Mad Season – Above

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Style: grungeAnnee de sortie: 1995Label: Columbia Records

Certains albums vous marquent à vie c’est le cas d’Above en ce qui me concerne. Onze ans après sa sortie chacune de ses écoutes continue de me remuer au plus profond de mon être non pas parce que cet album est l’œuvre de Layne Staley et John Baker Saunders tous deux disparus depuis mais paradoxalement parce que je le trouve touchant de vie et d’humanité. C’est même à l’essence de la vie que l’on goûte sur cet album : ce petit quelque chose qui continue à faire avancer quand tout a été perdu ou presque.

Début 1994, les choses ne vont pas très bien pour les superstars de Seattle, déboussolés par la célébrité soudaine, les corps et les esprits sont éreintés par le rythme incessant des tournées et de la promo et les premières fissures apparaissent. Kurt Cobain laminé par la dépression et l’addiction se tire une balle dans la tête, Eddie Vedder décrète le black out autour de Pearl Jam, Mike McCready noie ses incertitudes dans l’alcool quant à Layne Staley d’Alice In Chains, l’héroïne devient pour lui une compagne quotidienne. Du côté des vétérans de Screaming Trees ce n’est guère mieux, le groupe miné par les querelles internes est en suspens pour une durée indéterminée et leur batteur Barett Martin ronge son ennui. Pour tous ces musiciens le besoin de se ressourcer est une évidence pour rester en vie, la réponse l’est aussi et elle passe encore et toujours par la musique.

Durant l’été, Mike McCready se rend à Minneapolis pour entreprendre une cure de désintoxication, sur place il rencontre John Baker Saunders, un bassiste de blues local. Ensemble ils jouent pour tuer le temps et l’ennui, rien de très concret ne sort de ces jams impromptues, mais quelques semaines plus tard de retour à Seattle, McCready contacte son ami Layne Staley, pour continuer à travailler sur ces ébauches et pourquoi pas donner vie à un nouveau projet. Barett Martin est également contacté et accepte immédiatement le poste de batteur que lui propose le duo tandis que Saunders les rejoint à Seattle. Dès les premières répétitions il se passe quelque chose de spécial entre ces musiciens aux passés si différents mais aux attentes tellement similaires. Ils accouchent d’une poignée de chansons mélancoliques calées entre heavy rock poignant et ballades bluesy chargées en émotions pures. Délestés de l’identité sûrement trop lourde de leurs groupes respectifs, les quatre hommes laissent libre cours à leur inspiration et explorent des territoires musicaux nouveaux en même temps qu’ils expurgent leurs démons intérieurs. C’est en ce sens qu’Above est à mon avis un des albums les plus cathartiques des années 90.

Dans un premier temps, le quatuor choisit de s’appeler Gacy Bunch, Gacy comme Wayne Gacy, tueur en série tristement célèbre et Bunch comme Brady Bunch, sitcom un peu bébête des années 70. C’est sous ce nom que le groupe fait ses débuts sur scène le dimanche 16 octobre 1994 au Crocodile Café de Seattle. C’était il y a 12 ans jour pour jour, Layne Staley présentait son nouveau groupe : « Hi, we’re the Gacy Bunch, an addict and an alcoholic ». Pour cette première le répertoire du groupe est encore assez limité, Barett Martin a même avoué que pour cette date, ils ne disposaient que de quelques intros et plans issus de jam-sessions. Il n’empêche que le public présent ce soir là est conquis.

Fin 1994, Wayne Gacy devient Mad Season, expression anglaise désignant la période de l’année où poussent le plus de champignons hallucinogènes, c’est Mike qui a suggéré ce nom en repensant au mixage de Ten qui avait eu lieu dans le Surrey au moment de cette éclosion. Mad Season prend aussi la direction du 2212, 4th Avenue de Seattle, siège des Bad Animals Studios pour enregistrer en 10 jours leur premier album, Brett Eliason l’ingénieur du son de Pearl Jam assiste le groupe qui a choisi de produire lui-même ce disque. Mad Season réapparaît sur scène le 31 décembre 1994 dans un club de Seattle, le RKCNDY où il donne son premier concert en tête d’affiche, puis le 8 janvier 1995 toujours à Seattle mais au Palace il participe au show radio « Self Pollution » avec Pearl Jam, Soundgarden et Mudhoney. Pour l’occasion le quatuor interprète « Lifeless Dead » et « I Don’t Know Anything », les deux titres les plus lourds de l’album à venir.

Précédé par le single « River Of Deceit », Above sort le 14 mars 1995. Parmi les surprises de ce premier album figure la participation de Mark Lanegan, le chanteur des Screaming Trees sur « I Am Above » et « Long Gone Day ». Malgré une promo complètement hors sujet – en France l’album est annoncé comme « une éclaircie dans le ciel de Seattle …» – Above est certifié disque d’or en quelques semaines (le 14 juin 1995) et « River Of Deceit » connaît une belle carrière sur les radios rock américaines, un clip est même réalisé. Malgré les sollicitations, Mad Season ne donne que trois concerts à Seattle dont une date filmée le 29 avril 1995 au Moore, qui donne lieu à la sortie d’une VHS fin août de la même année.

Chacun reprend ensuite ses activités dans son groupe respectif, hormis une reprise de John Lennon, « I Don’t Wanna Be a Soldier » pour le tribute « Working Class Hero », rien de plus n’est enregistré par Mad Season. Certains nouveaux titres sont mis en chantier en 1997 en vue d’un deuxième album pour lequel Mark Lanegan remplacerait Layne Staley trop malade pour continuer l’aventure et Mad Season se rebaptiserait Disinformation, mais finalement rien de concret n’aboutit. C’est la fin de Mad Season, chacun de ses participants y ayant trouvé ce qu’il était venu y chercher, au moins temporairement. Mike McCready retrouve Pearl Jam revigoré et n’a plus jamais quitté son groupe avec qui il poursuit une carrière exemplaire, Layne Staley sort l’année suivante un inespéré album éponyme avec Alice In Chains, Barett Martin et Mark Lanegan font de même avec Screaming Trees et l’album Dust, enfin John Baker Saunders s’installe à Seattle et rejoint les Walkabouts, un des piliers du label Sub Pop.

La vie avait encore une fois bel et bien repris le dessus…

  1. wake up
  2. x-ray mind
  3. river of deceit
  4. i’m above
  5. artificial red
  6. lifeless dead
  7. i don’t know anything
  8. long gone day
  9. november hotel
  10. all alone
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9 Commentaires

  1. guim says:

    « Wake up young man, it’s time to wake up
    Your love affair has got to go
    For 10 long years » ::cry::

  2. Faya says:

    +1 guim, l’album commence par sa chanson la plus poignante. Sinon, un pur bijou. L’un des 4 albums dont je suis le plus fan dans toute la scène de Seattle (aux côtés de Dirt, Alice In Chains éponyme, et Ten). Malheuresement, comme Ten, je l’ai découvert trop tard !

  3. shaq says:

    Un bijou, que je réecoute régulièrement, avec toujours le même plaisir.

  4. Layne says:

    Magnifique… Les solos de McCready sur « november Hotel » sont absolument geniaux !!
    Un grand disque.
    Bonne Kro !

  5. pearly says:

    Magique de bout en bout, une des pièces incontournables des 90’s… Et oui guim, difficile de ne pas frissoner ou verser sa larme à l’écoute de cette chanson.

  6. jonben jonben says:

    Quelle voix putain!

  7. matstriker says:

    On sait ou my chemical romance a pompé sa pochette

  8. Ayesta! says:

    Incroyable…j’ai beau être un fan de Alice In Chains, pas mal apprécier Pearl Jam et particulièrement apprécier le timbre de Layne Staley, cet album ne me fait ni chaud ni froid!
    Que dalle! Les morceaux s’enchaînent en ne provoquant que de l’ennui (à part « Long gone day »).
    Je suis peut-être arrivé après la bataille…

  9. Tika says:

    j’ai connu cet album assez tard, hélas..depuis je l’écoute régulièrement et à chaque fois c’est un plaisir et je m’en lasse pas..c’est profond!

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