Bjork – Medulla

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Style: bjorkAnnee de sortie: 2004Label: Polydor Records

Björk a toujours été une artiste à la marge. Une des rares en ce bas monde à pouvoir combiner musique pop et expérimentations. Björk, avec sa musique, s’adresse à un public très large, mais n’hésite pas à expérimenter à tout va, s’inventant un univers musical unique. La petite Islandaise n’aime pas se répéter non plus, chaque nouvel album emmène l’auditeur vers de nouvelles sphères toujours surprenantes.

« Vespertine » avait été un album subtile, comme une douce berceuse racontée au coin du feu les soirs d’hiver, une œuvre marquée par la blancheur d’une nature calme (au contraire d’« Homogenic » où se déchaînaient les éléments), quand l’hiver a recouvert la nature de son blanc manteau et que règne la sérénité, la douceur d’un environnement froid mais fragile comme la neige elle-même.

Cette fois, l’Islandaise s’embarque dans une nouvelle voie ou plutôt dans des nouvelles voix devrais-je dire. Ce « Medulla » est marqué par la voix, les voix, bien plus que ça, par les bouches, les corps… Car si « Vespertine » avait principalement pour but de toucher l’âme, uniquement l’âme, laissant le physique de côté ; « Medulla », se veut pour sa part une œuvre plus orientée vers la chair. « Medulla » est donc plus physique que « Vespertine » ne l’était.

Si « Homogenic » était marqué, dans des morceaux tel que « Joga » ou « Barchelorette » notamment, par une certaine complexité, une certaine exubérance ; « Vespertine » faisait preuve d’un certain dépouillement. En cela, « Medulla » aussi est un disque dépouillé, simple. D’ailleurs on retrouve certaines traces de « Vespertine » sur ce « Medulla », sur « Constellation » notamment ou alors dans l’utilisation de la chorale islandaise, notamment sur « Pleasure Is All Mine », « Where Is The Line » ou encore « Vökurd ».

L’Islandaise a toujours dit qu’elle faisait une musique populaire, a toujours souhaité toucher un très large public, sans pour autant oublier ses désirs d’expérimentation. Pourtant, la voilà qui avec « Medulla » met en place son œuvre la plus expérimentale et de ce fait la plus difficile d’accès. Il faudra de nombreuses écoutes pour rentrer dans ce monde étrange, comme on entre dans une grotte sombre ou vivent des êtres bizarres. Les êtres qui peuplent cette grotte ne sont pourtant pas des créatures diaboliques. La grotte ne sera pas le seul lieu visité, les sombres fonds de l’océan ou vivent des êtres magiques de lumière sont aussi passés au peigne fin (« Oceania »).

Pour mettre en vie ces mondes d’obscurité, les voix les plus insolites du moment ont prit part au projet. Le célèbre Mike Patton (est-il besoin de le présenter ?) apparaît sur « Pleasure Is Mine » et « Where Is The Line ». Razhel (beatbox humain des Roots) rythme énormément ce disque de sa bouche. Les fous japonais de Dokaka (capables de reprendre un solo de King Crimson ou toute l’œuvre de Wagner uniquement avec leurs bouches dont s’extirpent des étrangetés sonores) officient dans leur rôle de sampler humain sur le final « Triumph Of A Heart » (sur lequel apparaît aussi le trombone humain Gregory Purnhagen). Robert Wyatt, avec sa voix plaintive, enfonce l’auditeur au cœur des sombres fonds de l’océan peuplés par l’inconnu sur « Submarine ». N’oublions pas non plus les indéfectibles Matmos. Un disque profondément porté par les voix ne serait rien sans l’utilisation de chorales. J’ai déjà parlé de l’angélique chorale islandaise, il faut aussi noter l’apparition d’une chorale londonienne sur « Oceania ».

Pourtant, si le disque est avant tout basé sur des voix, des bouches, qui peuvent servir aussi bien d’instruments, de samplers, de beatbox, de mélodies, de basses ; il ne faut pas oublier l’utilisation de sons et d’instruments « non humains ». L’ensemble instrumental reste cependant très dépouillé : basse, beats, quelques programmations, gong, étrangetés sonores étiquetées Matmos et un piano sur « Océania » ou sur l’étrange (c’est le moins qu’on puisse dire) et dérangeant « Ancestors ». Les programmations (dont s’est occupée Björk elle-même avec l’aide notamment de l’indispensable Mark Bell) brillent dans l’ensemble par leur simplicité (d’où le terme d’electro nu).

Ce côté « nu » s’entend particulièrement sur « Show Me Forgiveness » ou Björk se retrouve seule : pas d’instruments, pas d’autre voix, juste elle. «Öll Birtan » est un autre titre ou l’Islandaise expérimente seule avec sa voix.

Il est clair qu’avec « Medulla », le grand public aura cette fois bien du mal à accrocher à l’oeuvre de Björk. Car si les premiers morceaux du disque sont encore accessibles, de par leur côté «pop », les dérangeants « Submarine » ou « Ancestrors » vont donner bien du fil à retordre aux fans de l’Islandaise.

Sur le papier, ce « Medulla » a l’air plutôt alléchant mais… après une première écoute on ne peut qu’être déçu par cet objet. Difficile de comprendre tout ce qui se passe là-dedans. Utiliser de nombreuses «voix » est une idée intéressante mais l’ensemble sonne, je le répète, assez dépouillé. Si bien que lors des premières écoutes, on ne retient finalement que quelques morceaux. Déception aussi que des personnalités telles que Patton ou Dokaka ne soient pas plus utilisées. Le Patton est discret, bien dommage, j’attendais peut-être trop de l’homme sur ce disque… Quant à Dokaka, ces cinglés ne sont présents que sur le dernier morceau. Là aussi, j’aurais voulu les entendre un peu plus.

Finalement, c’est toujours le même problème avec Björk, elle ne fait jamais ce qu’on attend d’elle. Ce n’est pas la première fois qu’elle déstabilise son auditoire, un album d’elle ne se découvre pas facilement en quelques petites écoutes. L’œuvre de l’Islandaise demande à l’auditeur de bien vouloir rentrer dans l’inconnu. Il est donc difficile de juger ce « Medulla », il faudra du temps avant de véritablement appréhender et peut-être comprendre cette oeuvre difficile.

  1. pleasure is all mine
  2. show me forgiveness
  3. where is the line
  4. vökuró
  5. öll birtan
  6. who is it
  7. submarine
  8. desired constellation
  9. oceania
  10. sonnets / unrealities xi
  11. ancestors
  12. mouth’s cradle
  13. midvikudags
  14. triumph of a heart
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6 Commentaires

  1. Joss says:

    pas d’avis sur le disque mais qu’est-ce qu’elle est belle cette pochette quand même !!!

    voilà c’est tout :-)

  2. Monster says:

    Mais toutes les pochettes de Björk sont toujours très belles :)

  3. Maganko says:

    Je trouve Bjork crispante… Que pensez-vous de sa réputation de divas pour bobos?

  4. krakoukass krakoukass says:

    Cette réputation n’est pas usurpée… Mais je te dirais que Massive Attack est aussi une égérie bobo, et pour autant la musique est incontestablament superbe…

  5. Monster says:

    De divas bobos ????

  6. krakoukass krakoukass says:

    ouais Bourgeoisie Bohème quoi…

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