Voilà certainement l’album le plus « what the fuck » de la fin d’année 2020 à faire son trou tardivement dans le top annuel sans que l’on n’ait rien venu venir… Convulse est un groupe finlandais qui a d’abord été actif fugacement entre 1988 et 1994 œuvrant à l’époque dans un death metal d’abord franchement old school (World Without God) avant de tenter avec Reflections en 1994 une première incursion du bizarre et du différent dans sa musique, pour un résultat qui n’aura pas convaincu les critiques de l’époque provoquant on l’imagine, la dissolution du groupe.
De retour en 2013 avec Evil Prevails nos finnois sont bizarrement repartis sur le terrain du death old-school tout à fait classique et sans grand génie bien que pas déplaisant pour autant. Je me souviens à l’époque avoir été aguiché par la chouette pochette de l’album et l’avoir écouté une ou deux fois, sans y revenir et sans en garder un souvenir impérissable. C’est en 2016, sur Cycle of Revenge, que le groupe, réduit à un trio, laissa à nouveau parler ses envies d’expérimentation en s’éloignant une nouvelle fois radicalement du death metal classique. Je pense ne pas avoir entendu la moindre note de cet opus avant de creuser dans la discographie du groupe pour les besoins de cette chronique. Si je l’avais fait, il est probable que la première écoute de Deathstar aurait été moins déroutante et je me serais peut-être même attendu à ce décalage impressionnant entre les vocaux toujours majoritairement growlés et caverneux, et la musique qui n’a plus rien de death, comme ce que proposait donc le groupe sur Cycle of Revenge.
Deathstar pousse encore un cran plus loin la radicalisation du changement voulu par les finlandais et on ne peut que féliciter cette prise de risque tant le groupe propose quelque chose de beaucoup plus original et intéressant que ces deux opus les plus death old-school. Mais cela reste une vraie prise de risque très clivante, peut-être plus encore que celle qui a pu pousser Chapel of Disease à s’éloigner de son death metal de 2015 qui lui avait pourtant valu un vrai succès critique, pour introduire ce classic rock déroutant à la Dire Straits sur le très bon …And as We Have Seen the Storm, We Have Embraced the Eye.
Il suffit de faire un tour sur la page Rate Your Music du groupe pour constater que cette prise de risque n’a effectivement pas que des adeptes (Deathstar affichant à l’heure où j’écris ces lignes un tout petit 2.31/5 qui montre que la démarche du groupe n’est pas comprise et est même rejetée par beaucoup).
En dehors de la voix caverneuse et growlée donc, plus de trace de death metal sur Deathstar, à tel point que la première écoute est déroutante et qu’on se demande même franchement si le parti pris du groupe n’est pas une erreur majeure tant les vocaux paraissent peu adaptés à la musique sur laquelle ils viennent se poser. Une sorte de rejet survient avec la première écoute, empreint d’une certaine fascination néanmoins, d’autant que musicalement beaucoup de bonnes choses interpellent assez rapidement et font dresser l’oreille. Les écoutes successives vont permettre de relativiser la bizarrerie vocale encore plus flagrante que sur Cycle of Revenge, le décalage étant encore plus grand. Mais la voix de Rami est cette fois un peu moins en avant dans le mix, quasiment au même niveau que les autres instruments, et on n’en vient même finalement à la considérer comme l’un des instruments de l’album ni plus ni moins. Pour autant, et même si l’on finit par s’habituer, je dois admettre que je reste partagé sur le choix effectué par le groupe et me demande tout de même s’il n’eut pas été plus heureux d’opter pour des vocaux moins radicaux (à l’image peut-être de ceux qui avaient été tenté sur « Ever Flowing Stream » sur Cycle of Revenge ?).
Car un album qui s’ouvre comme du Pink Floyd sur lequel on poserait une voix caverneuse, il faut reconnaître qu’il fallait oser! Et ce n’est là que le début de cet album un peu fou qui a le grand mérite de nous emmener avec lui 40 minutes durant, au cours desquelles on n’aura pas le temps de s’ennuyer. La voix n’étant pas le point fort de cet album vous l’avez compris, on focalisera plutôt sur la guitare qui a en revanche beaucoup de choses à raconter, avec des passages très inspirés à la limite du rock psychédélique (« Extreme Dark Light ») à grand renfort de clavier vintage ou des assauts simplement addictifs comme sur le superbe « Whirlwind » au tempo très enlevé. Et que dire des claviers bien vintage de « The Summoning » et de cette cavalcade finale à la batterie dont on ressort avec la grosse banane ? C’est tout simplement de la boulette ce que nous proposent les finlandais. Et la suite est à l’avenant, avec cette étrange guitare slide sur « Chernobyl » ou le très rock n’ roll justement (et presque deep purplien) et dégoulinant de claviers 70’s « We Sold Our Soul for Rock’n’Roll » et… et je vous laisse découvrir le reste de cet album enthousiasmant du début à la fin, pour peu encore une fois que vous avaliez la pilule vocale.
Original, foutraque, et excellent tout simplement!
Tracklist :
01. Extreme Dark Light
02. Whirlwind
03. The Summoning
04. Chernobyl
05. We Sold Our Soul for Rock’N’Roll
06. Deathstar
07. Make Humanica Great Again
08. Light My Day
09. The End
Très étonnant vu le passé du groupe, qui aurait pu se contenter de se reposer sur ses lauriers avec le retour en grâce de la vieille scène de Death finlandais à laquelle ils appartiennent.