AEIR est une toute récente formation basée entre Grande-Bretagne et Etats-Unis comprenant en ses rangs des membres de Light Bearer, Momentum et Basement. Le groupe propose sur ce premier volume un concept-album qui ressemble beaucoup à l’époque dans laquelle nous vivons actuellement: « S’affirmant comme une espèce dominante, nous avons maraudé, pillé et décimé les ressources de notre monde naturel en toute impunité ». S’inspirant dans ses lyrics de divinations mésopotamiennes, de féodalité comme de dissidence prolétarienne, AEIR apparait sur A Frith Befouled davantage comme un chant de révolte derrière cette riche écriture.
Et si le thème est sensible, la musique d’AEIR va de pair avec lui. Le quintet s’oriente vers un mélange de force et de fragilité. L’introduction « Serfdom » met un peu de temps à monter en puissance, mais les choses démarrent réellement avec « A Frith Befouled », titre-fleuve qui intègre en son sein diverses parties distinctes. L’entame est assez calme, façon post-rock, avant que la voix rugie (parfois secondée de scansions) ne viennent donner plus de poids à l’ensemble. L’atmosphère s’épaissit et gagne en mélancolie via des transitions prenantes tandis que du chant clair plaintif se fait entendre sur la dernière partie de ce quart d’heure ultra intense.
Après un interlude acoustique et sensible (« Curia Regis »), « The Threshing Floor » poursuit dans un post-rock très émouvant, l’atmosphère tragique nous accueillant avant qu’à nouveau, l’orage ne revienne. Les paysages de désolation ainsi dessinés par AEIR sont saisissants par la tristesse qu’ils dégagent, mais aussi par l’hypnose créée. Enfin « Profaned Moira » termine par encore plus d’ambivalence entre l’utilisation plus franche du chant clean et de passages éthérés déchirants (notamment celui à mi-morceau), et niveau déchirement, les cris concluant ce morceau viennent vous glacer le sang (si ce n’était pas déjà fait auparavant).
Sans aller dans le crustcore épique de Light Bearer, AEIR propose une forme de post-metal/sludge atmosphérique très immersif et constamment dans la noirceur. Et si les riffs employés sont typiques du genre (Neurosis étant judicieusement cité comme influence), la façon qu’a le groupe de les agencer au travers d’émotions renouvelées (la voix clean y étant pour beaucoup) transporte aisément l’auditeur dans son univers de violence et de désespoir.
- Serfdom
- A Frith Befouled
- Curia Regis
- The Threshing Floor
- Profaned Moira