En voilà un qui, faute de promotion (et d’un label pour justement mettre en place et pousser ladite promotion, cet album étant paru en autoproduction) a pu passer à travers les radars des amateurs de metal prog’ qui auront du coup fortement intérêt à jeter une oreille à ce petit bijou suédois qui va se faire une bonne place dans le top 2020, en ce qui me concerne bien devant les poids lourds d’Haken par exemple.
Rien qu’avec le titre d’ouverture la claque est là : un titre qui contient tous les ingrédients qu’on peut attendre d’un groupe de metal prog en 2020. De la puissance, des vocaux de grande qualité, une richesse musicale réelle, le tout sur plus de 9 minutes qui passent comme 2 (un signe qui ne trompe pas). Et si l’on pourrait aisément s’inquiéter de la capacité du groupe à tenir la cadence après une telle entrée en matière, qu’on se rassure : ce n’est là que le début d’un album riche et long (64 minutes) et ô combien satisfaisant mais qui ne dévoilera ses charmes qu’après plusieurs écoutes.
Ces suédois n’ont pas leur pareil pour proposer une aventure variée avec des titres parfois plus courts mais pas moins intéressants et à chaque fois le constat est sans appel : Vulkan a la faculté de contracter voire même de faire disparaître le temps.
Chez Vulkan, on a beau faire du prog’ moderne, plus influencé par Opeth ou Between the Buried and Me que par King Crimson, on n’en oublie pas que la richesse instrumentale est souvent associée à ce genre : le classique (mais toujours efficace) mellotron mais surtout ce magnifique violon sur « Bewildering Conception of Truth » ou « Blinding Ornaments » est là pour nous le rappeler, de même que la discrète mais néanmoins bien présente flûte sur « This Visual Hex », « The Royal Fallacy » ou « Marans Ritt » (synthé imitant la flûte de pan je pense en l’occurence, mais l’effet recherché est tout de même obtenu), ou bien encore le synthé vintage de « Spökskepp ». On entend même des cuivres et des percussions (de même que de l’accordéon il me semble) sur le morceau le plus long de l’album « The Royal Fallacy » et le dernier titre de l’album (« The Madness Sees No End »), tandis que l’intermède « Klagans Snara » nous transporte de la Suède à l’Australie aborigène, pour faire la transition vers « Revkiem » qui introduit l’une des particularités du groupe : le chant a beau être majoritairement en anglais, le choix a néanmoins été fait par Vulkan de s’exprimer aussi dans sa langue natale (le suédois donc) sur 3 titres de l’album. On avait déjà été initié au suédois dans le prog’ avec le dernier album d’Opeth, et on n’est pas dépaysé du coup d’autant que ça fonctionne tout aussi bien chez Vulkan. On n’est d’autant moins choqué par ce changement de langue que Jimmy Lindblad chante aussi bien en anglais que dans sa langue natale : écoutez moi donc sa prestation de haut vol sur le splendide « Blinding Ornaments » que le chanteur porte sur ses épaules et qui collerait la chair de poule au plus résistant des ours polaires. C’est exactement la qualité vocale que j’attends (vainement) du chanteur d’un groupe comme Haken.
Comme son chanteur, le groupe sait alterner les passages musclés et les autres un peu plus légers, l’album commence d’ailleurs en frappant fort avec un des titres les plus metal de la plaque, avant de s’adoucir quelque peu, même si les gros riffs ne sont jamais très loin et ressurgissent alors qu’on commençait peut-être à les oublier (sur « Revkiem » justement). Ce n’est pas pour rien que le groupe décrit lui-même le genre qu’il pratique comme du « heavy prog' » sur sa page bandcamp. Jimmy a plusieurs fois l’occasion d’hausser le ton même s’il ne passe que très rarement dans un registre growlé (en fait uniquement sur un passage de « The Royal Fallacy » aux alentours des 7 minutes).
La constante reste quoi qu’il arrive la grande place laissée à la mélodie qui domine les débats et nous régale à de multiples occasions comme il se doit sur du rock/metal prog’, de même que les breaks, et autres changements de rythme qui sont légion sur des compositions aussi riches que fouillées, mais qui savent rester fluides et ne perdent jamais l’auditeur.
Je n’avais jamais entendu parler de Vulkan avant de poser une oreille sur ce qui est déjà leur 3ème album. Autant dire que, plus que convaincu par ce Technatura de haut niveau, je vais aller explorer un peu ce que j’ai raté sur les deux précédents albums de ces brillants scandinaves. Il serait incompréhensible qu’un combo aussi talentueux ne trouve pas rapidement un label pour le distribuer proprement et à grande échelle, comme il se doit.
Tracklist :
01 – This Visual Hex
02 – Hunter/Prey
03 – Redemption Simulations
04 – Bewildering Conception of Truth
05 – Klagans Snara
06 – Rekviem
07 – Spökskepp
08 – Technatura
09 – Marans Ritt
10 – Blinding Ornaments
11 – The Royal Fallacy
12 – The Madness Sees No End