Deux ans après le très bon Messe Basse, Nature Morte fait son retour avec un troisième album, cette fois sur le label nantais Frozen Records (Gravekult…). Oddity installe donc une nouvelle fois son mix personnel de black metal, shoegaze et autres trucs en « post », aux contrastes aussi multiples que les émotions. Et même si les couleurs de la cover peuvent rappeler le Sunbather de Deafheaven, le trio parisien parvient à se démarquer parmi la « masse » de groupes du genre.
En effet, il conserve intacte sa capacité à captiver l’auditeur via une musique aussi arrachée (à l’instar des vocaux toujours aussi raclés, tels ceux d’un corbeau chuchotant) que subtile (aux réminiscences d’An Autumn For Crippled Children). Dès « Bruises & Laces », on se fait très facilement embarquer dans ces paysages doux-amers, parfois sur la retenue, parfois plus exaltés. Un constat qui va se confirmer sur le superbe « The Pier », aux progressions post-rock soudain brisées avec fracas, avant que le dernier mouvement disons plus post-metal viendra clore ces presque dix minutes sous hypnose (le riff tournant en boucle étant particulièrement prenant).
Mais loin de ne s’en tenir qu’à ça, Nature Morte va aussi se permettre des sorties de piste bien maîtrisées, comme sur « Here Comes The Rain » qui voit Cindy Sanchez (Lisieux) venir compléter l’adoucissement de ce titre. Comme sur son passage sur le dernier Fange, sa voix si spéciale vient surtout apposer une touche onirique très touchante. D’ailleurs, le titre suivant « New Dawn » continuant de manière instrumentale dans cette optique apaisée avant de s’assombrir sur la fin pour annoncer une suite plus énervée (« Monday Is Fry Day » à l’entame survoltée, mais qui proposera lui aussi quelques contrastes aux harmonies plus douces).
Avec son intro post-punk, « Banquet Overflow For The Mind House » semble s’orienter du côté de Have A Nice Life, sauf que le trio reviendra ensuite du côté des nerfs puis de la retenue. Après deux titres plus courts, l’atmosphérique « Nothingness » puis le bruitiste « Untitled », Oddity viendra se conclure par une cover du culte « Fireal » de Deftones (tiré d’Adrenaline). Une adaptation post-black pas du tout hors sujet puisque l’originale possédait déjà des cris suraigus (assurés par Chi Cheng si je ne m’abuse) et une ambiance nauséeuse retranscrite avec succès par les parisiens. Le point final d’un superbe troisième album, aux influences et ambitions plus larges, et au rendu captivant de A à Z.
- Bruises & Lace
- The Pier
- Here Comes The Rain
- New Dawn
- Monday is Fry Day
- Banquet Overflow For The Mind House
- Nothingness
- Untitled
- Fireal