En voilà un que j’attendais avec une très grande impatience, après l’amuse-bouche Omega Severer offert l’an passé qui contenait justement un morceau de ce nouvel album (« Omega Severer » donc) et le réenregistrement d’un ancien titre sublimé (« Of Blade and Carapace »). Et la déception n’est heureusement pas à l’ordre du jour alors que l’on peut enfin tous apprécier le deuxième album long format des écossais.
Etemen Ænka est un beau bébé de 67 minutes exposant de fait le groupe au risque de tomber dans l’écueil des albums trop longs : se retrouver avec du trop plein ou des passages peu inspirés amenant à débander en plein coït, mais heureusement Dvne sont des coutumiers des longs albums (Asheran durait déjà 60 minutes) et savent aussi comment habilement enchaîner les longues pièces avec d’autres plus courtes le tout avec la juste dose de liant. Au final, même si on peut préférer écouter l’album en deux fois, je n’y ai pas trouvé de ventre mou ou de passages inutiles ou chiants. Et ça c’est déjà une belle performance.
On démarre d’ailleurs avec un très bon morceau direct et concis « Enûma Eliš » qui nous fait parfaitement plonger dans l’univers de Dvne. Un univers qu’on a toujours un peu de mal à situer précisément honnêtement, l’illustration du premier album posait une sorte de panorama heroic fantasy, la cover de ce nouvel album est un peu plus mystérieuse, et j’avoue avoir un peu de mal à comprendre où le groupe nous emmène dans ses clips, en particulier dans le dernier illustrant le titre « Sì-XIV ». Dans un registre musical finalement assez proche des allemands de The Ocean, dont Dvne se rapprochent encore davantage avec ce nouvel album, il faut bien reconnaître que l’univers des allemands est plus clair et immédiatement compréhensible et reconnaissable.
Mais tout cela n’est heureusement qu’un détail dans l’absolu, car sa musique parle d’abord pour le groupe et dans ce registre « Dvne delivers » comme on dit chez eux, avec une constante qualité qui fait de l’album, une réelle réussite à côté duquel les amateurs de Post Metal Progressif auraient évidemment tort de passer.
Plusieurs gros morceaux sur l’album permettent d’apprécier le savoir-faire des écossais dans cette façon d’enchaîner passages lourds et assauts mastodoniens (comme sur « Towers » qui l’illustre parfaitement) en réussissant à se montrer pertinents dans les deux approches. On n’est heureusement jamais dans la situation de subir des passages lourds, longs et chiants, le changement de rythme arrivant toujours au bon moment pour maintenir notre attention. J’évoquais les passages à la Mastodon, c’est certainement cela qui distingue d’ailleurs aujourd’hui particulièrement Dvne de The Ocean, ce tricotage de guitares n’existant pas dans la musique de The Ocean plus proche du post-hardcore, tricotage qui peut aussi évoquer le jeu de guitare de Stefan De Graef chez Psychonaut, groupe qu’on pourrait aussi rapprocher de Dvne d’ailleurs. Les riffs se font aussi ponctuellement très mémorables, comme sur « Sì-XIV » qui envoie bien la purée sur un format plus court que les grosses pièces de l’album.
Ce que l’on apprécie toujours par dessus-tout c’est que Dvne n’oublie jamais la mélodie dans ses compositions, et les mélodies sont vraiment belles sur Etemen Ænka, que ce soit celle d' »Omega Severer » donc ou la fin de « Towers » introduite d’ailleurs par une étonnante incursion de sons électroniques avant d’être reprise par la voix claire de Victor Vicart, les deux guitaristes se partageant toujours les voix (Dan Barter étant chargé des voix growlés). Le mariage des deux voix fonctionne très bien, et l’on constate vite que l’équilibre entre les deux approches vocales est plus important que sur le premier album, le timbre growlé de Dan (toujours excellent) faisant quasiment jeu égal (en quantité) avec la voix claire de Victor, lequel a en effet de plus en plus d’occasions de s’illustrer comme sur certains passages d' »Omega Severer », « Sì-XIV », « Mleccha » (sur le début duquel on croirait entendre Maynard Keenan) sur lequel on a droit à un tandem en voix claire ou « Court of the Matriarch » où il prend même le dessus sur Dan. On avait déjà évoqué les petits soucis de justesse dans son chant qu’on avait pu déplorer sur Asheran et bonne nouvelle Victor a fait des progrès, même s’il n’est toujours pas le meilleur chanteur en voix claire qui soit sur la scène et s’il reste par conséquent encore une marge de progression pour l’avenir. On notera aussi la participation d’une voix féminine sur le titre « Omega Severer » qu’on connaissait donc déjà, mais aussi sur le très calme (encore un interlude) « Asphodel ».
Les interludes qui viennent calmer utilement le jeu entre deux titres importants et souvent longs, à l’image de « Weighing of the Heart » ou « Adræden » tous deux encadrant justement le morceau-titre, véritable cœur de l’album, montrent cette facette électronico atmosphérique qu’on découvre avec cet album et que le groupe n’avait pas expérimenté sur Asheran (à moins que mes souvenirs me jouent des tours).
A l’arrivée et avec un très bon final de 11 minutes pour conclure cet album, pas de doute que les écossais signent avec Etemen Ænka un excellent deuxième album, fruit d’un travail qu’on imagine considérable. Le jeu en valait la chandelle, et comme dit précédemment, l’album est à ne pas rater pour tout amateur de Post Metal Progressif qui se respecte.
Tracklist :
1. Enûma Eliš
2. Towers
3. Court of the Matriarch
4. Weighing of the Heart
5. Omega Severer
6. Adræden
7. Sì-XIV
8. Mleccha
9. Asphodel
10. Satuya