Chez Eklektik, on rigole déjà de voir accourir ventre à terre les intégristes du doom, les ayatollahs du sludge, les junkies du stoner, le couteau entre les dents, le pétard dans la poche, prompt au tapage nocturne et incendiaire. Alors oui ce dossier parle de doom, de stoner, de sludge. Mais non on ne se risquera pas à une définition en bonne et due forme de chaque terme. Pourquoi ? Tout simplement parce que définir c’est imposer une norme et que les groupes naviguant dans ces sphères musicales sont peu enclins à cette étiquetage. Pas qu’il n’y ait d’éléments communs ni de similitudes entre chaque style énoncé mais au delà de ces analogies il faut bien reconnaître une certaine liberté de ton et de création qui ne facilite pas la tâche des journaleux et encore moins celle du business, mais c’est ainsi et c’est d’ailleurs ainsi que nous concevons la musique libre de ces choix et de sa création.. Nous nous refusons donc à tout étiquetage et autre définition dogmatique. Tout juste nous reconnaîtrons cette communion autour du rock à guitares, de la puissance et de la lourdeur du son vintage 70’s et donc de ces précurseurs que furent Black Sabbath, Led Zeppelin, Deep Purple, MC5, Stooges, Pink Floyd, Hawkwind… Alors oui, ce dossier est avant tout prétexte à vous présenter le visage d’une certaine scène underground toujours active aujourd’hui et bien plus encore. Avec l’apparition de nombres de groupes ces derniers temps qui invoquent cet héritage et prennent tous les traits d’une troisième vague de conquérants du riffs. Et oui ces groupes sont héritiers d’un pan de l’histoire musicale underground que l’on va s’efforcer de vous présenter.
Un point d’histoire donc. Après le doom des 80’s, hybride heavy metal, reproduisant dans un premier temps le riffing de Black Sabbath avec des groupes tels que Pentagram, Trouble, St Vitus ou s’embarquant vers un peu plus de lyrisme et de mysticisme avec Candlemass, le doom va lui-même évoluer vers des sphères plus sombres, plus dépressives encore (doom en traduction dans le texte « destin funeste »…), plus extrêmes aussi en se conjuguant avec la violence du death metal. Le tempo va progressivement se ralentir encore et encore au cours de ces décennies pour évoluer d’un format quasi rock 70’s à des groupes beaucoup plus estampillés metal comme la scène anglaise de la fin des 80’s-début 90’s des Paradise Lost, My Dying Bride et autres Anathema jusqu’à certaines formes musicales extrêmes léthargiques, annihilées, minimalistes mais toujours puissantes, encore plus funestes, massives et laminaires. On retiendra notamment ici Esoteric, Thergothon, Skepticism ou bien encore Winter et Nortt.
Histoire d’appuyer notre propos et ce point d’éclairage sur la dilution des genres, Sloth et son The Voice of God, Sleep avec Jerusalem/Dopesmoker ou Cathedral et sa pléthorique discographie démontrent ces limites insondables entre le doom et le stoner qui pour le cas de Cathedral oscille justement entre le doom le plus laminaire et des productions plus groovy, plus enfumées, plus stoner.
Le stoner donc qui se développe en même temps et en parallèle avec un son plus rock n’roll, bluesy et chargé de groove évidemment héritier du rock 70’s d’inspiration Sabbathienne. Mais contrairement au doom, le stoner semble plus inspiré par la fibre psyché, un rien insouciante et plus chaleureuse produisant cette impression de nonchalance positive. Pour l’anecdote ce n’est qu’à la fin des 90’s que le terme stoner apparaît (stoner pour défoncé…), fruit du brainstorming de business toujours prompt au marketing de ses nouvelles signatures et de médias aussi influents que Kerrang.
Mais les Kyuss, Monster Magnet, Fu Manchu, Down, Clutch, Karma to Burn n’auront pas attendu cet apanage publicitaire pour produire leur son et créer des mythes. Les plus évidents, le label Man’s ruin aujourd’hui mort et enterré et le groupe Kyuss, fusillé sur l’autel de l’indifférence à l’époque, aujourd’hui incontournable surtout après la médiatisation des Queens of the Stone Age de Josh Homme et la parution de Desert sessions. Néanmoins aujourd’hui encore cette scène génère foultitude de groupes, certes pas tous essentiels mais dont on retiendra par exemple Acid King, Colour Haze, Mammatus, Dead Meadow, Gas Giant, Roachpowder, Kinski. Quoiqu’il en soit, allez vous noyer dans ces effets de guitares types delay ou flanger, vous perdre sur les routes des déserts ou dans les volutes de Marie-Jeanne, cette fille si aguicheuse et si facile.
Reste le cas du sludge, si promptement médiatisé aujourd’hui, utilisé à toutes les sauces et notamment concernant les groupes issus de cette scène et de son évolution dite du post-hardcore, digne héritière de Neurosis & co. Scène que l’on éludera justement à dessein même s’il faut bien reconnaître certaines résurgences entre ces styles.
A l’image d’un monde en décrépitude inexorable, le sludge est né au cœur du bayou de la Nouvelle-Orléans. D’où ce fameux nom de scène NOLA que vous pourrez retrouvez tout au long de vos lectures sur le style. Ces instigateurs : Eyehategod, Crowbar, Acid Bath, tous plus cultes, tous plus influents les uns que les autres. Là encore cette scène outrancière comptent nombre de groupes plus ou moins mythiques comme les californiens de Buzzov’en, ou les anglais de Iron Monkey. Points communs à tous ces groupes : les thèmes d’abord toujours chargés de cynisme, violence, critique sociale ou mises à nu de déviances psychotiques. Musicaux ensuite : à la croisée du doom et du punk (et pour ces formes les plus extrêmes du crust et du grind), ce style est l’un des réceptacles les plus malsains de la scène metal combinant lenteur et puissance du doom, accélération du punk/hardcore, production plus ou moins roots et chant hurlé. On pourrait retenir aujourd’hui dans sa forme la plus primale des groupes tels que Noothgrush, Ufomammut, Moss, Grief, Humanasaur, ou bien encore Blackthroat.
Pour autant, une fois cette page d’histoire tournée, le propos de ce dossier demeure bien la présentation des héritiers de ces scènes. Comme nous l’avons déjà indiqué nombre de groupes majeurs dès les 90’s et même avant sont passés d’un style à un autre (Cathedral donc) pour parvenir aujourd’hui à un malstrom plus ou moins improbable (Electric Wizard et son doom psyché et mystique). C’est bel et bien l’image et l’évolution actuelle de cette scène underground que la présence des groupes ici chroniqués vient à prouver. Liste non exhaustive il va s’en dire…
Playlist :
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Black Sabbath – War Pigs (Paranoid) – 00:00
Pentagram – When the Screams Come (First Daze Here) – 07:50
Candlemass – Solitude (Epicus Doomicus Metalicus) – 10:44
Cathedral – Beneath a Funeral Sun (The Garden of Unearthly Delights) – 16:19
My Dying Bride – For You (Like Gods of the Sun) – 21:24
Paradise Lost – Jaded (Draconian Times) – 27:55
Crowbar – Embracing Emptiness (Time Heals Nothing) – 31:17
Acid Bath – Paegan Love Song (Paegan Terrorism Tact) – 34:46
Eyehategod – 30% Bag (Takes as Needed for Pain) – 40:12
Iron Monkey – House Anxiety (Our Problem) – 42:57
Buzzoven – Hollow (Sore) – 46:45
Sleep – Dragonaut (Sleep’s Holy Mountain) – 53:04
Kyuss – Green Machine (Blues for the Red Sun) – 58:41
Down – Losing All (NOLA) – 62:14
Monster Magnet – Look to Your Orb for the Warning (Dopes to Infinity) – 66:34
Fu Manchu – Evil Eye (The Action Is Go) – 72:42
Clutch – Spleen Merchant (Blast Tyrant) – 76:08
Karma to Burn – Thirty Nine (Almost Heathen) – 78:43
Electric Wizard – Vinum Sabbathi (Dopethrone) – 84:09
Chroniques :
electric wizard – witchcult today – 2007 Rise Above Records |
capricorns – ruder forms survive – 2005 Rise Above |
akimbo – forging steel and laying stone – 2006 Alternative Tentacles |
black cobra – bestial – 2006 Delboy Records / Loss recordings |
middian – age eternal – 2007 Metal Blade |
ocean – here where nothing grows – 2005 Important Records |
rwake – voices of omens – 2007 Relapse Records |
swarm of the lotus – the sirens of silence – 2005 Abacus Records |
kongh – counting heartbeats – 2007 Trust No One Recordings |
corrupted – el mundo frio – 2005 HG Fact |
ultraphallus – lungville – 2005 Autoprod / Ruminance |
asunder – works will come undone – 2006 profound lore |
unearthly trance – the trident – 2006 Relapse Records |
kylesa – time will fuse its worth – 2006 Prosthetic Records |
yob – the unreal never lived – 2005 metal blade |
soilent green – confrontation – 2005 Relapse Records |
om – pilgrimage – 2007 Southern Lord Recordings |
baroness – the red album – 2007 Relapse Records |
monarch – die tonight – 2007 Throne Records |
taint – secrets and lies – 2007 Rise Above |
down – III- over the under – 2007 Roadrunner/CNR |
ramesses – misanthropic alchemy – 2007 Feto Records |
Anthologik :
cathedral – the ethereal mirror – 1993 Columbia / Earache |
acid bath – when the kites string pops – 1994 Rotten Records |
karma to burn – karma to burn – 1997 roadrunner |
bien la compile mais le player deconne