Between The Buried And Me – Colors

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Style: deathcore melting potAnnee de sortie: 2007Label: Victory

Between the Buried and Me ou l’encyclopédie du métal? En tout cas un groupe à part dans le metal actuel. Intégrés dans une scène deathcore dont ils débordent allègrement, le groupe voit plus loin qu’un simple assaut de brutalité virtuose. Dans ce qu’on peut facilement qualifier de prime abord de prétention, Between the Buried and Me s’approprient toutes les formes de metal extrême (black excepté) en les diluant dans une sauce progressive démonstrative façon Dream Theater dans ses moments les plus techniques, tout en y injectant d’évidentes influences rock 70s/80s, le tout sans crainte du ridicule, le but étant manifestement d’en mettre plein les oreilles de l’auditeur.

Ce n’est pas comme si on avait à être étonné de ce nouvel album, les 3 premiers albums du groupe avaient balisé le terrain et Alaska était déjà à mon sens un album génial. Le groupe s’est l’année dernière fendu d’un album de reprises certes pas vraiment exceptionnel mais qui soulignait déjà la diversité de leurs influences (Pantera, Depeche Mode, King Crimson, Earth Crisis, Faith No More, Queen, Counting Crows). Ils reviennent aujourd’hui avec ce Colors, un album qui risque de les établir pour de bon comme un des meilleurs représentants du metal américain, alliant une technique impressionnante et une faculté de synthèse sans pareille.

L’album est ambitieux et ne comporte à vrai dire que 6 véritables morceaux additionnés d’un court interlude propice à un solo de basse (qui tue). Seulement 6 donc mais qui remplissent allègrement un album, s’échelonnant entre 5 et 14 minutes. Between the Buried and Me y poursuit le style de compositions de « Selkies: The Endless Obsession » du précédent album Alaska, c’est à dire un melting pot d’alternance de registres entre metal extrême, metal prog et rock aérien.

L’intro au piano entre Muse et Elton John qui se poursuit toutes saturations dehors pour finir en blasts est un peu grotesque, mais on sent bien que le groupe a souhaité poser dès le premier morceau les conditions nécessaires pour écouter le reste de l’album, être prêt à tout et accepter n’importe quoi… même le plus douteux.
Les choses sérieuses commencent avec la deuxième partie de « Foam Born », puis « Informal Gluttony », pur déferlement de riffs deathcore avec son début orientalisant, puis « Sun of Nothing » qui présente très bien en une dizaines de minutes le concept musical que propose Between the Buried and Me :
   – deux tiers d’un condensé de tout ce qui peut se faire en metal/hardcore extrême (death, hardcore, grind, thrash) le tout avec une aisance technique sans borne, agrémenté d’un chant guttural bien reconnaissable, tel un raclement bien grave. Du riff agressif, chaotique ou blasté, du riff lourd et haché sur lesquels se posent des leads en sweep, et surtout du solo collé un peu partout, déferlement de notes en mode hyperactif, mélodies intriquées entre les 2 guitares, riffs harmonisés inspirés de la musique classique déjà fortement présents dans le heavy,
   – un tiers d’escapades vers d’autres styles, ralentissements épiques prog avec nappes de clavier, break pûrement jazz, élans mélodiques empruntant tout à tour au pop/rock, au rock doomy aux chants éthérés, passages acoustiques… ces passages sont l’occasion pour Timmy qui effectue ici une prestation remarquable de polyvalence, d’intégrer des chants mélodiques se mêlant à l’ensemble sans choquer, contrairement à leurs anciens albums. Ces mélodies vocales sont plutôt aériennes et aigues mais très variées, il y a même quelques clins d’oeil flagrants à Mike Patton sur les voix d’un passage « Prequel To The Sequel » ou lors d’un passage délirant d’une vingtaine de secondes sur « Sun Of Nothing » qui fait fortement penser à du Fantomas.

Ces gars bouffent donc vraiment à tous les râteliers, se permettent toutes les déviations de style grâce à une maîtrise technique toujours mise en avant. Ils piquent effectivement des idées à droite à gauche mais possèdent la créativité et la science de la liaison qui nécessite une parfaite assimilation des principes des styles abordés, une polyvalence et une virtuosité dans le jeu de chaque musicien comme du chanteur. Les tempos se dédoublent, s’accélèrent, le groupe s’emploie à imaginer des liaisons inventives, des ponts entre les différents passages et au final le sinistre côtoie le guilleret, le guttural le suraigu, le sérieux les délires, et c’est ce qui est le plus difficile dans ce genre d’exercice, créer un tout cohérent à partir de styles très divers, maîtriser les transitions. Between the Buried and Me n’est sûrement pas le premier groupe à se risquer à des mélanges aussi extrêmes mais ils ont le mérite de concevoir leurs morceaux comme des « tout » et non comme une suite de courts passages juxtaposés comme un Naked City par exemple.
Le manque de liant est un reproche que l’on pouvait faire à Alaska qui est ici largement atténué voire complétement comblé, Colors est en effet beaucoup plus fluide, l’album s’écoutant facilement d’une traite. D’ailleurs les plages s’enchaînent et il n’est pas vraiment évident de pointer un morceau particulier sortant du lot, l’album est à écouter comme un tout, chacun y remarquera des moments forts tout comme des (éventuelles) faiblesses différentes.

Que dire de plus sur un tel album? Je ne peux pas dire que je ne faisais pas confiance au groupe pour surpasser Alaska, qui est déjà un chef d’oeuvre pour moi, mais je dois pourtant avouer que ce Colors va jusqu’à le surpasser, proposant des morceaux plus cohérents, abordant des styles variés tout en les imbriquant avec brio, faisant preuve d’une précision de chaque instant dans l’exécution. La production est parfaite, j’ai même rarement entendu une basse aussi bien positionnée dans le mix, ultra-ronde et trouvant sa place à tous moments, et elle aussi diablement bien jouée. Les amateurs des albums précédents, en particulier d’Alaska ne peuvent qu’être comblés par Colors qui enfonce le clou, pour les autres c’est une découverte à tenter (d’autant que c’est leur album le plus accessible), qui ne ravira certes pas tout le monde (trop extrême, trop foutoir, pas assez death etc) mais vu sa qualité, cet album ne pourra que figurer en bonne place dans les préférences de beaucoup de lecteurs d’Eklektik cette année.

  1. foam born: (a) the backtrack
  2. (b) the decade of statues
  3. informal gluttony
  4. sun of nothing
  5. ants of the sky
  6. prequel to the sequel
  7. viridian
  8. white walls
jonben

Chroniqueur

jonben

Krakoukass et moi avons décidé de créer Eklektik en 2004 suite à mon installation à Paris, alors que disparaissait le webzine sur le forum duquel nous échangions régulièrement, ayant tous deux un parcours musical proche entre rock et metal, et un goût pour l'ouverture musicale et la découverte perpétuelle de nouveautés. Mes goûts se sont affinés au fil du temps, je suis surtout intéressé par les groupes et styles musicaux les plus actuels, des années 90s à aujourd'hui, avec une pointe de 70s. J'ai profité pendant des années des concerts parisiens et des festivals européens. J'ai joué des années de la guitare dans le groupe Abzalon. Mes styles de prédilection sont metal/hardcore, death technique, sludge/postcore, rock/metal prog, avec des incursions dans le jazz fusion et le funk surtout, depuis une île paumée de Thaïlande. 

jonben a écrit 528 articles sur Eklektik.

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13 Commentaires

  1. krakoukass Krakoukass says:

    Ouaip. Chef d’oeuvre ce coup-là. J’avais trouvé « Alaska » un peu imbitable quand même, mais là c’est la grosse claque. Une véritable merveille, pleine de cohérence, musicale, mélodique, avec des trouvailles de partout. Ca tape dans tous les sens mais ça tombe toujours juste. A coup sûr une sortie majeure de l’année, qui devrait finir en bonne place dans un top pourtant bien chargé…

  2. wakos says:

    Chef d’oeuvre pour moi aussi ! Le groupe réussi à proposer des morceaux hyper riches et variés tout en restant cohérent. Comme le dit Krakou, ça part dans tous les sens, mais ça sonne juste et bien tout en évitant de donner une impression de gavage ou de surenchère … Dans mon Top 10 de l’année à coup sûr !

  3. Needle says:

    Il faut quand même parler du dernier morceau, absolument dantesque surtout dans la dernière moitié, deferlements de solos bien inspirés et mélodiques, pour moi le sommet de tout leurs disques :p Le reste est clairemment excellent aussi.

  4. Chewy says:

    La tuerie de l’année. Cet album est dantesque. Une vraie claqie dans la gueule. Ce groupe ne m’a pas déçu une seule fois depuis leur début même si je reste un inconditionnel de The silent circus et de la chanson Ad a dgdglmut.
    Les musiciens sont impressioonants et je dois dire que pour ma part c’est Blake Richardson (ex- Glass casket) qui me fait halluciner derrière ses fûts.
    Bravo pour ta chro Jonben , parfaite. Je te suis à 100%.

  5. OYC says:

    Très loin d’être mauvais mais aussi loin d’être un chef d’oeuvre pour ma part. BTBAM piochent un peu (trop) dans les assiettes des groupes de metal technique (Spastic Ink, Blotted Science, Martyr, Don Cab même, des fois c’est limite du copy/paste). A part ca, grosse musicalité, excellent sens de la composition et des transitions vraiment bonnes!
    Une très bonne surprise que j’attendais depuis leur superbe « Silent Circus »

  6. damien luce says:

    Et bien quelle claque ce disque…

  7. Angrom Angrom says:

    Entièrement d’accord avec ta chronique. Cet album figurera dans mon top 10 annuel ..

  8. Hatespherex says:

    Quel pied…tout simplement

  9. Jvice says:

    Un superbe album, sur le fil et tendu. Un mélange racé et puissant, touches lumineuses et sublimes fusionnent avec musiques sombres et extremes! Une chimère dépravée mais douce née de musiciens géniaux. Album culte!!

  10. 2nd° Decapitation says:

    Album fantastique.Le groupe vas beaucoup plus loin que sur Alaska et est presque méconnaissable!
    Le statut de Chef d’oeuvre est amplement meriter!
    (de plus il est trouvable pour casiment rien sur Amazon!)

  11. Laurent says:

    Ouais, album génialissime!!
    White Walls est splendide, du premier au dernier riff!!! 15 minutes du pur bonheur.
    Le batteur assure à fond!!! Les autres aussi :-)

  12. Kenzobz says:

    Yahouuuuuu ! Première écoute très satisfaisante, y’a des passages monstrueux !! Par contre je rejoins OYC sur le côté « repompe », parfois y’a des successions de riffs qui font tous penser à des groupes différents pendant des minutes entières ! Mais bon ça passera au fil des écoutes.
    Ptain ce solo à la fin de White walls….
    Feed meee feaaaaar… ^^

  13. Laurent says:

    Le DVD Live de cet album magistral est enfin disponible avec en prime d’autres morceaux tels que Mordecai ou Selkies. Précipitez-vous!!!!!

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