Sang-hyeon, prêtre coréen désespéré de sauver des vies et de ne pas juste prier pour leur salut dans l’autre-monde, rejoint un centre de recherche africain sur le virus Emmanuelle. Similaire au virus Ebola dans ses effets, le virus Emmanuelle est meurtrier et ne laisse aucune chance de survie à ceux qui en sont infectés. Des 500 personnes infectés volontairement par le virus, Sang-hyeon sera pourtant le seul survivant après avoir été transfusé d’une dose de sang d’origine d’inconnu. A l’insu du personnel médicale et de lui-même, à son retour en Corée, il se transforme progressivement en vampire et le gout du sang devient irrépressible ainsi que celui de la chaire.
Thirst, neuvième film réalisé par Park Chan-Wook (JSA, Old Boy, Lady Vengeance), l’un des chefs de file du cinéma coréen et l’un des réalisateurs les plus talentueux de sa génération, entreprend de se ré-approprier le mythe vampirique. Érotique, sanglant et romantique, Thirst use des codes du film de vampire pour raconter la découverte progressive de la vie par un prêtre dont l’existence a toujours été tournée vers les autres.
Sang-hyeon n’embrasse pour autant pas ses nouveaux dons et son ouverture sensorielle (les vampires sont ici dotés d’une force surhumaine, de sens sur-développés et d’un pouvoir de régénération) et interroge sa foi chrétienne. Tout au long du film il évoluera dans sa manière de considérer sa propre nature jusqu’à un final mémorable et silencieux. Thirst diffère donc très fortement d’un conte fantastique comme Old Boy dans son calme où se mêle violence, touches d’humour grinçants et érotisme. Le pacte scellé par l’acte sexuel entre Sang-hyeon et Tae-joo est tout aussi centrale que dans Old boy. L’attention est alors portée sur les détails, le jeu de regard. Les acteurs ne produisent pas une scène fantasmée mais tout simplement réaliste où deux êtres apprennent à s’aimer dans une étreinte charnelle puissante et forte en symbolisme.
Le scénario passe donc au second plan puisqu’il est, somme toute, assez prévisible. Le jeu des symboles, les scènes se retrouvant en écho durant le film (le discours de Sang-hyeon dans le confessionnal et celui qu’il tient plus tard à Tae-joo sur le suicide ou les préliminaires de l’acte sexuel reproduit lors de la scène de la « résurrection ») et la mise en image des tourments des personnages forment la majeure partie du film sans que le réalisateur ne perde le rythme de son oeuvre.
Ainsi, Kang-oh Song ne manque pas à sa réputation et prouve qu’il est capable d’interpréter des personnages extrêmement variés : sa performance dans Memories of murder, sa folie dans Le Bon, la Brute et le Cinglé et les transformations de sa personnalité tout au long de Thirst, tant innocent, enjôleur, dominant, dominé et résigné. Qu’en à Ok-vin Kim, elle excelle dans un rôle de femme frustrée devenant progressivement manipulatrice pour finir par être un véritable chat quand elle joue avec ses victimes.
Park-chan Wook continue donc de faire évoluer son cinéma et use de ses leçons apprises dans ses précédents films. Thirst use de l’absurde et du développement subtil des relations amoureuses de I’m a cyborg tout en retournant vers la beauté épique et déchiré de Lady vengeance.