustre qui venait de nous quitter. Non, je ne me souviens pas qui était ce fameux bonhomme et je doute même maintenant de la véracité de cette histoire, n’ayant pas réussi à la retrouver, mais elle définit tout de même bien ce qu’est Naked City : une musique devant laquelle on ne peut rester impassible. Soit on aime et on jubile devant ses enceintes, comme moi lors de ma première écoute, soit on déteste et on coupe la musique au bout de la deuxième plage. Qu’est ce que Naked City ? C’est un projet du saxophoniste John Zorn, un des grands nom de la scène free jazz, de ceux qui laissent parler leur inspirations tellement librement qu’ils abordent des territoires bruitistes et difficiles d’accès mais qui en retour arrivent parfois à repousser les limites de la musique. Les Marco Polo et autres Gengis Khan de la musique. Découvrir et conquérir, telle est leur devise.
Musique expérimentale donc, mais pas non plus embourbée dans ses propres rituels incompréhensibles qui aboutissent souvent à un dialogue de sourd. Non, Naked City a beau réinventer la musique sur des plages de moins d’une minute en moyenne (format grindcore, car l’inspiration de ce groupe vient justement du Scum de Napalm Death), ils ne sont pas là pour vous empêcher de rentrer dans leur univers. Et l’instrument dont se sert ce groupe est sans aucun doute l’humour. Oui, les jazzmen et les snobinards prétentieux qui se dissimulent dans des caves enfumées peuvent être doués d’humour et ce n’est pas être insultant que de sourire en écoutant cet album car il est jouissif si l’on goûte un peu à ce déluge grand guignolesque de multiples styles qui se soudent et s’affrontent sous les hurlements de Yamatsuka Eye (des fameux Boredoms), un vocaliste multitâche qui éructe sporadiquement des cris aigus qui me font penser a un diable de Tasmanie (celui des dessins animés) que l’on aurait bourré d’une drogue quelconque mais très puissante. Noisy ? Pas qu’un peu. Mais c’est ça qui fait rire tant de gens quand on les met en face de groupes comme Agoraphobic Nosebleed ou Fantomas, non ? Pas le temps pour se concentrer trop longtemps sur une même idée, on l’utilise un quart de seconde pour ne plus jamais la revoir et tant pis si vous aimiez ça mais nous on a autre chose à foutre.
Alors voilà, Naked City est un mélange improbable de jazz, de métal, de musique traditionnelle juive et de tout les styles que vous pourrez nommer. Ils sont là, à un moment ou un autre, et ils vous tirent la langue puis courent se dissimuler à un autre endroit inattendu. Torture Garden ne manque toutefois pas de cohérence et peut autant s’écouter comme un bloc unique et casse tête ou individuellement, titre à titre. La production étant digne de celle des meilleurs albums de jazz, chaque instrument est parfaitement audible et donne donc une personnalité à chacun des morceaux. La performance est quant à elle tout aussi remarquable. On parle tout de même de types pour qui l’improvisation est loi et dont les capacités derrière leurs instruments feraient pâlir de jalousie les métalleux de base qui s’imaginent remplacer Malmsteen. Cette accumulation de talent et d’originalité se ressent tout au long de l’album et fera sourire de joie plus d’un fan de musique, quelque que soit le genre, car quand on est en présence d’un tel monstre il est à mon avis difficile de rester insensible à tant de folie et d’envies de tout foutre en l’air pour remanier les briques de la construction ainsi désordonnés dans le sens qui lui plaît. C’est bien ce que recherchent les mélomanes, non ? Les musiciens qui leur feront dresser l’oreille, ceux qui repousseront les barrières et referont la cartographie a leur goût. Naked City contient tout cela et en large dose, plongeant dans l’inconnu pour un album hors pair (Fantomas se situant dans un registre proche mais n’arrivant pas vraiment au même degré folie). Indispensable.
Tracklist :
- Blood is Thin
- Demon Sanctuary
- Thrash Jazz Assassin
- Dead Spot
- Bonehead
- Speedball
- Blood Duster
- Pile Driver
- Shangkuan Ling-Feng
- Numbskull
- Perfume Of A Critics Burning Flesh
- Jazz Snob Eat Shit
- The Prestidigitator
- No Reason To Believe
- Hellraiser
- Torture Garden
- Slan
- Hammerhead
- The Ways Of Pain
- The Noose
- Sack Of Shit
- Blunt Instrument
- Osaka Bondage
- Igneous Ejaculation
- Shallow Grave
- Ujaku
- Kaoru
- Dead Dread
- Billy Liar
- Victims Of Torture
- Speedfreaks
- New Jersey Scum Swamp
- S & M Sniper
- Pigfucker
- Cairo Chop Shop
- Fuck The Facts
- Obeah Man
- Facelifter
- N.Y. Flat Top Box
- Whiplash
- The Blade
- Gob Of Spit
1. Blood Is Thin
2. Demon Sanctuary
3. Thrash Jazz Assassin
4. Dead Spot
5. Bonehead
6. Speedball
7. Blood Duster
8. Pile Driver
9. Shangkuan Ling-Feng
10. Numbskull
11. Perfume of a Critic’s Burning Flesh
12. Jazz Snob Eat Shit
13. Prestidigitator
14. No Reason to Believe
15. Hellraiser
16. Torture Garden
17. Slan
18. Hammerhead
19. Ways of Pain
20. Noose
21. Sack of Shit
22. Blunt Instrument
23. Osaka Bondage
24. Igneous Ejaculation
25. Shallow Grave
26. Ujaku
27. Kaoru
28. Dead Dread
29. Billy Liar
30. Victims of Torture
31. Speedfreaks
32. New Jersey Scum Swamp
33. S&M Sniper
34. Pigfucker
35. Cairo Chop Shop
36. Fuck the Facts
37. Obeah Man
38. Facelifter
39. N.Y. Flat Top Box
40. Whiplash
41. Blade
42. Gob of Spit
désolé ça prend un peu de place…
*le précédent message fut écrit avant que le titre des chansons n’apparaisse*
Une musique de l’extrême pour des sensations et un goût de l’extrême. Un rien difficile d’accès mais le jeu en vaut la chandelle. Du moins pour ceux qui ne sont pas trop sensibles. Une certaine nausée peut vous envahir sous ce déluge (véritable vertige) de dissonances tout azimut. Du moins lors des premières écoutes. Et le malaise est bel et bien présent quoi qu’il en soit. L’album s’appelle tout de même « Torture Garden »…
Bonne chro!
Ce disque est excellent
Malmstein c’est un mélange de Malmsteen et Rammstein ou bien ? ok je sors ==> [ ]
Je sens que je vais bientôt me recevoir le prix Bernard Pivot de l’homme le plus faché avec l’orthographe.
heu… sinon j’ai pas lu la chro en entière mais quand je lis le nom tortire garden çàa me fait penser à l’orga du même nom qui fait des soirées fetish tous les samedis à london. elles ont un succès fou d’ailleurs.
l’album le + monstrueux d’un groupe les plus monstrueux
L’album.