Qu’est ce qu’un ensemble de jazz electro acoustique et de percussion? La réponse se trouve surement parmi les disques que Madlib a ingurgités et samplés sur ce nouvel album extrait de la galaxie du Yesterday’s Universe, ensemble de groupes de musiciens jazz imaginaires derrière lesquels se cache Madlib. Tout comme au sein de Young Jazz Rebels, Madlib s’adjoint la collaboration de quelques musiciens, le Monica Lingas Band (au sujet duquel je n’ai rien réussi à trouver), Harry Whitaker, pianiste, compositeur et arrangeur de jazz, et Roy Ayers, un joueur de vibraphone.
Il est d’ailleurs intéressant de s’attarder sur la carrière de Ayers, l’un des artistes les plus samplés dans le rap. De Tony Yayo de G-Unit (le crew de 50 Cents) à A Tribe Called Quest sur le mythique « Bonita applebum », l’homme tire une fierté notable de ces hommages. Il est donc tout naturel qu’on le retrouve sur un disque de Madlib bien que celui-ci ne fasse pas dans le rap mais dans le jazz fusion sur celui-ci. Le sampling est toutefois au cœur du travail de Madlib et bien qu’il déguise son travail derrière une collection de noms inventés, on le retrouve tout-de-même dans la liste des membres de cet ensemble de onze « musiciens ».
Le nom d’Otis Jackson Jr., véritable nom de Madlib, figure en effet à la batterie et aux percussions. Quoi de plus naturel pour un beatmaker? Pour autant, son style est ici libéré et c’est à se demander si ses parties ne sont pas plutôt programmées que jouées tant le talent qu’il met derrière son kit était alors insoupçonné à mes oreilles. Il est le liant qui crée l’effervescence autour de ces plages composées en hommage à différents jazzmen dans une collection de styles que je ne saurais assimiler à un artiste ou un groupe particulier. Quelque part entre le Mahavishnu Orchestra et Weather Report flottent ces compositions où les noms les plus connus, mentionnés entre parenthèse, n’interviennent qu’à la fin (Pharoah Sanders & John Coltrane).
Le sentiment de ne pas en savoir assez pour comprendre toutes les finesses et les hommages cachés de ce disque aspire mon attention, par les arrangements magiques de ce groupe que l’on croirait pourtant bien réel. Il aura fallu trois ans pour que ce disque sorte enfin et l’on peut être satisfait qu’il n’ait pas disparu dans les cartons. Des albums avaient précédemment été publiés au Japon, mais comme l’on peut s’en douter, ils étaient encore totalement inconnus en dehors des initiés. Miles away comble donc une partie de l’histoire du jazz que Madlib continue de reconstituer à force de disques où il aspire ses influences pour créer de nouveaux morceaux tout aussi excitants et géniaux que ceux de ses prédécesseurs. Cet homme incarne tout ce que le sampling peut procurer de fantastique à la musique et un musicien comme Roy Ayers ne s’y sera pas trompé en venant le rejoindre.
- Derf (for Derf Reklaw)
- One for the Monica Lingas Band
- Horace (for Horace Tapscott)
- Waltz for Woody (for Woody Shaw)
- Shades of Phil (for Phil Ranelin)
- Black renaissance (for Harry Whitaker)
- Tones for Larry Young
- Mystic voyage (for Roy Ayers)
- Two stories for Dwight (for Dwight Tribble)
- The trane and the pharoah (for John Coltrane & Pharoah Sanders)